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Que cache le consensus des acteurs de la santé mondiale au sujet de la couverture sanitaire universelle? Une analyse fondée sur l’approche par les droits

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Pages 199-215 | Received 28 Jan 2016, Accepted 05 Dec 2016, Published online: 24 Apr 2017

RÉSUMÉ

La couverture sanitaire universelle fait l’unanimité sur la scène internationale. On y voit l’expression d’un souci partagé de contribuer au droit à la santé par la réalisation du droit aux soins. Néanmoins, des tensions persistent entre la volonté affichée des acteurs de la santé mondiale, dont les discours utilisent souvent un référentiel associé à l’approche fondée sur les droits, et les rares moyens d’action qu’ils se donnent. En outre, la disposition de ces acteurs à réaliser effectivement ce droit est discutable. Cet article met en lumière ces tensions grâce à une analyse ancrée dans l’approche fondée sur les droits.

ABSTRACT

There is an international consensus around the merits of universal health coverage. It is expressed through a shared concern for facilitating the right to good health by implementing the right to healthcare. Nevertheless, tensions persist between the willingness of global health actors, whose discourse is often framed in terms of human rights, and the scant implementation measures on the ground. Furthermore, the readiness of these actors to implement the right effectively is debatable. This article illuminates these tensions through an analysis anchored in the rights-based approach.

Introduction

Avec son inscription comme sous-objectif de l’objectif trois du Programme de développement durable (Assemblée générale des Nations Unies Citation2015b), la couverture sanitaire universelle (CSU) a obtenu le consensus de la communauté internationale. Cette nouvelle réforme, considérée comme la troisième transition de santé mondiale (Rodin et de Ferranti Citation2012), doit améliorer l’accès aux soins, tout en limitant l’appauvrissement des populations à la suite de la maladie. La problématique de l’accès aux soins est loin d’être nouvelle. Depuis la déclaration d’Alma-Ata en 1978, elle constitue une préoccupation constante des gouvernements, de la société civile, et plus largement des acteurs de la santé mondiale. En effet, l’accès aux soins est une condition nécessaire pour atteindre un meilleur état de santé, droit humain défini dans le préambule de l’Organisation mondiale de la santé (OMS Citation1946).

La conception de la santé comme droit humain se distingue de la conception de la santé comme capital (Evans Citation2014), promue notamment par la Banque mondiale dans un rapport phare de 1993 (World Bank Citation1993). Cette distinction fait écho à deux approches du développement fondamentalement différentes : d’une part, l’approche par les besoins qui sous-tend aujourd’hui la majorité des politiques de développement et selon laquelle l’aide au développement s’inscrit dans une démarche de charité qui vise à répondre aux besoins de populations bénéficiaires; d’autre part, l’approche fondée sur les droits, dont l’objectif est la concrétisation des droits humains. Selon Décary-Secours (Citation2017, 186), « cet objectif passe par l’identification de deux acteurs centraux du développement : (1) les détenteurs de droits (en portant une attention particulière aux populations marginalisées) et (2) les débiteurs d’obligations (généralement les États) correspondants ». Cette approche vise à dénoncer les inégalités et à rendre les peuples autonomes afin qu’ils deviennent des acteurs politiques de la construction démocratique.

L’établissement du droit à la santé dans plusieurs conventions internationales (Gruskin et Braveman Citation2013) et Constitutions nationales (Perehudoff Citation2008), ainsi que sa reconnaissance par plusieurs organisations intergouvernementales, telles que l’OMS ou l’Assemblée générale des Nations Unies, semblent indiquer une volonté des acteurs de la santé mondiale de réaliser le droit à la santé. L’instauration de la CSU constituerait un pas en ce sens en permettant la réalisation d’un droit aux soins (OMS Citation2012; Ooms et al. Citation2014). Dans ce contexte, deux questions se posent : Quelle forme prend le consensus des acteurs de la santé mondiale au sujet de la couverture sanitaire universelle? De quelle manière le référentiel de l’approche par les droits y est-il mobilisé, et avec quelles limites? En utilisant un cadre d’analyse inspiré de l’approche par les droits (Décary-Secours Citation2013), cet article tâche de répondre à ces questions, puis d’expliciter les tensions qui entourent ce nouveau sous-objectif de développement durable. Les arguments sont fondés sur une analyse exploratoire d’un échantillon de 22 documents publiés entre 2005 et 2012, officiellement attribués aux acteurs de la santé mondiale, et sont illustrés par des cas d’application en Afrique subsaharienne. L’échantillon des documents représente la diversité de la nature et de la répartition géographique des acteurs de la santé mondiale.

Un consensus fondé sur l’équité, l’imputabilité et la participation

L’équité d’accès aux soins et le respect du droit à la santé : les objectifs de la couverture sanitaire universelle

Bien que le droit à la santé soit quasiment absent des Objectifs du développement durable (Brolan, Hill, et Ooms Citation2015), l’établissement de la CSU comme sous-objectif semble s’inscrire dans la volonté de la communauté internationale de respecter ce droit en améliorant l’équité d’accès aux soins. En effet, la CSU vise à garantir « que tout un chacun puisse accéder aux services, sans subir de difficultés financières lors de leur paiement » (OMS Citation2010, ix). Elle répond ainsi au problème de discrimination financière créé en grande partie par la nécessité de payer les soins au point de service (Commission for Africa Citation2005; Health Poverty Action Citation2010; Save the Children UK Citation2009), mais également par d’autres coûts tels que le transport et l’hébergement (OMS Citation2010). Ces discriminations touchent notamment les plus pauvres (Assemblée générale des Nations Unies Citation2012), les minorités ethniques (OMS Citation2010), mais également les femmes, les personnes malades ou invalides, et les chômeurs (Bureau international du travail Citation2012). Dans certains contextes, le fait de payer les soins au point de service contribue également à renforcer des discriminations d’ordre socio-culturel, notamment liées au genre (Global Health Watch Citation2005; Nanda Citation2002). Qu’il s’agisse de la priorité de soins accordée aux hommes du ménage (OMS Citation2010) ou de la nécessité d’obtenir l’autorisation du chef de famille pour tout recours aux soins impliquant une dépense financière (Samb Citation2014), les femmes souffrent particulièrement de ces discriminations. En leur donnant accès aux soins sans barrière financière, la CSU contribuerait donc également à autonomiser les femmes (Global Health Watch Citation2005, 160).

Ainsi, le problème de l’accessibilité financière aux soins et des discriminations qu’il engendre justifie le consensus derrière la CSU. La non-discrimination, principe transversal à l’ensemble des droits humains (Gruskin et Braveman Citation2013; Hunt et Backman Citation2008), est un des principes fondamentaux de l’approche fondée sur les droits appliquée à la santé (Gruskin, Bogecho, et Ferguson Citation2010), garanti par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Assemblée générale des Nations Unies Citation1976). Dans cette perspective, la CSU est une expression du principe de non-discrimination en ce qu’elle vise à lutter contre les discriminations à l’accès aux soins (Ooms et al. Citation2014).

Considérant son fort lien de parenté avec les principes d’égalité et de non-discrimination (Hunt et Backman Citation2008), garantir un accès équitable aux soins par la CSU constitue un droit légal. Il n’est donc pas étonnant de constater que de nombreux acteurs de la santé mondiale se réfèrent au droit à la santé, soit pour soutenir la mobilisation en faveur d’un accès équitable aux soins de santé et de la CSU, soit de manière générale pour justifier leur approche du développement (Commission for Africa Citation2005, Citation2010; European Commission Citation2010; Forum on Universal Health Coverage Citation2012; People’s Health Movement Citation2009; Soixante-Quatrième Assemblée mondiale de la Santé Citation2011).

En résumé, le droit à la santé imprègne de plus en plus le discours des acteurs de la santé mondiale. Son fondement légal au plan international dans des conventions ratifiées par les gouvernements, au plan national dans plusieurs Constitutions nationales (Perehudoff Citation2008), voire au plan régional comme dans le cadre de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (États africains membres de l’OUA Citation1981), consolide l’argument d’une CSU garante du respect du droit à la santé.

Les moyens inspirés d'une approche fondée sur les droits : imputabilité, bonne gouvernance et participation

Les conditions de mise en œuvre de la CSU proposées par les acteurs de la santé mondiale se rapprochent du référentiel de l’approche fondée sur les droits. Appliquée à la santé, cette approche vise « à adopter une approche explicitement façonnée par les principes des droits humains » avec une attention portée aux éléments clés du droit à la santé, la participation, l’égalité et la non-discrimination, le contexte juridique et politique et la reddition de compte (Gruskin, Bogecho, et Ferguson Citation2010, 130). Les acteurs de la santé mondiale mobilisent en effet les principes d’imputabilité, de bonne gouvernance et de participation, propres à cette approche.

Renforcer l’imputabilité et la bonne gouvernance

Selon l’approche fondée sur les droits, l’État est considéré comme un débiteur d’obligations envers ses citoyens (Décary-Secours Citation2017; Gruskin et al. Citation2012). Sa responsabilité est alors de garantir la santé de sa population grâce, par exemple, à la CSU. Cette obligation est intrinsèque au droit à la santé, selon plusieurs acteurs de la santé mondiale (Action for Global Health [collective] Citation2010; Forum on Universal Health Coverage Citation2012; People’s Health Movement Citation2009).

Selon ces acteurs, la protection du droit à la santé par l’État passerait par des institutions publiques, législatives et exécutives, suffisamment développées, pour garantir le droit à la santé (Cinquante-Huitième Assemblée mondiale de la Santé Citation2005), et assurer les réformes en vue d’atteindre la CSU (Cinquante-Huitième Assemblée mondiale de la Santé Citation2005; United Nations General Assembly Citation2012). Dans cette perspective, le système de santé aurait un rôle fondamental dans la CSU (Council of the European Union Citation2010; Global Health Watch Citation2005; WHO Citation2007). L’État serait responsable de son bon fonctionnement, dont son financement. Cette imputabilité implique donc une gestion efficace et équitable de ses ressources pour atteindre la CSU. C’est pourquoi l’efficience (World Bank Citation2010) – « plus de santé pour son argent » (OMS Citation2010, 67) – est au cœur du renforcement des systèmes de santé. L’efficience renvoie à la notion de bonne gouvernance des États, dans la mesure où une bonne gouvernance permettrait d’instaurer les conditions nécessaires au développement d’un système de santé équitable (OMS Citation2010; WHO Citation2015).

L’imputabilité des États ne s’arrête toutefois pas à leurs frontières. En effet, la notion de solidarité entre les peuples, préconisée dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, est incluse dans le droit à la santé (Ooms et al. Citation2014). Ainsi, les États se sont engagés à soutenir, de manière financière ou technique, les actions et interventions de santé mondiale en vertu du droit à la santé (United Nations General Assembly Citation2012). C’est ce que rappelle le Conseil de l’Union européenne qui demande aux gouvernements et aux membres de l’Union de prendre leurs responsabilités en matière de développement et de renforcement des systèmes de santé des pays partenaires (Council of the European Union Citation2010).

L’imputabilité et la bonne gouvernance ne peuvent toutefois se faire sans la participation des acteurs (Council of the European Union Citation2010; United Nations General Assembly Citation2012), qu’ils soient individuels, collectifs, ou communautaires, issus de la société civile ou du secteur privé. Il appartient donc à l’État d’assurer cette participation, notion au cœur de l’approche fondée sur les droits (Gruskin et al. Citation2012), dans la transition vers la CSU.

Assurer la participation des acteurs de la santé

Garantir et promouvoir la participation de tous les acteurs de la société découle de la nécessaire imputabilité de l’État envers ses citoyens. Les moyens proposés pour assurer cette participation sont divers. Par exemple, Global Health Watch (Citation2005) demande que des règles et des codes éthiques soient soumis au contrôle des communautés et de la société civile pour assurer le bon fonctionnement du secteur de la santé et de sa bureaucratie. L’organisation propose également de mettre en place des espaces de discussion publics pour que tous les citoyens, même les plus pauvres, puissent débattre des réformes du système de santé. La Banque mondiale, quant à elle, recommande la décentralisation de certaines compétences au niveau communautaire pour la gestion budgétaire des politiques de santé ou d’accès à l’eau et l’assainissement, comme en Indonésie (World Bank Citation2010).

Outre son rôle de garant du droit à la santé et de gestionnaire des ressources dédiées à la santé, l’État pourrait avoir un rôle d’autonomisation des populations. Ainsi, selon la Commission pour l’Afrique, l’exclusion des familles les plus vulnérables pourrait être évitée si l’État intégrait les communautés dans les politiques locales de santé afin de les rendre autonomes et de les impliquer dans la démarche de CSU (Commission for Africa Citation2005). Cette autonomisation passerait également par une meilleure information des citoyens (Ministry of Foreign Affairs of Denmark Citation2009). Le réseau Action for Global Health va plus loin en soutenant la mise en place d’un système politique plus participatif impliquant les parties prenantes de la société civile, pour mettre en place la CSU (Action for Global Health [collective] Citation2010).

Les acteurs de la santé mondiale reconnaissent la diversité des acteurs qui doivent être impliqués pour atteindre la CSU. L’OMS évoque les acteurs du secteur privé et la société civile comme des partenaires essentiels pour le développement des politiques de financement du système de santé en transition vers la CSU (WHO Citation2012, Citation2015). La Commission pour l’Afrique rappelle, quant à elle, la nécessaire participation « des gens ordinaires et des communautés locales aux décisions de développement » en matière de santé (Commission for Africa Citation2005, 46), tandis qu’Oxfam enjoint – par exemple – le gouvernement ghanéen à considérer la société civile et les patients comme des partenaires actifs de la mise en place de la CSU (Alliance for Reproductive Health Rights et al. Citation2011). Les différents acteurs de la santé mondiale accordent à la société civile un rôle important non seulement comme actrice des réformes, mais également comme partenaire de la promotion de la participation des citoyens, grâce, par exemple, à des espaces de dialogue pour recueillir les demandes des professionnels de la santé ou des habitants par l’intermédiaire des représentants communautaires (Alliance for Reproductive Health Rights et al. Citation2011).

De manière générale, le message qui semble se dégager des discours des acteurs de la santé mondiale est celui d’un État garant de la transition vers la CSU. Cette transition implique de renforcer le système de santé et d’impliquer les acteurs de la société civile en tant que partenaires actifs des débats publics.

Les tensions derrière l’apparent consensus sur la couverture sanitaire universelle

La CSU semble donc faire l’unanimité. L’endossement de Margaret Chan (Citation2012, 4), Directrice générale de l’OMS, qui le considère comme « le concept le plus efficace que la santé publique puisse offrir » renforce ce sentiment d’un consensus largement partagé. Une fiche d’information intitulée Le mouvement mondial en faveur de la couverture sanitaire universelle et co-signée par Save the Children, l’OMS, la Banque mondiale, Management Sciences for Health, The NCD Alliance, One Million Community HealthWorkers Campaign et la Fondation Rockefeller (Save the Children et al. Citation2016) donne d’ailleurs le ton.

Pourtant, des tensions persistent, d’abord entre les discours, qui utilisent largement un référentiel associé à l’approche fondée sur les droits, comme le montre la section précédente, et la pratique, qui témoigne parfois du dévoiement de ces principes. D’autres tensions sont également perceptibles entre les valeurs et les visions du monde portées par les acteurs de la santé mondiale qui semblent difficilement réconciliables.

Tensions entre discours et pratique : le dévoiement de l’approche par les droits

L’imputabilité de l’État, auprès de qui et comment?

Selon l’approche fondée sur les droits appliquée à la santé, « toute personne ou groupe victime d’une violation du droit à la santé doit avoir accès à des recours effectifs, judiciaires et toute autre mesure efficace à tous les niveaux » (Gruskin et al. Citation2012, 342). Ainsi, sans obligation légale, le principe d’imputabilité est vide de sens.

Dans le cadre de la CSU, plusieurs résolutions et recommandations en faveur du respect du droit à la santé émanent de la communauté internationale. Parmi elles, les résolutions de l’Assemblée mondiale de la santé de 2005 (WHA 58.33) et 2009 (WHA 69.12) engagent les États à financer la CSU (European Commission Citation2010). Par ailleurs, la résolution WHA 62.12 fait de la CSU un des quatre piliers de la santé primaire (Soixante-Quatrième Assemblée mondiale de la Santé Citation2011). Des moyens de contrôle existent pour s’assurer que les États respectent leurs engagements. À titre d’exemple, les États signataires des traités sur les droits humains, dont le droit à la santé, s’engagent à démontrer régulièrement qu’ils respectent ces droits et qu’ils mettent en œuvre les moyens nécessaires pour les faire avancer et respecter (Gruskin et Braveman Citation2013).

Toutefois, ces résolutions ne sont pas contraignantes, bien qu’elles constituent le socle fondateur de la santé mondiale au niveau international (European Commission Citation2010). La mise en application du droit à la santé est donc rarement évoquée (Global Health Watch Citation2005), faute de garantie légale. Par conséquent, si le Rapporteur spécial des Nations Unies rappelle que le manquement au financement de la santé constitue une violation du droit, en vertu de l’article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (United Nations General Assembly Citation2012, 4), rares sont les mécanismes de recours.

Face à ce fossé, l’Organisation internationale du travail, s’exprimant dans le cadre de la protection sociale, demande la mise en place de tels mécanismes, y compris concernant la CSU : « Des procédures de réclamations et de recours impartiales, transparentes, efficaces, simples, rapides, accessibles et peu coûteuses devraient aussi être définies » (Bureau international du travail Citation2012, 9). Dans le cadre de l’aide au développement, le ministère des Affaires étrangères du Danemark indique que le pays récepteur de l’aide a pour responsabilité de tenir ses promesses en matière de santé, au risque peut-être de ne plus percevoir de financements (Ministry of Foreign Affairs of Denmark Citation2009). En attendant que ces recommandations soient suivies d’effets, le réseau d’organisations internationales non gouvernementales Global Health Watch demande aux communautés d’être les garantes des droits, de concert avec les activistes. L’organisation People’s Health Movement appelle ainsi les populations à mettre en place des initiatives populaires pour faire pression sur les gouvernements et le secteur privé, et faire respecter notamment les idées de la déclaration d’Alma-Ata sur les soins de santé primaire (People’s Health Movement Citation2009).

On se trouve ainsi face à la limite principale du discours des acteurs de la santé mondiale : la difficulté, voire l’impossibilité, de garantir ou de proposer des modalités de recours pour assurer l’imputabilité des pouvoirs publics en matière de droit à la santé, aux niveaux international, régional, ou national. Ainsi, la CSU n’apparait pas comme une obligation légale, en vertu des droits humains et du droit à la santé, limitant le principe d’imputabilité des acteurs qui en sont les garants.

La participation de qui, pour quoi?

Dans l’approche fondée sur les droits, la notion de participation se rapproche de sa conception émancipatrice proposée par Paolo Freire ou Fals Borda (Leal Citation2007; VeneKlasen et al. Citation2004). L’objectif de la participation est de transformer les structures culturelles, politiques et économiques qui sont à l’origine de la pauvreté et la perpétuent (Leal Citation2007). Elle reconnait ainsi le droit des individus et des groupes à participer aux processus qui affectent leur développement, et particulièrement les interventions et politiques qui désengagent les États de leur responsabilité en matière de droit à la santé (Gruskin et al. Citation2012).

Sur la scène internationale, le terme « participation » est à la mode (Leal Citation2007) et prend différentes significations. C’est particulièrement le cas dans le cadre de la CSU lorsque l’on considère les acteurs invités à y participer et la définition de leur rôle. Ainsi, la participation du secteur privé dans la CSU est souhaitée par plusieurs (Cinquante-Huitième Assemblée mondiale de la Santé Citation2005; Ministry of Foreign Affairs of Denmark Citation2009; Soixante-Quatrième Assemblée mondiale de la Santé Citation2011; World Bank Citation2010), notamment dans le cadre de partenariats privé-public (OMS Citation2010; World Bank Citation2010). En effet, selon le réseau Action for Global Health (collective) (Citation2010), la coopération des secteurs publics et privés garantirait l’accès à la santé, en s’attaquant aux déterminants sociaux de la santé qui contribuent à limiter l’accès aux soins (hygiène et assainissement, sécurité de l’emploi, protection sociale, etc.).

Cette « participation » des acteurs du secteur privé à la santé correspond toutefois à une définition littérale du terme, et non à la définition de l’approche fondée sur les droits. Cette confusion est dangereuse dans la mesure où l’intégration du secteur privé dans des missions publiques va en effet souvent de pair avec un désengagement de l’État (Global Health Watch Citation2014), dans une vision inspirée de la Nouvelle Gestion Publique (Mills et al. Citation2001) qui domine les grandes réformes internationales des systèmes de santé depuis les années 1990 (Serre et Pierru Citation2001). Ce mouvement est aux antipodes de ceux qui se réclament d’une approche fondée sur les droits. Ainsi, certaines organisations remettent en question le rôle des acteurs du secteur privé dans la santé. Global Health Watch (Citation2005) met en garde contre la commercialisation de la santé et s’inquiète de la privatisation des systèmes de santé fondés sur la rentabilité, au détriment de l’accès universel aux soins. Le collectif montre, en outre, comment la conception de la CSU autour de la seule question du financement de la santé désengage l’État de son rôle de fournisseur de soins, au profit d’une privatisation des soins (Global Health Watch Citation2014). Parallèlement, sans toutefois remettre en question la participation des acteurs privés, l’Assemblée générale des Nations Unies estime que la privatisation des systèmes de santé a parfois pu provoquer l’augmentation des paiements directs dans les centres de santé et ainsi réduire l’accès aux soins des plus pauvres et des plus éloignés géographiquement (Assemblée generale des Nations Unies Citation2012), ce qui incite à des mesures de contrôle et de régulation. L’enjeu est donc de renforcer les structures de gouvernance et le pouvoir de régulation des États dans des pays qui n’ont pas toujours ces capacités de contrôle.

Plus proche d’une démarche centrée sur les droits, la participation de la société civile consiste à représenter les populations auprès des pouvoirs publics dans le cadre, par exemple, d’organisations syndicales ou d’associations de femmes. C’est dans cette perspective que plusieurs organismes issus de la société civile défendent l’idée que les organisations non gouvernementales ont pour rôle la défense des droits humains (Global Health Watch Citation2005). Les acteurs de la société civile devraient donc être des porte-parole (Global Health Watch Citation2005), et des médiateurs au sein des communautés, par exemple entre le personnel soignant et les villageois (OMS Citation2010), ou en faisant intervenir les leaders traditionnels ou les organisations religieuses (Health Poverty Action Citation2010). Ils pourraient aussi assister la population dans la mise en place de groupes de pression afin que les gouvernements instaurent la gratuité des soins au point de service, mettent en place la CSU (Alliance for Reproductive Health Rights et al. Citation2011), ou encore respectent les principes de la déclaration d’Alma-Ata (People’s Health Movement Citation2009). Au Niger par exemple, les ONG internationales et locales ont eu un rôle central dans l’organisation et l’animation d’une conférence nationale réunissant en 2012 160 personnes de tous les horizons pour évoquer les problèmes majeurs et améliorer la mise en œuvre de la politique de gratuité des soins (Moha et Ridde Citation2014). Au Burkina Faso, une coalition d’ONG internationales et locales s’est mobilisée pendant plusieurs années pour produire des données probantes puis développer une stratégie de plaidoyer afin de faire en sorte que l’État décide, en 2016, de formuler et mettre en place une politique de gratuité des soins pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes (D’Ostie-Racine, Dagenais, et Ridde Citation2016).

Par ailleurs, le concept de participation selon l’approche par les droits fait référence à la notion d’autonomisation, ou empowerment. Selon certains acteurs de la santé mondiale, le principe même de CSU contribue à l’autonomisation des populations. Par exemple, Global Health Watch considère que « les systèmes de santé devraient agir comme moteur de promotion de la santé et plus généralement du développement, ainsi qu’en tant qu’instrument de promotion de l’équité et de l’autonomisation des pauvres » (Global Health Watch Citation2005, 73). De même, l’Organisation internationale du travail recommande aux États de mettre en place des consultations nationales pour planifier la mise en pratique de la sécurité sociale et favoriser le dialogue social, afin de concrétiser l’autonomisation des communautés (Bureau international du travail Citation2012).

Malgré ces bonnes intentions, la vision de la participation qui prédomine à l’échelle internationale reste réduite à une action économique, très éloignée de la participation dans une approche fondée sur les droits, comme le montre la déclaration des États réunis au sommet des Nations Unies pour l’adoption du Programme de développement durable qui précise que : « Tous les pays ont à gagner à l’existence d’une main d’œuvre saine et qualifiée, dotée des connaissances et des compétences nécessaires pour accomplir un travail productif et satisfaisant et pour participer pleinement à la vie sociale » (Assemblée générale des Nations Unies Citation2015a, 9).

Tensions au sein des acteurs : des visions du monde difficilement réconciliables

Les conceptions et mises en application variées des notions d’imputabilité et de participation dans le cas de la CSU témoignent de l’éclatement des visions du monde portées, voire défendues, par les acteurs de la santé mondiale. Sans être totalement polarisées, ces visions du monde font écho à deux courants de la santé mondiale qui s’entrechoquent régulièrement, notamment concernant la CSU : un courant biomédical et un courant holistique.

La couverture sanitaire universelle, un moyen ou une fin ?

Un des principes de l’approche fondée sur les droits est l’indivisibilité et l’interdépendance des droits (Décary-Secours Citation2017). Le droit à la santé fait ainsi partie d’un ensemble de droits humains à caractère indivisible. Ce principe, exprimé à l’article 25.1 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, est réaffirmé dans le compte-rendu de la Soixante-Quatrième Assemblée mondiale de la Santé (Citation2011, 1). Les déterminants sociaux de la santé (Commission des déterminants sociaux de la santé Citation2009) sont l’expression de ce droit, ancrée dans une conception holistique de la santé.

Dans cette perspective, la CSU est un moyen d’améliorer la santé des populations et de permettre à chacun d’atteindre le meilleur état de santé possible, en permettant des actions tant sur l’offre de soins (par exemple, qualité des services) que sur la demande (par exemple, accessibilité financière). Elle nécessite toutefois que l’on se préoccupe d’autres déterminants. Global Health Watch (Citation2005) et la Commission pour l’Afrique (Commission for Africa Citation2005), montrent à ce sujet que l’éducation des femmes et des filles doit leur permettre un meilleur accès aux soins. Prendre en compte les déterminants sociaux de la santé signifie, pour le réseau Action for Global Health (collective) (Citation2010), lutter contre d’autres freins à l’accès à la santé, tels que l’accès à l’eau, à l’hygiène, la faiblesse des infrastructures, le manque de protection sociale. Le Conseil de l’Union européenne, quant à lui, rappelle que la notion de santé est indissociable des questions de genre, de sécurité alimentaire, de nutrition, d’accès à l’eau potable, d’hygiène, d’éducation et de lutte contre la pauvreté (Council of the European Union Citation2010).

Parallèlement, un autre courant propose une conception biomédicale de la santé (Clark Citation2014a), plus restrictive, qui tend à faire l’amalgame entre santé et soins de santé (Clark Citation2014b). La CSU y apparaît comme une fin en soi, un objectif à atteindre par l’amélioration du financement du système de santé qui, de fait, constitue le cœur des discussions (Global Health Watch Citation2014), au détriment des autres enjeux de la CSU (Clark Citation2014b). Dans cette conception, la santé n’est pas perçue comme un droit, mais comme un capital qui permet de lutter contre la pauvreté, justifiant la mise en œuvre de la CSU. L’extrait suivant de la Commission pour l’Afrique témoigne de cette vision : « des travailleurs qualifiés et en bonne santé sont plus productifs et accomplissent leur potentiel avec dignité » (Commission for Africa Citation2005, 17). C’est également l’argument mis de l’avant par le président de la Banque mondiale selon lequel : « l’instauration de la couverture universelle et de l’équité en matière de santé est l’élément indispensable à la réalisation des objectifs mondiaux visant à éliminer l’extrême pauvreté d’ici à 2030 et à stimuler une prospérité partagée » (Kim Citation2013). Ce discours est ancré dans une vision linéaire du développement, dépendante de la croissance économique, dans un contexte où la notion d’efficience place l’État comme disposant de ressources limitées qui doivent être utilisées efficacement. C’est pourquoi la question du financement de la CSU est aussi présente dans les discussions.

Ainsi, la CSU est une illustration révélatrice de la manière dont se forme un consensus à l’échelle internationale : unis derrière un concept unique, les acteurs de la santé mondiale y donnent toutefois le sens qu’ils souhaitent, ce qui oriente les actions qu’ils mènent notamment dans les pays à faible et moyen revenu. C’est ce que tend à montrer l’exemple des réformes entreprises en Afrique subsaharienne pour atteindre la CSU.

L’exemple de réformes récentes du système de santé : gratuité des soins et financement basé sur les résultats

Parmi les politiques de santé destinées à promouvoir la couverture sanitaire universelle, deux réformes majeures touchent particulièrement l’Afrique subsaharienne, et illustrent les tensions paradigmatiques qui touchent la santé mondiale.

D’un côté, de nombreux gouvernements africains ont décidé de supprimer le paiement direct, soit de manière universelle (par exemple, soins de santé primaire), soit pour certaines populations (par exemple, femmes enceintes, enfants de moins de cinq ans) (Robert et Samb Citation2012). En agissant sur la demande de soins, l’objectif était de faciliter l’accès financier aux services de santé, rendu foncièrement inéquitable par ces paiements demandés aux patients (Russell et Gilson Citation1997). Ces gouvernements ont été soutenus dans leur prise de décision et leur démarche par plusieurs acteurs de la société civile (Robert et Ridde Citation2013). Cependant, rares ont été les institutions internationales explicitement en faveur de ces politiques, à l’exception notable d’ECHO – le Bureau de l’aide humanitaire d’urgence de l’Union européenne – qui a financé plusieurs projets pilotes, et la coopération britannique qui a soutenu certains pays pendant quelques années. Les autres institutions, notamment la Banque mondiale et l’OMS, sont longtemps restées discrètes sur le sujet. Leurs hauts responsables se sont parfois exprimés en faveur de telles réformes (The Global Campaign for the Health Millennium Development Goals Citation2009), sans toutefois en faire une ligne de conduite explicite pour leurs représentants et cadres dans les pays partenaires, limitant l’impact sur leurs actions de terrain. Cette timidité ne tient pas seulement au défi de pérennité financière de ces politiques, qui questionne surtout les volontés politiques (Ridde, Campbell, et Martel Citation2015). Elle tient également à la vision ancrée dans la Nouvelle Gestion Publique, soutenue depuis plus de deux décennies, par ces institutions qui ont promu le principe d’utilisateur-payeur (Ridde Citation2014).

Pour favoriser la CSU, la Banque mondiale s’est plutôt engagée dans une réforme inspirée de la Nouvelle Gestion Publique : le financement basé sur les résultats. Il s’agit de rompre avec le système de budget historique pour financer les établissements sanitaires sur la base de résultats quantitatifs et qualitatifs précisés dans un contrat de performance. L’hypothèse est qu’en changeant les modes de financement des établissements et du personnel de santé, touchant souvent des primes à la performance, la qualité des soins s’améliore, incitant les patients à recourir plus souvent aux services de santé. Cependant, en faisant fi de l’accessibilité financière et de la capacité contributive des populations, cette approche risque de profiter plus largement au personnel de santé, comme cela a été le cas des réformes des années 1980. En effet, en généralisant le paiement direct, ces réformes ont permis de garantir la présence du médicament sans assurer son accessibilité financière, tandis que les agents de santé ont bénéficié d’une amélioration de leurs conditions de travail, parfois de primes et d’un renforcement de leur pouvoir, en s’immisçant dans la gestion communautaire décentralisée (Paganini Citation2004).

L’amélioration de l’accessibilité financière devrait pourtant aller de pair avec celle de la qualité de l’offre de services. Or, quasiment aucun des pays où le financement basé sur les résultats est impulsé n’a, en même temps, tenté de trouver une solution au problème d’accessibilité financière. Partout ou presque, on demande encore aux patients de payer les soins au point de service, alors que les conséquences en sont catastrophiques (Gilson Citation1997). Seul le Burkina Faso teste, depuis 2015, la mise en œuvre conjointe du financement basé sur les résultats avec une exemption du paiement des soins pour les plus pauvres. Les responsables de ce programme n’ont toutefois jamais voulu entamer de discussions sur la pertinence de supprimer le paiement pour tous. Fidèle à la Nouvelle Gestion Publique, et à l’histoire des projets et des idées de la Banque mondiale, le ciblage des plus pauvres a été préféré à l’universalisme de l’exemption. Les risques politiques (par exemple, faible appui général à une solution qui ne concerne pas la majorité), sociaux (par exemple, stigmatisation) et techniques (par exemple, erreurs de sélection) du ciblage sont pourtant bien connus (Mkandawire Citation2005; Sen Citation1995), y compris dans le contexte de la CSU (Fox et Reich Citation2015). Les promoteurs du financement basé sur les résultats ne semblent donc pas avoir saisi l’opportunité de leur énorme investissement en Afrique pour aller au-delà de cette dichotomie surannée. Dans le pire des cas, ils ont centré leur réforme sur l’offre, et au mieux, comme au Burkina Faso, uniquement sur l’accessibilité financière des plus pauvres, démarche typique d’une approche fondée sur les besoins (Décary-Secours Citation2013).

En outre, toujours au Burkina Faso, l’implication de la population dans la gouvernance du système de santé a été minime, voire inexistante, alors qu’elle était au cœur des réformes des années 1980. Les populations n’ont en effet pas participé à la décision de tester cette réforme dans leur pays, tandis que leurs représentants nationaux ont été peu sollicités, comme dans le cas de la Zambie (Barnes et al. Citation2014). Quant aux représentants communautaires impliqués dans la gestion des centres de santé, par le biais des comités de gestion, ils ont été exclus du système et de ses bénéfices, comme dans le cas du Burundi (Falisse et al. Citation2012). Le pouvoir des professionnels de santé, qui a toujours été très important malgré les politiques de décentralisation et de participation communautaire (Ridde Citation2011), s’est ainsi accru par la mise en œuvre du financement basé sur les résultats. Ce sont en effet eux qui y sont formés, qui reçoivent les financements et le paiement des résultats, et qui s’en distribuent les bénéfices et autres primes à la performance. Les paysans, à qui l’on demande de travailler dans ces comités à titre bénévole et qui doivent signer les chèques pour les infirmiers, ne sont pas associés à cette manne financière, dont la pérennité reste par ailleurs à démontrer.

Une approche fondé sur les droits de la CSU nécessiterait que l’on revienne aux fondements d’une santé publique préoccupée par l’équité et fondée sur l’universalisme progressif (Breton Citation2015). Dans le cadre de la CSU, cela implique la mise en place concomitante du financement basé sur les résultats pour renforcer la qualité de l’offre des services, la suppression du paiement direct pour tous à l’aide d’un financement public, et des mesures spécifiques pour permettre aux plus pauvres de profiter de cette amélioration de l’offre. On sait en effet que l’exemption du paiement des soins n’est pas suffisante et qu’il faut accompagner et soutenir les plus vulnérables, isolés et démunis, à pouvoir profiter des soins offerts gratuitement (Ridde et Jacob Citation2013).

Conclusion

Il semble y avoir – au sujet de la CSU – une volonté de la part de la communauté internationale de se positionner dans une approche fondée sur les droits, afin de justifier une action collective qui nécessite l’établissement d’un consensus relativement robuste pour établir un agenda d’action explicite et commun. Toutefois, la mobilisation dans les discours du référentiel propre à cette approche se heurte à une insuffisance de moyens d’action. Ainsi, si notre analyse ne permet pas de conclure à une instrumentalisation de ce champ lexical, on peut cependant s’inquiéter des divergences sur la scène internationale quant à l’interprétation des valeurs qui lui sont associées et à leur opérationnalisation, ainsi que de l’absence d’intérêt ou de préoccupation pour faire respecter les obligations faites aux États en la matière. En effet, bien que les textes et constitutions soient des cadres d’action, et non des outils contraignants, ils ont néanmoins une portée symbolique qui engage la responsabilité de leurs signataires.

L’approche par les droits promeut un ensemble de valeurs que reflètent des concepts clés formant un référentiel dont les implications pour l’action sont explicites. Utiliser un tel cadre d’analyse pour étudier les discours et actions des acteurs de la santé mondiale offre la possibilité de porter un jugement critique envers ces acteurs, de façon à les inciter à assumer les implications, même symboliques, de l’utilisation d’un tel langage. Ainsi, une étude systématique et approfondie des discours récents des acteurs, mise en parallèle avec la réalité de leurs actions sur le terrain, permettrait de mieux identifier les fossés et d’éventuelles instrumentalisations de l’approche par les droits.

Cela dit, que la volonté de réaliser le droit à la santé soit rhétorique, symbolique, ou ancrée dans un véritable processus de changement de paradigme, elle teinte indéniablement les débats, discussions et décisions prises à l’échelle internationale. Le chemin pour atteindre le respect du droit à la santé est encore long, comme le montrent l’absence de moyens appropriés et la conception dominante de la CSU, particulièrement restrictive. La réalisation du droit à la santé, via un agenda explicite visant à renforcer ou créer les mécanismes nécessaires pour assurer son respect, et à rendre la voix aux acteurs de la société, constituera sans doute la quatrième transition de santé mondiale.

Remerciements

Les auteurs remercient Bonnie Campbell et Étienne Roy Grégoire pour leurs précieux commentaires des versions antérieures de cet article ainsi que les évaluateurs anonymes.

Financement

Cette recherche a été financée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, 2011–2015 [numéro de financement 410-2011-2298]. Emilie Robert est titulaire d’une bourse de recherche postdoctorale des Instituts de recherche en santé de Canada [MFE-146744]. Valéry Ridde dispose d’une Chaire de recherche en santé publique appliquée des Instituts de recherche en santé du Canada [CPP 137901].

Les auteurs

Emilie Robert est docteure en santé publique. Elle s’intéresse aux politiques et systèmes de santé en Afrique de l’Ouest et à la couverture sanitaire universelle.

Aurélia Lemoine est diplômée de Sciences Po Toulouse et du Master Solidarité et Actions Internationales de l’Institut Catholique de Paris. Elle développe des projets d’aide médicale auprès de communautés Karens en Thaïlande.

Valéry Ridde met à profit son expérience multidisciplinaire pour analyser la mise en œuvre d’interventions communautaires en santé mondiale. Il est engagé dans l’application des connaissances avec des ONG, des organisations internationales et des gouvernements.

Références