Abstract
Figuration négative au départ, la bestialité est représentée dans l’œuvre de Giono d’avant-guerre par des personnages aux puissances sauvages et aux pulsions instinctuelles, qui, par un processus inconscient, se montrent cruels envers l’animal. Mais ces instincts puissants, quand ils sont domptés, inaugurent l’art et la création. Aussi la bestia-lité se mue-t-elle en animalité, en force vive et intense qui, en s’infiltrant dans l’imaginaire et l’écriture de Giono, devient une affaire d’esthétique. Les animaux, en effet, lorsqu’ils s’imposent dans le texte gionien (par la force de la description), se matérialisent, deviennent concrets et donnent à la fiction une identité visuelle. Ce procédé poétique rend l’écriture plus souple et plus stylisée. Il atteste de la présence d’un univers sensuel que l’homme seul peut percevoir et où il se sent en harmonie avec le Grand-Tout.
Notes
1 La violence de l’animal fonctionne comme un instinct de vie programmé et a des fonctions positives. Elle répond à des stimuli déclencheurs de l’agression : un territoire menacé, un partenaire convoité, une faim non rassasiée, etc. Sa ritualisation atténue sa menace en ce sens que le vaincu, reconnaissant le vainqueur, fuit (même si c’est dans la mort).
2 C’est le titre d’une nouvelle dans Solitude de la pitié, tome I.
3 Solitude de la pitié, tome I.
4 Solitude de la pitié, tome I.
5 Extrait d’une lettre adressée à Louis Brun, le 12 juin 1935, citée dans « Notice ». Tome II.
6 Dans Notes et variantes sur ce roman, Luce Ricatte souligne que certains noms ne correspondent pas à la réalité. Voir tome II, p. 1364.