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RÉSUMÉ
Cet article analyse la construction historique des tensions politiques dans la région de Mopti en insistant sur les dynamiques conflictuelles qui s’articulent autour de la hiérarchie entre groupes statutaires peuls et les transformations de l’économie politique du monde rural. La formation de groupes armés à vocation religieuse, aux contours flous, a notamment permis d’inverser les rapports de forces avec certaines élites locales, désormais moins capables d’imposer leur autorité. Par ailleurs, l’article montre le blocage de la représentation démocratique inapte à apaiser les tensions. Les élites peules issues des groupes statutaires dominants ont su se redéployer dans la nouvelle arène électorale depuis la mise en place du processus de démocratisation initié dans les années 1990 et ainsi prendre contrôle des postes électifs, souvent au détriment des catégories subalternes. Enfin, l’article montre que le rôle de l’État dans la région est largement perçu de manière négative.
ABSTRACT
This article analyses the historical construction of political tensions in the region of Mopti, while stressing the conflict dynamics that revolve around statutory Fulani groups and the transformations in the political economy of the rural communities. The formation of religious armed groups with ill-defined contours has helped to reverse the balance of power with some local elites, which are now less able to impose their authority. In addition, the article demonstrates the blocking of democratic representation incapable of easing tensions. Fulani elites from the dominant ruling groups have managed to redeploy in the new electoral arena since the establishment of the democratisation process and thus to gain control of elected positions, often to the detriment of the subaltern categories. Finally, this article shows that the role of the state in the region is widely perceived in a negative way.
Déclaration
Aucun conflit d’intérêt potentiel n’a été rapporté par l’auteurs.
Notes
1. Une première version plus longue de cet article a été publiée sous forme de rapport en avril 2018 pour le centre d’étude FrancoPaix, qui a financé la recherche de terrain. https://bit.ly/2G2auM3.
2. Les termes “autochtones” et “allochtones” (ou leurs équivalents dans les langues nationales) sont aussi des armes discursives mobilisées dans des luttes de classement et d’accès aux ressources (Legrosse Citation1999, 241). Homɓe, Badiyaankooɓe (ceux de la badiyaa, i.e. de la brousse, avec une connotation négative) sont des termes emic dénotant le caractère étranger. Les egga-hoɗaɓe, pasteurs transhumants, étant aussi considérés comme tel. Jeyaamɓe ou Dugulemɓe sont des termes dénotant “l’autochtonie.”
3. Notre description est très schématique. Pour une description beaucoup plus complète, voir Barrière et Barrière (Citation2002, 32–33).
4. Selon Gallais (Citation1984, 205), dans les années 70 le “pouvoir politico-administratif” avait déjà commencé à rehabiliter le pouvoir des jowro’en en raison de leur capacité à assurer la paix sociale.
5. La politique de “mise en valeur” des terres a été encouragée par l’État via ses agences, comme avec l’Opération Riz Mopti (1972) puis l’Office riz de Mopti (1991), mais aussi par ses partenaires internationaux et par des investisseurs privés (Marie Citation2002; Brondeau Citation2013; Roy Citation2010; Adamczewski-Hertzog Citation2014).
6. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
7. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
8. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
9. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
10. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
11. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
12. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
13. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017. http://malijet.co/societe/face-aux-agressions-contre-la-communaute-peulh-letat-rappele-a-ses-obligations-regaliennes.
14. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
15. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
16. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
17. Voir Le Marcis (Citation2003) pour des tensions identiques entre lignages de statuts différents autour d’enjeux d’infrastructures de santé.
19. Pour les profils sociologiques des députés de la région de Mopti, nous avons colligé les données dans Parline Database, IDEA Database, ainsi que sur le site de RFI (http://www.rfi.fr/afrique/20131219-mali-presidentielle-ibk-cisse-resultats-2013); nous avons aussi confirmé nos informations via nos interlocuteurs sur le terrain.
20. Maiga opte pour la transcription “dioro,” plutôt que jowro.
21. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
22. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
23. Le “griot,” ou gawlo, est l’une des catégories faisant partie des “artisans” (ñeeñɓe).
24. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
25. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
26. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
27. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
28. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
29. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
30. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
31. Entretien réalisé à Tenenkou, novembre–décembre 2017.
Additional information
Notes on contributors
Cédric Jourde
Cédric Jourde est professeur agrégé à l’Université d’Ottawa. Spécialisé en politique comparée, ses recherches portent notamment sur les transformations politiques locales en lien avec les dynamiques religieuses, ethniques et statutaires en Afrique de l’Ouest.
Marie Brossier
Marie Brossier est professeure agrégée au Département de Science politique de l’Université Laval et Directrice du CIRAM (Centre interdisciplinaire de recherche sur l’Afrique et le Moyen-Orient). Ses recherches s’articulent autour de la sociologie des mouvements sociaux, la sociologie des institutions et de la politique comparée.
Modibo Ghaly Cissé
Modibo Ghaly Cissé est doctorant au African Studies Center de l’Université Leiden. Il est aussi chargé de recherche au sein du projet “Anthropologie de l’Eau” ainsi que du projet “Fulani-Project/Sahel-Mali.”