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Impact de l’exploitation minière artisanale de l’or sur la vie des femmes dans les foyers miniers artisanaux, en territoires de Bisengo et de Mosolo: stratégies en matière d’égalité entre les sexes

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Pages 57-77 | Published online: 05 Mar 2020
 

RÉSUMÉ

La présente étude est une compilation des études réalisées par IMPACT durant 5 ans soit de 2013 à 2017 dans les provinces de Bisengo et celle de Mosolo. Elle apporte un complément d’information sur les connaissances existantes ayant trait à la participation des femmes à l’économie minière dans une société patriarcale. L’usage du concept genre permet de mettre en évidence les inégalités femmes/hommes et la hiérarchisation des relations de pouvoir. Quand bien même certaines femmes s’investissent dans l’amélioration de leur moyen de subsistance, la situation des femmes se caractérise encore par une précarité féminine due aux stéréotypes socioculturels inféodant la femme et la jeune fille. Mais au-delà de ce mur de verre, les exigences de survie et l’ambition des certaines femmes ont poussé certaines femmes à transcender les normes sociales rétrogrades en vue de s’insérer et de se maintenir dans cette économie minière.

ABSTRACT

The present study is a compilation of studies conducted by IMPACT over 5 years from 2013 to 2017 in the provinces of Bisengo and Mosolo. It provides additional information on existing knowledge regarding women’s participation in the mining economy in a patriarchal society. The use of the concept of gender makes it possible to highlight inequalities between women and men and the hierarchy of power relations. Even though some women invest in improving their livelihoods, the situation of women is still characterised by women’s insecurity due to sociocultural stereotypes subordinating women and girls. But beyond this wall of glass, the demands of survival and the ambition of certain women have pushed some of them to transcend retrograde societal norms with a view to becoming part of and sustaining themselves in this mining economy.

Remerciements

Les auteur.e.s voudraient remercier le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), Affaires Mondiales Canada et IMPACT (anciennement Partenariat Afrique Canada ou PAC) pour avoir financé cette recherche. Les auteur.e.s voudraient également remercier les examinateurs externes pour leurs commentaires extrêmement utiles.

Déclaration

Aucun conflit d’intérêt potentiel n’a été rapporté par les auteur.e.s.

Notes

1. Foyers miniers est synonyme de sites miniers dans les territoires de l’étude.

2. Une “écurie” est un terme local utilisé pour nommer une équipe de creuseurs composée d’un certain nombre de personnes. L’écurie travaille sous la responsabilité d’une personne propriétaire d’un puits minier et/ou d’une personne qui préfinance l’activité minière.

3. Creuseur/creuseuse est souvent synonyme d’exploitante/exploitant minier dans le secteur minier artisanal en RDC. Creuseur/creuseuse peut aussi signifier la personne qui effectue la tâche de creuser dans un puits ou un tunnel. Cette tâche compte parmi celles les plus rémunérées et elle est majoritairement effectuée par les hommes.

4. La restructuration se comprend ici dans la mesure où l’économie minière est à prédominance masculine mais la crise économique, les femmes ont négocié leur entrée dans le secteur afin d’assurer la survie des ménages et de ce fait, elles deviennent de plus en plus autonomes vis-à-vis des hommes (maris).

5. Par site minier, nous attendons ce que le jargon vulgaire appelle carrière c’est-à-dire là où il y a un campement minier et des puits d’extraction minière.

6. Le concept capabilité développée par Amartya Sen renvoie aux possibilités qu’ont les individus à opérer délibérément des choix sociaux sans à subir une influence extérieure (Sen Citation2002).

7. Nous utilisons les pseudonymes des territoires où nous avons mené les enquêtes pour des raisons d’éthique.

8. Chef du bureau de l’administration territoriale, Chargée du bureau Genre, Chargé du bureau du Plan, les agents de SAEMAPE: Service d’Assistance et d’Encadrement de l’Exploitation Minière à Petite Echelle), et Direction centre de santé.

9. Membres des équipes de gestion et administration des sites miniers.

10. Ordonnance n°82-039 du 05 novembre 1982 portant libéralisation de l’exploitation, de la détention et du commerce des substances minérales précieuses).

11. Article 109 du code minier 2002 et 2018.

12. Seulement pour la zone de Bisengo.

13. Ceci concerne plus le territoire de Bisengo.

14. L’AFM répond de toutes les affaires du foyer minier. C’est lui qui paie toutes les redevances et taxes dues au foyer minier. Il est le manager principal du foyer minier. Il peut ne pas être présent en tout temps dans le foyer minier et se faire représenter par son héritier, fils ou fille.

15. Le PDG est le représentant de l’AFM. Il fait la politique de l’AFM et veille à ses intérêts. C’est lui qui perçoit les “montour” auprès des creuseurs et des commerçants, i.e. la part qui revient à l’AFM. Il centralise donc les finances du foyer minier au profit de l’AFM.

16. Le Directeur général gère au quotidien le foyer minier, avec l’aide du secrétaire administratif. Ils enregistrent les creuseurs, les fournisseurs ou commerçants, ils réglementent la vie dans le foyer minier. À eux se joint le Chef de camp qui joue le rôle du “maire” du camp. Il reçoit les nouveaux arrivants et les présentent à la Direction. Avec la mère chef, ils reçoivent les visiteurs au camp et les hébergent. Ils jouent aussi le rôle de juge dans le camp. La “mère chef” assiste le chef du camp dans l’administration du camp. Elle veille très particulièrement aux affaires des femmes dans le camp. C’est qui juge les problèmes des femmes dans le camp. Elle est secondée par des brigadiers femmes appelés “BDLETTE.”

17. La Mère Chef est sélectionnée parmi les femmes mariées, de bonne moralité, présente dans le camp, manifestant sa disponibilité de servir le comité de direction. Celle qui reçoit le plus grand nombre de voix est déclarée élue pour un mandat qui dépend de chaque site minier.

18. La Police des mines relève de la Police nationale, en collaboration avec le ministère des mines. Mais ici, il s’agit des pseudo-policiers. Ce sont les jeunes gens travaillant avec le propriétaire du site et qui surveillent les travaux dans les puits pour éviter la fuite avec la matière précieuse, notamment l’or.

19. Avec la nouvelle loi de 2018, seule une coopérative peut œuvrer dans une zone d’exploitation artisanale minière (articles 5, 17, 18, 110, et 111).

20. Le zolazola ou ndolotulu sont des pierres abandonnées par les creuseurs artisanaux et qui sont ramassées par les femmes. Ces pierres sont de fois abandonnées du fait de leur faible production.

21. Entretien avec un creuseur de Sikumbili rencontré dans une maison d’achat d’or à Sikumbili, le 14 mai 2015.

22. Rapports sexuels occasionnels sont ceux-là que les femmes et les homes entretiennent sans une forme d’union durable; c’est juste par circonstance après un verre de bière. Par contre le concubinage est un lien plus au moins durable entre deux personnes. C’est le prototype même des mariages des carrières (sites miniers); il s’agit d’union libre entre une femme et un homme qui, pour la plupart de temps se rencontrent dans les sites miniers et là ils décident de vivre ensemble. À ce moment, la direction de la carrière les reconnaît comme mari et femme.

23. Yaka to fanda se traduit par “viens et habitons ensemble” pour signifier une cohabitation entre un homme et une femme. Ce qu’on appelle aussi union libre. Un mariage non reconnu ni par les parents ni par l’État mais deux personnes acceptant de vivre ensemble en état de conjoint et peuvent avoir des enfants dans cette union.

24. Le mariage ici est à prendre dans le sens d’union libre.

25. Entretien avec une femme de Sikumbili le 17 mai 2015.

26. Comme on peut s’en rendre compte, il y a donc des mineures (14 à 17 ans: l’âge de mariage étant de 18 ans) parmi les femmes qui font la prostitution. Dans la zone de Sikumbili, on appelle leur site “djenama” enfer. Il y a donc là des mineures non accompagnées qui proviennent de Butemebo, Beni, Tembombaya et Nibe et qui ne font que la prostitution souvent encadrée par une femme commerçante. Elles viennent jeunes sans emploi ou occupation précise, rien que pour se prostituer ou combinent la prostitution et le petit commerce.

27. Motopompiste est une personne qui vide manuellement l’eau de pluie amassé dans les puits et porte de l’eau dans les bassins qui servent au lavement des minerais.

28. Entretien avec le chef de camp de Kasifa, le 14 mai 2017.

29. Propos recueillis lors de nos focus groupe avec les creuseurs dans les sites miniers à Kasafi, Umubembeleze, Tunafikaleo et Malimingi du 25 au 30 avril 2015. Cela est confirmé dans les deux autres sites de notre recherche.

30. Propos recueillis auprès des femmes de Umubembeleze lors de notre focus groupe et de nos entretiens individuels le 27 avril 2015.

31. Propos d’un creuseur à Bilashida, le 14 mai 2017.

32. Par puits minier, il faut attendre tout espace sollicité auprès de la direction minière par un creuseur ou une creuseuse pour y creuser l’or.

33. Un fournisseur ou une fournisseuse est toute personne, commerçante ou cultivateur, qui apporte ses produits manufacturés, alimentaires, la boisson, pour le vendre au chantier ou dans le village près des carriers miniers. Mais très précisément pour le cas des foyers miniers visites, par fournisseur, il faut attendre toute personne qui apporte ses moyens pour supporter les travaux lies au creusage d’un puits minier du début jusqu’ à l’extraction des pierres. Elle achète les matériels: bèche, pelle, bassin, etc.; elle achète aussi la nourriture pour les creuseurs qui travaillent pour elle.

34. Propos recueillis par entretien individuel avec une femme orpailleuse à Sikumbili, le 26 avril 2015.

35. Les femmes qui restent au village sont considérées comme des fainéantes par celles qui se rendent dans les carrés miniers ou foyers miniers et qui y gagnent quelque chose. Alors que celles qui restent au village ne savent pas accéder à un quelconque revenu d’elles même. Elles sont incapables de se débrouiller pour n’attendre que ce que leur apportent leurs maris ou conjoints. Elles ne sont donc pas prises en considération par les femmes qui vont dans des carrières.

36. Propos des creuseurs rencontrés au site de Umubembeleze.

37. Ces boissons proviennent de Singa (Bralima), de Nibe (Bracongo) et des liqueurs fabriqués à Ebale ou importés à partir de l’Ouganda communément appelé Soupu na tolo ou Zododo (fabrication libanaise, indienne). A ces qualités de boisson, il faut ajouter aussi l’alcool local connu sous le nom de Kanyanga ou Lotoko. C’est de l’arac fabriqué sur base de maïs et du manioc. Cette dernière boisson est plus vendue par les femmes locales.

38. Les femmes qui ont supporté des creuseurs sont alors dupées par ces derniers qui les fuient ou les abandonnent pour d’autres femmes.

39. Focus groupe réalisé dans le foyer minier Bilashida le 14 mars 2015.

Additional information

Notes on contributors

Bibiche Liliane Salumu Laumu Omeyaka

Bibiche Liliane Salumu Laumu Omeyaka est Politiste, chercheure et enseignante au Département de Sciences politiques et administratives, Faculté des Sciences Sociales, Administratives et Politiques de l'Université de Kisangani. Elle est également la coordonnatrice de l’ONG ARED œuvrant dans la sécurisation foncière et renforcement du leadership féminin dans les domaines politiques, économiques, sociales et culturels. En sa qualité  de spécialiste en genre, elle a réalisé sa thèse de doctorat sur l'Emergence des femmes dans l'ex Province Orientale à l'épreuve du plafond de verre. Les rapports de genre sous le prisme des dynamiques politico-institutionnelles et des logiques d'acteurs. Elle a participé comme consultante à des nombreuses rencontres et activités liées à la gestion durable des ressources naturelles, organisées par l’OCDE à Kinshasa et à Paris (gouvernance minière), par l’IIED au Yaoundé au Cameroun (gouvernance forestière) par GTDE à Kisangani (gouvernance foncière). En partenariat avec Carleton University et IMPACT, elle est associée comme chercheure dans la mise en œuvre du projet “Autonomisation économique des femmes minières dans le secteur artisanal en RDC.” Actuellement, elle est consultante genre au Tropenbos RDC.

Matthieu Mamiki Kebongobongo

Matthieu Mamiki Kebongobongo est chercheur et enseignant au Département de sciences politiques et administratives, Faculté des sciences sociales, administratives et Politiques de l’Université de Kisangani. Il s’intéresse à la sociologie des acteurs et partis politiques, aux mouvements sociaux, à l’anthropologie politique et à la gouvernance environnemental et gestion durable des ressources naturelles. Il est ainsi auteur et co-auteurs de plusieurs publications dans les domaines. Il a été consultant à Tropenbos RDC, à IMPACT et actuellement à la commission Justice et Paix de l’archidiocèse de Kisangani de la Province de la Tshopo, RDC.

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