RÉSUMÉ
Cet article s’intéresse aux transformations à l’œuvre dans le secteur de l’aide humanitaire du Canada dans le contexte de mutation de l’action internationale du pays. Partant d’une analyse quantitative des tendances caractérisant les interventions canadiennes, nous comparons ces pratiques à celles des autres bailleurs bilatéraux, cherchons à identifier les tendances principales et à en analyser les causes. Cette analyse montre l’importance croissante de l’aide humanitaire, l’augmentation du recours à l’aide alimentaire d’urgence, l’engagement dans les crises complexes et, plus fondamentalement, le manque de cohérence dans les actions du pays. Enfin, nous montrons la prédominance des facteurs politiques domestiques pour expliquer les tendances actuelles.
ABSTRACT
This article analyses the transformation of Canadian humanitarian assistance in the context of the country’s changing international behaviour. Drawing on a quantitative analysis of Canadian operations, the authors compare these practices with those of other bilateral donors, seeking to identify key trends and the main factors shaping them. They find a growth in humanitarian assistance, notably of emergency food aid, a strong commitment to act in complex emergencies, and, more fundamentally, a lack of coherence in state behaviour. Finally, they show how domestic factors account for these tendencies.
Financement
L’auteur tient à remercier le Fonds de recherche sur Québec – Société et culture pour son support financier [numéro de subvention 183516].
Les auteurs
Gabriel C. Goyette est doctorant en science politique à l’Université de Montréal. Il est également membre associé au Centre interdisciplinaire de recherche en développement international et société, chercheur associé à l’Observatoire canadien sur les crises et l’aide humanitaire et correspondant international pour le Canada de la revue Techniques financières et développement. Ses recherches portent sur les transformations du régime de l’aide contemporain, les déterminants domestiques et internationaux des politiques d’aide au développement et la responsabilité sociale des entreprises.
François Audet est Professeur à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal et Directeur scientifique de l’Observatoire canadien sur les crises et l’aide humanitaire. Avant d’entreprendre une carrière académique, il a cumulé plus de 15 années d’expérience dans le domaine de l’aide humanitaire.
Notes
1. Nous limitons nos analyses comparatives aux données de l’OCDE pour éviter tout biais induit par des définitions ou des méthodes statistiques différentes d’un pays à l’autre.
2. Voir tous les détails de cette conférence sur le site internet http://conferencehumanitaire.ca.
3. « En cas de crise, la principale mesure prise par le Canada consiste à fournir un soutien financier aux organisations qui font partie du système d’intervention humanitaire international. Ces organisations se fondent sur les besoins évalués et veillent à ce que les personnes touchées par les conflits ou les catastrophes soient en sécurité, reçoivent des soins de santé et aient des vivres, de l’eau et un abri » (MAECD Citation2015e).
4. Données pour le secteur « Aide d’urgence – Aide alimentaire d’urgence » extraites de la Banque de projets de développement international du MAECD en date du 13 février 2015.
5. Certains experts expliquent que l’augmentation des budgets des organisations confessionnelles est fondée sur des considérations d’idéologie du gouvernement (Audet, Paquet, et Bergeron Citation2013). Dans le cas spécifique de l’aide humanitaire, il s’agirait donc d’un double phénomène explicatif.
6. Cette catégorie regroupe les fonds décaissés par différentes branches du mouvement et non seulement par la Croix-Rouge canadienne.
7. Un projet exécuté par la Croix-Rouge canadienne dans lequel l’aide d’urgence représentait le double de l’aide à la reconstruction. Il est intéressant de constater que les tendances budgétaires générales sont reproduites au niveau du projet.
8. La divergence entre les engagements et les décaissements varie beaucoup. Si 2002 marque le plus important sous-décaissement (avec 201,97 millions prévus et non dépensés), le Canada a décaissé 72,26 millions en AH non budgétés en 2012. L’année où les engagements sont les plus conformes aux décaissements est 2003 avec seulement 3,63 millions de différence (OCDE Citation2014; calculs des auteurs).
9. Notons que ce type d’aide n’est pas compris dans la définition de l’aide humanitaire employée par l’OCDE.