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Acquisition de salinité et qualité des eaux d’une nappe profonde en Tunisie: approche statistique et géochimique

Assessment of salinity and water quality of a deep aquifer in Tunisia: statistical and geochemical approach

, , &
Pages 395-419 | Received 30 Mar 2012, Accepted 11 Jan 2013, Published online: 07 Feb 2014

Abstract

The multi-layered Jeffara de Gabes aquifer system is greatly influenced by tectonics. This system is limited at the base and laterally by evaporite layers and has lateral contacts with the sebkhas (salt flats). The groundwater in this aquifer is characterized by high salinity (3–10 g L-1). Multivariate statistical analysis and a geochemical approach were applied to determine the influence of the evaporite layers and sebkhas on the hydrochemical quality of the Jeffara de Gabes aquifer, and to understand the processes governing its salinity. According to these methods, and based in part on the Sr2+/Ca2+ ratio, it is demonstrated that the strong salinity of the groundwater is due to interactions between water and the evaporite layers that act as a substratum of this aquifer, as well as saltwater intrusion from the sebkhas. Moreover, the medium- to poor-quality groundwaters are characterized by geochemical interactions: cationic exchange and the precipitation/dissolution process of minerals in the aquifer formations.

Editeur Z.W. Kundzewicz

Citation Ben Alaya, M., Zemni, T., Mamou, A. et Zargouni, F., 2014. Acquisition de salinité et qualité des eaux d’une nappe profonde, Tunisie: approche statistique et géochimique. Hydrological Sciences Journal, 59 (2), 395–419.

Résumé

Le système aquifère multicouche de la Jeffara de Gabès est largement influencé par la tectonique. En outre, ce système est environné à la base et latéralement par des niveaux évaporitiques et bordé par des sebkhas. Les eaux de ce système sont caractérisées par une forte salinité (3–10 g L-1). Afin de démontrer l’influence des niveaux évaporitiques et des sebkhas sur la qualité hydrochimique des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès et comprendre les processus qui gouvernent sa salinité, un traitement statistique multivarié et des méthodes géochimiques ont été appliqués. En s’appuyant sur ces méthodes et en partie grâce au rapport Sr2+/Ca2+, ce travail a permis de démontrer que la forte salinité des eaux de cette nappe s’explique par une interaction entre ses eaux et les niveaux évaporitiques qui constituent le substratum de cette nappe et par l’intrusion d’eau salée à partir des sebkhas. Ces eaux de qualité médiocre à mauvaise sont caractérisées par des interactions géochimiques : échanges de bases et phénomènes de précipitations/dissolutions des minéraux des formations aquifères.

INTRODUCTION

L’acquisition de la charge saline des aquifères a fait l’objet de plusieurs travaux, dont certains montrent que la salinisation des eaux souterraines des systèmes aquifères côtiers est souvent due à l’intrusion marine, liée à une exploitation intensive de l’aquifère (Fakir et al. Citation2001, Fedrigoni et al. 2001, Jalal et al. Citation2001, Mennani et al. Citation2001, Pulido-Leboeuf et al. Citation2003, Trabelsi et al. Citation2005, El Yaouti et al. Citation2008, Kouzana et al. Citation2009). Cependant, dans certains cas, des phénomènes de dissolution ou d’altération d’évaporites et des carbonates ainsi que d’échange de base (Yermani et al. Citation2003, Bouri et al. Citation2007, Abid et al. Citation2009) ou le retour d’eau d’irrigation concentrée en surface par évaporation jouent également un rôle prépondérant dans cette salinisation. Aussi, la remobilisation d’eau marine piégée lors d’intrusions marines anciennes, parfois même contemporaines du dépôt des sédiments constituant l’aquifère jouent un rôle dans la salinisation des eaux. Des phénomènes comme l’évapotranspiration, la surexploitation (Boughriba et al. Citation2006), un long temps de résidence de l’eau dans l’aquifère (Bouchaou et al. Citation2008), influencent la variation de la qualité chimique des eaux des aquifères. Dans d’autres cas, la nature lithologique du substratum de l’aquifère ou les échanges hydrauliques à travers cette couche constituent une autre source de salinisation (Krimissa et al. Citation2004). Si cette liste comprend les sources de salinisation les plus fréquentes, elle n’est cependant pas exhaustive, comme en témoigne le cas présenté ici : celui du système aquifère multicouche de la Jeffara de Gabès en Tunisie, qui est bordée par des dépressions de type sebkha (Sabkhet El Hamma et Sabkhet El Melah-M’khacherma) et dont la dysharmonie tectonique a jouée un rôle très important dans sa structuration en horst et en graben. La tectonique a également joué un rôle essentiel d’une part dans l’agencement des formations aquifères et de leurs substratums de nature évaporitiques, et leurs communications d’autre part.

Les structures géologiques qui affectent la région de Gabès et ses alentours portent directement sur le cadre hydrogéologique régional et locale. A l’échelle régionale, la communication entre la nappe de la Jeffara de Gabès et la nappe du Continental Intercalaire (CI) logée dans les séries gréseuses du Crétacé inférieur est déjà prouvée dans la région d’El Hamma via la faille d’El Hamma de direction N160 (). Cette faille a engendré l’effondrement du bloc oriental mettant en contact des niveaux de forte perméabilité à l’Ouest avec des niveaux de moindre perméabilité à l’Est. Ce « seuil hydraulique » (Castany Citation1954) maintient à son amont une pression hydrostatique nettement plus élevée qu’en aval ().

Fig. 1 (a) Localisation géographique, (b) localisation des grands ensembles morphostructuraux, et (c) carte géologique de la partie septentrionale du bassin de la Jeffara (extraite des cartes géologiques d’El Hamma, Gabès, Oglet Mertba et Mereth à 1/100 000). 1 et 2: Ville, 3: Forage pétrolier, 4: Oued, 5: Sebkha, 6: Quaternaire, 7: Mio-Pliocène, 8: Sénonien supérieur, 9: Sénonien inférieur, 10: Turonien, 11: Cénomanien-Turonien basal, 12: Apto-Albien, 13: Crétacé inférieur, 14: Faille certaine, 15: Faille géophysique, et 16: Trait de coupe.

Fig. 1 (a) Localisation géographique, (b) localisation des grands ensembles morphostructuraux, et (c) carte géologique de la partie septentrionale du bassin de la Jeffara (extraite des cartes géologiques d’El Hamma, Gabès, Oglet Mertba et Mereth à 1/100 000). 1 et 2: Ville, 3: Forage pétrolier, 4: Oued, 5: Sebkha, 6: Quaternaire, 7: Mio-Pliocène, 8: Sénonien supérieur, 9: Sénonien inférieur, 10: Turonien, 11: Cénomanien-Turonien basal, 12: Apto-Albien, 13: Crétacé inférieur, 14: Faille certaine, 15: Faille géophysique, et 16: Trait de coupe.

Fig. 2 Coupes hydrogéologiques synthétiques (a) A–A′, (b) B–B′ et (c) C–C′ à travers la partie septentrionale du bassin de la Jeffara entre El Hamma et Gabès.

Fig. 2 Coupes hydrogéologiques synthétiques (a) A–A′, (b) B–B′ et (c) C–C′ à travers la partie septentrionale du bassin de la Jeffara entre El Hamma et Gabès.

En surface, ce seuil est matérialisé par l’alignement des sources de l’Oued El Hamma, dont la température est d’environ 50°C. Depuis quelques années, l’exploitation de la nappe de la Jeffara à l’Est de la faille d’El Hamma a conduit à une baisse de la piézométrie entraînant l’extinction de l’artésianisme sur la plus grande partie de la nappe de la Jeffara et le tarissement généralisé des sources au niveau de la partie septentrionale de la Jeffara ().

Fig. 3 Evolution des parts respectives de l’exploitation par pompage et de l’écoulement naturel (forages artésiens + sources) dans le système aquifère de Gabès Nord et ses alentours.

Fig. 3 Evolution des parts respectives de l’exploitation par pompage et de l’écoulement naturel (forages artésiens + sources) dans le système aquifère de Gabès Nord et ses alentours.

A l’échelle locale, les différents blocs tectoniques (horsts et grabens) sont interconnectés par des formations perméables. Ces dernières, sont juxtaposées ou environnées au toit et à la base par des niveaux imperméables de nature évaporitique comme ceux du Sénonien basal, du Cénomanien et du Crétacé inférieur Cette structuration géologique complexe et l’interaction eaux–niveaux–évaporitiques–sebkhas peuvent expliquer l’origine de salinisation des aquifères de la nappe de la Jeffara. Il a été remarqué que les eaux fortement chargées (4–10 g L-1) et qui présentent des teneurs très élevées en éléments chimiques caractéristiques des évaporites sont observées dans les forages qui jouxtent les sebkhas et dans la bordure Nord du bassin qui est largement affectée par la tectonique,

La situation dynamique transitoire et la complexité structurale de ce réservoir rendent difficile la compréhension du fonctionnement du système aquifère de la Jeffara de Gabès Nord et ses alentours par les seuls moyens de l’hydrogéologie « classique ». La composition chimique des eaux des forages constitue souvent une mémoire des formations géologiques profondes. En effet, au contact de l’encaissant, l’eau acquiert une charge minérale caractéristique des roches traversées. Ainsi, l’utilisation des traceurs naturels chimiques constitue à la fois un moyen d’investigation indirect précieux et une alternative pour mieux appréhender la dynamique des systèmes aquifères complexes. De plus, il est intéressant de tester la pertinence de ces méthodes de traçage naturel dans ce type de situation complexe où les connexions multiples ainsi que les interactions possibles et nombreuses entre divers facteurs en présence peuvent conduire à des mélanges difficiles à décrypter. En fait, l’eau souterraine, par sa circulation perpétuelle à travers les vides de la roche et par ses propriétés chimiques, joue un rôle véhiculaire des éléments dissous. Une étude statistique multivariée et géochimique faisant appel aux éléments majeurs, au strontium et au rapport Sr2+/Ca2+en particulier, a été entreprise afin de déterminer l’origine et les processus de minéralisation des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès d’une part, et la contribution des niveaux évaporitiques dans la dégradation de la qualité de ses ressources d’autre part.

CADRE GENERAL

La partie septentrionale du bassin de la Jeffara est située au Sud-est de la Tunisie ((a)). Elle est limitée au Nord par Djebel Zemlet El Beïdha, à l’Ouest par la faille d’El Hamma, au Sud par les affleurements calcaires entre El Hamma et Gabès et à l’Est par la Mer méditerranée ((c)). Cette partie du bassin de la Jeffara couvre approximativement une superficie de 10000 km2 occupée par des dépressions fermées de type sebkha.

Le climat qui règne dans ce bassin est de type aride à semi-aride avec des tendances sahariennes marquées par des précipitations faibles et irrégulières, avec une moyenne annuelle qui ne dépasse guère les 180 mm an-1. Les températures sont modérées avec des moyennes mensuelles comprises entre 12 et 28°C et une moyenne annuelle de 20°C (AIM Consulting Citation2004). L’évaporation annuelle est intense (ETP Thornthwaite : >2128 mm).

Le réseau hydrographique est peu dense. Il est constitué essentiellement par des cours d’eau non pérennes (oueds) qui collectent l’eau de ruissellement pendant les rares évènements pluvieux à partir des reliefs limitrophes de la zone d’étude. En effet, ces reliefs jouent le rôle d’écran qui favorisent le ruissellement des eaux pluviales vers les dépressions endoréiques de type sebkha (Sabkhet El Hamma) et les dépressions exoréiques (Sabkhet El Melah-M’khacherma et Rkhia), qui sont drainées vers la Mer méditerranée (Golfe de Gabès).

CADRE GEOLOGIQUE

La partie septentrionale du bassin de la Jeffara est bordée par des reliefs dont les formations affleurantes datent du Crétacé inférieur au Quaternaire, avec toutefois une lacune des dépôts néogènes (Eocène et Oligocène) dans la partie Sud et Nord du bassin (SEREPT Citation1950, Abdeljaoued Citation1983, Ben Ouezdou et al. Citation1984, Citation1986, Abbés et al. Citation1986, Bouaziz Citation1995). Le Crétacé inférieur regroupe les grès, les argiles, les gypses et les sables du Barrémien et les calcaires dolomitiques de l’Albo-Aptien. Le Crétacé supérieur se compose essentiellement de calcaires dolomitiques karstifiés et de dépôts marno-gypseux du Sénonien inférieur, calcaires fissurés et karstifiés du Turonien, de dépôts marno-gypseux et calcaires lumachelliques du Cénomanien. Le Mio-Pliocène est représenté par des dépôts continentaux : sables grossiers, sables fins, argiles sableuses, argiles et conglomérats. Le Quaternaire se compose essentiellement de dépôts détritiques continentaux allant de sables plus ou moins grossiers à des argiles avec parfois de minces intercalations de gypses et de conglomérats.

Le contexte géologique de la partie septentrionale du bassin de la Jeffara est influencé par la tectonique, l’importance de cette dernière se manifeste par l’individualisation au cours des temps géologiques de grandes unités structurales, principalement les derniers plis atlasiques de direction Sud-ouest–Nord-est, l’anticlinal de Zemlet El Beïda au Nord et la mégastructure anticlinale de Chott El Fejej à l’Ouest, la plate-forme saharienne au Sud et la plaine côtière effondrée à l’Est ((b)). Cette dernière est affectée par un système de failles de direction N70, orthogonal à l’accident majeur d’El Hamma de direction N160, donnant ainsi le découpage structural en horst et en graben dont les plus importants sont les suivants ((c)) :

  • le graben d’El Meïda–Sabkhet El Hamma, situé au Sud de l’anticlinal de Zemlet El Beïha ;

  • le horst d’El Hmmeïmet où affleurent les séries du Crétacé inférieur, supérieur et du Néogène ;

  • le graben de Ouedref–El Métouia, occupé par des dépressions exoréiques, d’Ouest en Est les sebkhas de El Melah-M’khacherma et de Rkhaia ;

  • le horst de Chennchou–Ed Dissa, lui-même morcelé en plusieurs panneaux par des failles N160 dont le graben de Chennchou ; et

  • le graben de Gabès, qui s’étend du horst El Hmmeïmet au Nord jusqu’au horst Teboulbou au Sud. Le cœur de cette structure est occupé par les calcaires du Sénonien inférieur et les sables du Miocène, scellés par les dépôts mio-plio-quatenaires.

CADRE HYDROGEOLOGIQUE

Les nombreuses études hydrogéologiques et géophysiques, qui ont été entreprises dans la partie septentrionale du bassin de la Jeffara (Rouatbi Citation1967, UNESCO Citation1972, M’krazi Citation1975, PNUD Citation1984, Ben Baccar Citation1985, Mamou Citation1990, M’Hamdi et al. Citation2006), ont été déterminantes pour mieux décrire les différents niveaux aquifères potentiels de la nappe de la Jeffara de Gabès. Ces études révèlent l’existence d’au moins trois niveaux aquifères potentiels dont les plus importants sont les calcaires dolomitiques du Turonien et du Sénonien inférieur et les sables du Miocène. Ces aquifères sont reconnus par forages dans la partie septentrionale de la Jeffara et leur importance est liée à plusieurs facteurs tels que l’extension latérale, l’épaisseur, la nature de dépôts et l’importance de la karstification des formations calcaires dolomitiques ainsi que les affleurements en bordure du bassin. Ce bassin contient un système multicouche où se superposent plusieurs niveaux aquifères, dont les plus importants sont, du plus récent au plus ancien, les suivants :

  • L’aquifère du Miocène : capté aux alentours de Ghannouch, Métouia, Ouedref, Oued El Melah et plus au Nord encore à l’Oued El Akarit. Il s’agit de sables grossiers à fins qui affleurent au niveau du horst d’El Hmmeïmet, issus du remaniement sur place des niveaux gréseux du Crétacé inférieur suite à l’érosion post-crétacée (Bouaziz Citation1995, Benton et al. Citation2000). Ces sables sont en majeure partie scellées par les dépôts plio-quaternaires et constituent le deuxième niveau aquifère de la nappe de la Jeffara. Les transmissivités du réservoir aquifère sableux miocène sont comprises entre 10-3 et 3 × 10-2 m2 s-1 et les débits spécifiques varient de 0,16 à 7,9 L s-1 m-1 (Mamou Citation1990).

  • L’aquifère du Sénonien inférieur avec son faciès carbonaté constitue le niveau le plus exploité dans la région avec une épaisseur moyenne d’environ 100 m. Cet aquifère est capté au niveau d’El Hamma, Chennchou et dans la plaine côtière entre l’Oued El Melah et Gabès. Actuellement, ces calcaires sont reconnus comme aquifères à potentialité limitée au niveau du graben Ouedref–El Métouia (Ben Alaya Citation2004). Ailleurs, ils sont fortement diaclasés vu les pertes totales enregistrées au cours de la réalisation des forages. Ainsi, ces calcaires permettent par endroits d’excellents débits spécifiques pouvant atteindre 198Ls-1 m-1. Leurs transmissivités varient entre 9 × 10-3 et 10 × 10-3 m2 s-1 au niveau d’El Hamma, 2 × 10-3 à 10-1 m2 s-1 à Chennchou, 0,02 × 10-3 à 0,03 × 10-3 m2 s-1 au graben Ouedref–El Métouia et 2 × 10-2 à 6 × 10-1 m2 s-1 à Gabès Nord. Les débits spécifiques de l’aquifère calcaire de la nappe de la Jeffara sont hétérogènes. Au niveau d’El Hamma, ils sont compris entre 0,5 et 37 L s-1m-1, à Chennchou de 5 à 72 L s-1 m-1, au graben Ouedref–El Métouia de 0,048 à 0,08 L s-1 m-1 et à Gabès Nord de 0,5 à 198 L s-1 m-1.

  • L’aquifère du Turonien à dominance carbonatée est capté par quelques forages au niveau du graben d’El Hamma à une profondeur qui varie de 350 à 600 m (Forage N°IRH : 19848/5 et 20016/5, voir emplacement sur la (a)). Ces calcaires dolomitiques ont une épaisseur moyenne de l’ordre de 50 m. La transmissivité de ce niveau aquifère est de l’ordre de 10-1 m2 s-1 (Rouatbi Citation1967).

Les coupes A–A′, B–B′ et C–C′ () montrent une structuration en horsts et en grabens des aquifères de la nappe de la Jeffara et leur agencement avec les substratums de nature évaporitique entre la bordure Nord et Sud du bassin. Les formations aquifères du Crétacé supérieur (Turonien et Coniacien-Santonien) et du Miocène se caractérisent par une variation latérale de leur épaisseur. On observe également des accidents tectoniques qui présentent des rejets différentiels permettant la juxtaposition d’horizons aquifères différents ayant, sur le plan hydrogéologique, un agio dans la communication latérale des aquifères et l’agencement de la circulation des eaux souterraines ((a), (b) et (c)).

La coupe B–B′ ((c)) révèle le dispositif suivant : l’individualisation de l’anticlinal de Zemlet el Beïdha au Nord qui correspond à une remontée importante des séries argilo-gréseuses et évaporitiques du Crétacé inférieur. Elle est séparée du horst d’El Hmmeïmet par le graben d’El Meïda. Le horst d’El Hmmeïmet est formé essentiellement par la même série du Crétacé inférieur sur laquelle reposent en discordance les calcaires du Sénonien inférieur, les sables grossiers du Miocène et les argiles sableux du Mio-Pliocène. Il s’agit d’une zone d’alimentation des différentes formations aquifères. Au-delà du horst d’El Hmmeïmet, des failles normales de direction Est–Ouest à regard vers le Sud et le Nord, engendrent des basculements de blocs soit vers le Nord, soit vers le Sud, par lesquels s’est formé le graben Ouedref–El Métouia. Cette coupe montre également l’extension de l’aquifère calcaire du Sénonien inférieur vers le graben Ouedref–El Métouia. Ce graben englobe Sabkhet El Melah-El M’khacherma.

Vers l’Est, en direction de Koudiat El Hmmeïmet, et vers le Nord, le jeu de failles normales a été marqué par un soulèvement, sous forme de horst, des séries argilo-gypseuses du Crétacé inférieur, provoquant la disparition de toute série géologique se trouvant au-dessous du Miocène ((c)).

Au niveau de la plaine côtière, en absence d’un toit imperméable, les dépôts sableux du Miocène sont discordants sur les calcaires du Sénonien inférieur ((c)). En effet, les paramètres hydrodynamiques des terrains miocènes et sénoniens inférieurs sont parfois du même ordre de grandeur. Ceci confirme le relais hydrogéologiques entre les calcaires et les sables, ils forment ainsi, un aquifère mixte.

Le seuil hydraulique d’El Hamma constitue à la fois l’exutoire naturel de la nappe du CI à travers les sources de l’Oued El Hamma, et l’alimentation souterraine qui transite vers la nappe de la Jeffara. En effet, le seuil d’El Hamma induit une dénivelée piézométrique de plus de 50 m. Cette dénivelée s’explique par la configuration géologique du seuil d’El Hamma permettant à l’eau du CI de remonter le long des accidents tectoniques successifs ((a)), pour se déverser dans les différentes formations aquifères de la Jeffara. La pression au niveau du seuil est appelée à baisser en fonction du temps, vu la forte exploitation de la nappe du CI pratiquée en amont (bassin du Grand Erg Oriental en Algérie et en Tunisie), et celle de la Jeffara à travers toute la plaine côtière.

L’effet du seuil hydraulique formé par la faille d’El Hamma est reflété par la différence d’altitude du niveau piézométrique de la nappe du CI de part et d’autre de cette faille. En amont de la faille, le forage CF3bis (N°IRH : 5664) a un niveau piézométrique de l’ordre de 85 m. De l’autre côté de la faille, le forage d’El Hamma Sud CI (N°IRH : 20654/5) montre un niveau piézométrique de 52,5 m ((a)). Les forages situés tout juste en aval de la faille d’El Hamma et captant la nappe de la Jeffara, affichent une piézométrie variant entre 45 et 50 m (). Ainsi, la perte de charge induite entre les deux nappes par le seuil hydraulique est de l’ordre de 37,5 m.

Fig. 4 Carte piézométrique de la nappe de la Jeffara, Janvier 2008.

Fig. 4 Carte piézométrique de la nappe de la Jeffara, Janvier 2008.

Le sens d’écoulement de la nappe de Jeffara est de direction moyenne Ouest–Est, convergeant vers la Mer méditerranée, le niveau piézométrique varie de 50 à 10 m (). L’alimentation de cette nappe est en majeure partie d’origine profonde à partir du CI. En effet, cette nappe reçoit l’essentiel de sa recharge à travers la faille d’El Hamma et les failles affectant le graben de Chennchou à l’Ouest. Vers l’Est, à l’aval de Koudiat El Hmmeïmet, la divergence des isopièzes 15, 20 et 25 suggèrent une alimentation de la nappe du Miocène par les eaux météoriques s’infiltrant à travers les dépôts mio-plio-quaternaires.

Il est à remarquer la présence d’un dôme piézométrique au niveau J. Dissa, induit par le rôle de cette structure en horst comme aire privilégiée de recharge de la nappe de la Jeffara. Au Sud-est, l’inflexion des isopièzes 35, 30, 25 et 20 suggère une alimentation de la nappe de la Jeffara par les eaux météoriques s’infiltrant à travers les affleurements calcaires (au niveau de J. Monncef et J. Sidi Saleh). Vers le Sud, au niveau du horst Teboulbou, l’inflexion de l’isopièze 20 suggère une alimentation de l’aquifère calcaire du Sénonien inférieur par les eaux météorique s’infiltrant à travers la faible couverture du Plio-Quaternaire.

Le secteur situé en face des reliefs limitrophes de la plaine côtière, en pleine mer, peut constituer l’exutoire de cette nappe : le terrain naturel présente dans cette zone une altitude moyenne de 5 m inférieure à celle de la surface piézométrique (10 à 20 m). En effet, le forage pétrolier Gabès 1 (GA-1), implanté en plein mer, a montré l’extension des niveaux aquifère de la nappe de Jeffara vers l’Est. Ces niveaux aquifères sont surmontés par des niveaux perméables et karstifiés vu les pertes totales enregistrées au cours de la réalisation de ce forage. Ainsi, ces niveaux sus-jacents des aquifères de la nappe de la Jeffara sont susceptibles de constituer des exutoires de cette nappe.

METHODOLOGIE

La montre la répartition des points d’eaux de la nappe de la Jeffara dans la région de Gabès Nord et ses alentours échantillonnés au mois de Janvier 2008. Les mesures et prélèvements ont été faits, dans la mesure du possible, à la sortie des ouvrages en fonctionnement et un renouvellement suffisant de la colonne d’eau des forages a été respecté. En effet, avant chaque prélèvement, l’eau des forages a été renouvelée par pompage. Pour chaque forage, le volume pompé pour assurer le renouvellement de l’eau a été de deux à trois fois le volume de la colonne d’eau du forage. En parallèle, un suivi régulier de la conductivité a permis de vérifier l’obtention d’un régime permanent. Pour la totalité des échantillons, l’eau prélevée est brute et n’a pas subi de traitement. A chaque point, nous avons prélevé, deux flacons en polyéthylène de 1 L d’eau, préalablement rincés et filtrés sur une membrane de 0,45 μm. Un des flacons permet le dosage des anions et l’autre, par ajout de trois gouttes de HNO3 concentré, permet le dosage des cations. Les flacons sont remplis de façon à laisser le moins d’air possible afin d’éviter d’une part d’éventuelles contaminations et, d’autre part, l’évolution des échantillons au cours du temps. Du terrain au laboratoire les échantillons ont été transportés dans des glacières. Au laboratoire, ces prélèvements ont été réfrigérés afin de limiter l’évolution chimique des eaux. Les variables physico-chimiques non conservatives, température, conductivité électrique et pH, ont été mesurées sur le terrain à la température de référence de 25°C.

Fig. 5 Carte de localisation des points d’eaux échantillonnés.

Fig. 5 Carte de localisation des points d’eaux échantillonnés.

Les analyses chimiques des éléments majeurs et du strontium, pour 54 échantillons sélectionnés ont été effectuées au laboratoire du Groupe Chimique Tunisien (GCT). Les analyses chimiques des éléments majeurs ont été réalisées par différentes méthodes (gravimétrie, titrimétrie et spectrométrie à flamme), le strontium a été dosé par ICP-OES. L’erreur sur la balance ionique reste acceptable (E < 5%) pour l’ensemble des points analysés ().

Tableau 1 Données physico-chimiques des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès.

Les résultats d’analyses seront utilisés dans l’évaluation de la qualité physico-chimique des eaux souterraines étudiées. L’analyse des données géochimiques en vue de déterminer les processus et les sources de la minéralisation des eaux souterraines de la nappe de la Jeffara est basée en partie sur les techniques statistiques (Melloul et Collin Citation1992, Morell et al. Citation1996, Cerón et al. Citation1999, Güler et al. Citation2002, Hamzaoui et al. Citation2011).

L’analyse statistique des données obtenues a été effectuée avec le logiciel STATISTICA 7.1 (StatSoft1). Il s’agit dans notre cas de l’analyse en composantes principales (ACP), de l’analyse factorielle des correspondances (AFC) et de la classification ascendante hiérarchique (CAH).

L’ACP est une technique mathématique permettant de réduire le nombre de variables afin de projeter le nuage de points dans un sous-espace bidimensionnel engendré par des couples d’axes factoriels (St-Hillaire et al. Citation2004). La première étape consiste à calculer les coefficients de corrélation entre les variables. Par la suite, les axes de projection sont assimilés aux vecteurs propres de la matrice de corrélation (Yidana et al. Citation2008). On cherche d’abord l’axe qui permet de voir les individus, c’est-à-dire pour lequel la variance des individus est maximale, puis une deuxième composante principale qui fournit la plus grande information possible, complémentaire à la première (Hamzaoui-Azaza et al. Citation2010). Le processus se déroule jusqu’à l’obtention de la dernière composante principale. Le choix du nombre de composantes est exprimé en fonction des « valeurs propres » ou « les pourcentages de variation expliqués par chaque composante principale ».

L’AFC est une méthode permettant de distinguer des groupes et de tester l’appartenance d’un individu à un groupe, en fonction des valeurs prises par plusieurs variables. Afin de distinguer des groupes choisis, l’AFC consiste à minimiser la variance intra-groupe et à maximiser la variance intergroupe. Dans notre cas, les variables explicatives des groupes sont les variables utilisées précédemment pour l’ACP.

La classification ascendante hiérarchique (CAH) permet produire autant de classes qu’il y a d’entités (échantillons) dans une base de données (De Andrade et al. Citation2008). L’objectif de cette méthode est de définir un critère d’agrégation des classes, qui peut être défini par la mesure du degré de ressemblances ou de dissemblance existant entre les échantillons (El Yaouti et al. Citation2008). Il existe plusieurs mesures pour estimer le degré de ressemblance entre les échantillons dont la plus utilisée est celle de la distance euclidienne. Celle-ci indique la plus courte distance géométrique entre deux points d’un espace (Cloutier et al. Citation2008).

En effet, cette méthode produit une suite de partitions emboitées de la totalité des individus à ranger. Les partitions sont représentées par un arbre de classification ou « dendrogramme ». Le nombre de classes obtenus dépend du niveau de la coupure de l’arbre choisie « phenon line ». Les critères d’agrégation, après le calcul des distances, sont utilisés pour la détermination des classes d’échantillons (Templ et al. Citation2008, Yidana et al. 2008). Cette ressemblance se fait suivant le critère de Ward (Citation1963), qui donne de meilleurs résultats que d’autres méthodes.

Ces deux méthodes d’analyse statistiques multivariées utilisées dans ce travail ont nécessité une standardisation des données, afin d’inclure, dans une même classification, des variables internes mesurées à l’aide d’échelles non comparables (Venugopal et al. Citation2008). De ce fait peu importe l’unité de chaque variable mesurée, chacune aura un poids équivalent dans la classification. La valeur standardisée est noté Zij (Medina-Gomez et Herrara Silveira Citation2003) :

(1)

Xij est la valeur réelle de la variable, Xm est la valeur moyenne de la variable réelle et σi est son écart-type

L’analyse statistique seule ne permet cependant pas de mettre en évidence les processus et les sources de la minéralisation. Ainsi, nous avons utilisé le diagramme de Piper pour la distinction des faciès chimiques, les diagrammes binaires, les rapports ioniques et principalement le rapport Sr2+/Ca2+, afin de compléter notre étude et de croiser les informations fournies par ces différentes méthodes. Le programme WateqF (Plummer et al. Citation1976) a été utilisé pour le calcul des indices de saturation à partir des activités ioniques. La qualité des eaux pour l’approvisionnement en eau potable est comparée aux normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS Citation2004) alors que, la détermination de la qualité des eaux pour l’irrigation est basée sur les normes Riverside (Richards Citation1954).

RESULTATS ET DISCUSSION

Salinité et faciès chimique

La carte de répartition spatiale de la salinité, exprimée en termes de résidu sec (g L-1, ), montre une similitude assez étroite avec l’allure de la carte piézométrique de la nappe. Elle traduit une évolution de la minéralisation des eaux de la nappe depuis l’amont vers l’aval. Cette minéralisation présente des valeurs comprises entre 3 et 10 g L-1. On distingue ainsi cinq zones de salinité :

Fig. 6 Carte de salinité de la nappe de Jeffara de Gabès.

Fig. 6 Carte de salinité de la nappe de Jeffara de Gabès.

Le secteur d’El Hamma

Le secteur d’El Hamma se caractérise par une salinité croissante de l’Oued El Hamma vers l’aval, passant de 3 à 4,5gL-1. La salinité relativement modérée dans la partie médiane du bassin versant de l’Oued El Hamma par rapport à l’amont, est due à une contribution des eaux de la nappe du Continental Intercalaire 2 (0,76 à 3,6gL-1) à l’alimentation de l’aquifère des calcaires du Sénonien inférieur, à travers le seuil hydraulique d’El Hamma. En effet, des analyses isotopiques antérieures ont souligné de faibles activités en 14C et des teneurs appauvries en isotopes stables (18O et 2H) similaires à celles des eaux du CI au niveau du Chott El Fejej (UNESCO Citation1972, M’krazi Citation1975, Mamou Citation1990, Trabelsi et al. Citation2009, Citation2011).

Le secteur des alentours de Sabkhet El Hamma

L’accroissement de la salinité de l’eau de la nappe à proximité de Sabkhet El Hamma, peut être expliqué par une infiltration des eaux de sebkha et de la nappe phréatique (RS : 3,1 à 6,1 g L-1, Ben Alaya Citation2004) à travers le toit peu épais de la nappe. Il est fort probable que les forts prélèvements en eau pour l’alimentation et l’irrigation dans cette zone, aient contribué à l’appel de l’eau de surface salée et à la détérioration de la salinité de la nappe (Forage 11 : RS : 4,2 g L-1, Cl : 1394 mg L-1, SO42- : 1270 mg L-1). Ceci n’exclut pas non plus la contamination des eaux des calcaires du Sénonien inférieur par celles des argiles gypseuses du Crétacé inférieur bordant le côté oriental du graben d’El Hamma. Ces argiles gypseuses sont en contact avec l’aquifère calcaire du Sénonien inférieur par faille normale.

Le secteur de Sabkhet El Melah-M’khacherma

Le secteur de Sabkhet El Melah-M’khacherma présente les valeurs de salinité les plus fortes qui s’échelonnent entre 4 et 10 g L-1. Les premiers indices évidents de salinisations constatés dans les forages qui captent l’aquifère calcaire du Sénonien inférieur au niveau de graben Ouedref–El Métouia (en particulier PP7, RS = 10,1 g L-1) proviendraient donc de Sabkhet El Melah-M’Kkhacherma voisin, à eau saumâtre, voire salée. Le forage (PP7, emplacement sur la coupe B–B′ ((b)) est situé à proximité de Sabkhet El Melah-M’khacherma, qui capte les calcaires fracturés du Sénonien inférieur vu les pertes totales enregistrées au cours de la réalisation de ce forage. L’augmentation de la salinité dans ce forage est expliquée par la karstification de l’aquifère qui facilite l’écoulement des eaux très salées sous les sebkhas vers ce forage. Cette intrusion, bien que déjà perceptible n’est pas encore très avancée, malgré les pompages intensifs dans les champs de captage au niveau de la plaine de Chennchou et à l’Est au niveau de l’Oasis de Ouedref et Oued El Melah. Il s’agit là d’un état transitoire ou d’une situation d’équilibre correspondant au niveau actuel de pompage. En outre, les forages réalisés pour la prospection pétrolière (Cfa et ZB1 ; SEREPT Citation1950) au Nord et le forage hydraulique Draâ Ouedref (DO ; DGRE) à l’Est de ce secteur, ont traversé les séries du Crétacé inférieur de nature argilo-gréseuses avec des passées de gypse, et les eaux de la nappe du CI y sont fortement minéralisées (7,5 à 13 g L-1, M’ krazi Citation1975). Les séries du Crétacé inférieur de cette zone sont considérées comme des aquifères médiocres à l’Est du seuil hydraulique d’El Hamma (Mamou Citation1990).

Dans ce secteur, les valeurs élevées de salinité de la nappe de la Jeffara semblent être dues à une communication avec les eaux très chargées des sebkhas (Sabkhet El Hamma et Sabkhet El Melah-M’khacherma) d’une part, et à une remontée d’eau très minéralisée piégée dans les séries du Crétacé inférieur à la faveur des accidents tectoniques bordant le graben d’Ouedref–Métouia d’autre part. Ceci est corroboré par les teneurs élevées en Na+, Cl- et SO42- dans les forages 18, 19, 20 et 21 (). D’autre part, des teneurs appauvries en isotopes stables 18O (–7,3 à –8,5‰ vs SMOW) caractérisent les eaux de la nappe à proximité du horst de Koudiat El Hmmeïmet où le contact avec l’eau des grès du Crétacé inférieur a été mis en évidence (Mamou Citation1990).

Le secteur d’Ouedref–Métouia-Gabès

Vers l’Est, aux alentours d’Ouedref–Métouia, la nappe de la Jeffara est largement influencée par l’effet d’alimentation mixte à partir des eaux pluviales traversant les affleurements sableux du Miocène et des eaux de la nappe du CI. La part d’infiltration dans cette alimentation, est relativement faible devant l’apport du CI. En effet, même s’il y a un adoucissement des salinités des eaux de la nappe de la Jeffara, le cachet isotopique de ses eaux reste dominé par le paléo-recharge à partir du CI, ce qui explique l’augmentation du temps de résidence.

Dans les alentours de Gabès, et le long de la frange côtière, les valeurs de la salinité de l’eau de la Jeffara varient de 2,8 à 3 g L-1. Ceci peut s’interpréter comme un apport local en eau douce caractérisant l’aquifère calcaire du Sénonien inférieur à travers ses affleurements dans le bassin versant de l’Oued Gabès. En plus, dans ce secteur, la forte karstification des calcaires du Sénonien inférieur est de nature à favoriser la bonne circulation des eaux souterraines et par conséquent une légère variation de leur salinité dans le sens de l’écoulement.

L’anomalie de salinité localisée à proximité d’Oued Melah, semble être l’effet résultant de l’exploitation intensive de l’aquifère sableux du Miocène dans une zone où son toit est semi-perméable et où la salinité de la nappe phréatique est souvent supérieure à 7 g L-1 (Abidi Citation2004). C’est donc un effet de drainance descendante qui se manifeste à ce niveau.

Le secteur Koudiat El Meïda

Dans le secteur d’El Meïda, la nappe de la Jeffara est drainée par l’Oued El Akarit à travers une ligne de sources. Les valeurs de salinité diminuent dans le sens de l’écoulement de la nappe de 5,5 g L-1 à l’amont à 3,5 g L-1 vers l’aval. Ceci s’explique par un apport local d’eau douce à l’aquifère sableux du Miocène, en provenance des affleurements sableux du Miocène et argilo-sableux du Mio-Pliocène situés au niveau du horst de Koudiat El Hmmeïmet. Ceci est conforté par une teneur en carbone-14 plus forte dans les eaux de quelques forages à proximité de Koudiat El Hmmeïmet (Trabelsi et al. Citation2009, Citation2011).

La représentation des concentrations en éléments majeurs des eaux de la région sur le diagramme de Piper (Piper Citation1944) montre que les faciès chimiques des eaux évoluent du faciès hydrochimique Na-Ca-SO4-Cl au Ca-Na-SO4-Cl pour les eaux les moins chargées et au faciès hydrochimique Na-Ca-Cl-SO4 au Na-Cl pour les eaux les plus chargées ().

Fig. 7 Diagramme de Piper des eaux souterraines de la Jeffara de Gabès.

Fig. 7 Diagramme de Piper des eaux souterraines de la Jeffara de Gabès.

Dans le diagramme des anions, les points sont alignés sur la bordure Cl-SO4 et loin des pôles chlore et sulfate. Les pourcentages des anions de tous les points varient dans les intervalles suivants : 33,9% < Cl- < 67,28%, 31,6% < SO42- < 60,62%, 1,53% < HCO3- <5,97%. De cela on déduit la classification dans l’ordre décroissant suivant : Cl-, SO42-, HCO3-.

Dans le diagramme des cations, la plupart des points se situent dans la zone centrale avec une tendance remarquable vers le pôle sodique. Les pourcentages des cations de tous les points varient dans les intervalles suivants : 35,64% < Na < 75,58%, 16,27% < Ca2+ < 45,83%, 0,2 % < Mg2+ < 27%, 0,62% < K+ < 3,51%. Donc de ce diagramme, on déduit la classification dans l’ordre décroissant suivant : Na+, Ca2+, Mg2+.

Analyse statistique

Plusieurs corrélations significatives existent entre les différents ions (). Une forte corrélation (r > 0,7) a été observée entre les traceurs chimiques Cl-, SO42-, Ca2+, Mg2+, Na+, Sr2+ et le résidu sec (RS), indiquant l’origine évaporitique (NaCl, CaSO4, CaSO4, 2H2O, MgSO4 et SrSO4) de ces éléments dans les eaux souterraines. La légère différence entre les coefficients de corrélation des chlorures (r = 0,98) et du sodium (r = 0,94) avec la salinité de l’eau (exprimée en termes de résidu sec), peut être expliquée par le fait que les ions sodium subissent un transport non conservatif (échanges cationiques avec les minéraux argileux), alors que les chlorures ne subissent aucune transformation pendant leur transport. La nette différence entre les coefficients de corrélation des sulfates (r = 0,89), du strontium (r = 0,84), du calcium (r = 0,83) et du magnésium (r = 0,83) avec la salinité de l’eau peut être expliquée par le fait que les ions calcium et magnésium subissent un transport non conservatif (échanges cationiques avec les minéraux argileux de l’aquifère et entrent dans les phénomènes de précipitation/dissolution des carbonates) alors que le strontium est un peu adsorbé par les minéraux argileux (Hsissou et al. Citation1996).

Tableau 2 Matrice de corrélation des différents paramètres de la qualité des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès. Valeurs en gras indiquant les coefficients de corrélation 9r) significatifs r > 0.7.

Des corrélations significatives à moins significatives entre les cations et les anions sont mises en évidence entre Cl- et Na+ (r = 0,94), Cl- et K+ (r = 0,74), Cl- et Mg2+ (r = 0,63), Cl- et Ca2+ (r = 0,63), SO42- et Ca2+ (r = 0,63) et SO42- et Mg2+ (r = 0,58) : cela tend à prouver que la majorité des chlorures provient de la dissolution de NaCl et de KCl mais qu’une très faible proportion de ces cations pourraient provenir de la dissolution d’autres minéraux. En outre, une corrélation relativement élevée entre Cl- et Ca2+ (0,63) a été mise en évidence. Ceci est dû aux mécanismes de l’acquisition de la charge saline des eaux qui sont perturbés par plusieurs phénomènes, tels que les échanges de bases qui caractérisent les eaux fortement minéralisées, le lessivage des niveaux évaporitiques et la dissolution du gypse et de l’halite qui peuvent augmenter respectivement les teneurs des ions calcium et chlorures. La corrélation non significative entre les sulfates et le calcium et le magnésium est probablement due au fait que les ions calcium et magnésium sont impliqués dans les phénomènes de dissolution/précipitation des carbonates et aux échanges de base sur les minéraux argileux.

Dans cette analyse statistique, on observe que les éléments Ca2+ et Mg2+ (r = 0,35) sont plus liés à l’axe des évaporites que celui des carbonates, ce qui est dû à la faible solubilité de ces derniers par rapport aux formes évaporitiques. Ceci est expliqué par l’effet des valeurs élevées de la constante d’équilibre des minéraux évaporitiques (NaCl : 1,58, CaSO4 : –4,85 ; Plummer et al. Citation1976), ce qui permet aux éléments évaporitiques de se présenter dans l’eau à des concentrations élevées. Par contre pour les minéraux carbonatés, la constante d’équilibre est plus faible (dolomite : –17,02, calcite : –8,37), ce qui produit une précipitation des éléments chimiques.

Pour tenter de préciser les relations entre les éléments chimiques (variables) et de regrouper les points d’eau (individus) ayant le même chimisme, nous avons réalisé une analyse en composantes principales (ACP) et une classification ascendante hiérarchique (CAH). Pour tenter de préciser les relations entre les éléments chimiques (variables) et de regrouper les points d’eau (individus) ayant le même chimisme, nous avons réalisé une analyse en composante principale (ACP) et une classification ascendante hiérarchique (CAH). La présente ce traitement pour les données analytiques de la nappe de la Jeffara de Gabès, à partir des analyses des éléments majeurs et du strontium, de la température (T), du résidu sec (RS) et du pH.

Fig. 8 Analyse en composantes principales (8a) des variables, et (b) des individus, et (c) classification hiérarchique des paramètres physico-chimiques des eaux échantillonnées.

Fig. 8 Analyse en composantes principales (8a) des variables, et (b) des individus, et (c) classification hiérarchique des paramètres physico-chimiques des eaux échantillonnées.

En ce qui concerne les relations entre les éléments chimiques (espace des variables), l’analyse confirme les observations précédentes ((a)). L’axe d’inertie principal exprime 54,42% de la variance, il est défini positivement par la majeure partie des éléments (Cl-, SO42-, Na+, Mg2+, Ca2+) et représente donc un axe de minéralisation évaporitique et salifère. On note la très bonne corrélation entre les éléments Na+ et Cl-, qui sont quasiment confondus sur le graphique. Le premier axe ne représente que 54,42% de la variance, ce qui montre une certaine hétérogénéité dans l’évolution géochimique de l’eau (). L’axe 2 exprime 22,87% de la variance, est quant à lui essentiellement défini positivement par la température et les bicarbonates.

Tableau 3 Valeurs propres et variance des facteurs des variables des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès.

L’analyse factorielle (AFC) des correspondances est également basée sur la projection des données sur des axes factoriels représentatifs. Dans notre cas, les variables explicatives des groupes sont les variables utilisées précédemment pour l’ACP. Le montre que l’axe 1 tient compte de 54,42% de la dispersion des données et l’axe 2 de 22,87%. Le plan factoriel (1 × 2) avec une variance cumulée de 77,29% restitue par conséquent une information assez proche des données initiales.

Tableau 4 Statistiques élémentaires des différents paramètres physico-chimique mesurés.

Dans l’espace des individus ((b), les axes 1 et 2 permettent de différencier les points relativement minéralisés, proches et au-dessus de l’axe 1 des points fortement minéralisés, au-dessous et éloignés de l’axe 1. Les points proches de l’axe 1 sont représentés par un nuage dense, qui traduit la similitude des faciès chimiques pour la majorité des points qui caractérisent la région d’El Hamma-Chennchou. Les points situés au-dessus de l’axe 1 et qui caractérisent les eaux de la plaine côtière apparaissent relativement enrichis en SO42-, Cl-, Ca2+, Na+ et Mg2+ et dénotent une très forte variation dans les teneurs de Ca2+, Mg2+ et Na+. Les points les plus minéralisés au niveau du graben Ouedref–El Métouia et du graben El Meïda présentent une dominance des ions salifères (Na+, Cl-) par rapport au gypse (Ca2+, SO42-).

La représentation des observations dans l’arbre de classification ascendante hiérarchique (CAH) permet d’identifier une typologie des eaux à partir de leurs données physico-chimiques ((b)). L’application de cette technique aux eaux échantillonnées montre deux classes :

  1. La classe 1 comprend des forages à minéralisations relativement fortes, subdivisée en deux sous-classes :

    1. les forages qui captent la nappe de la Jeffara dans la région d’El Hamma-Chennchou ; ces forages ont une composition géochimique des eaux similaire à la nappe du CI ; et la minéralisation des eaux de ces forages est liée principalement aux ions SO42-, Cl-, Ca2+, Na+ et Mg2+ et dans une moindre mesure à K+ et HCO3-.

    2. La deuxième sous-classe comprend aussi des forages à minéralisation relativement fortes, qui captent l’aquifère mixte de la nappe de la Jeffara dans la plaine côtière, dont la minéralisation est liée principalement aux ions SO42-, Cl-, Ca2+, Na+ et Mg2+ et dans une moindre mesure à K+ et HCO3-. En outre, ces eaux dénotent une très forte variation dans les teneurs de Ca2+, Mg2+ et Na+ et une augmentation considérable des teneurs en ions caractéristiques du gypse (Ca2+, SO42-) par rapport aux ions salifères (Na+, Cl-). Ceci est probablement dû au lessivage de substratums marno-gypseux du Sénonien basal et argilo-gypseux du Crétacé inférieur de l’aquifère mixte de la nappe de la Jeffara qui apporte des concentrations élevées en ions SO42- et Ca2+.

  2. La classe 2 est composée par les forages à forte minéralisation liée principalement aux ions Cl-, Na+, SO42-, Ca2+ et dans une moindre mesure à Mg2+, K+ et HCO3-. Ces forages captent la nappe de la Jeffara au niveau du graben Ouedref–El Métouia et du graben El Meïda. Ces deux structures sont bordées par des dépressions de types sebkhas et juxtaposées via des failles normales aux formations argilo-gypseuses du Crétacé inférieur qui affleurent dans les horsts d’El Hmmeïmet et de Zemlet El Beïdha. A cette classe appartient le forage de Drâa Ouedref (DO) qui capte la nappe du CI (RS = 7,5 g L-1) à l’Est de la faille d’El Hamma. Les eaux de cette classe ne présentent pas le même faciès géochimique que les forages de la Classe 1, au vu des fortes teneurs en Cl- et Na+. En effet, ces forages présentent une dominance des ions salifères (Na+, Cl-) par rapport au gypse (Ca2+, SO42-) dans l’augmentation de salinité. Les résultats fournis par l’ACP des individus et la classification ascendante hiérarchique (CAH) sont en parfait accord,

La transition d’un faciès géochimique à un autre et la variation des caractéristiques géochimiques des eaux du système aquifère de la Jeffara de Gabès traduisent la complexité des processus hydrogéochimiques qui gouvernent la salinité de l’eau de cette nappe.

Mécanismes de l’acquisition de la charge saline

L’étude des corrélations établies entre les concentrations des principaux éléments majeurs (Cl-, SO42-, HCO3- Na+, Ca2+, Mg2+, K+ et Sr2+) et la minéralisation totale des eaux () a permis de remonter à l’origine de la minéralisation des eaux échantillonnées. La présence d’une corrélation positive entre ces ions (Cl-, SO42-, Na+, Ca2+ et Sr2+) et le résidu sec traduit la participation de ces éléments à l’acquisition de la charge saline des eaux souterraines et témoigne de la présence d’une source commune de minéralisation qui ne peut être que la dissolution des évaporites telles que la halite et le gypse. Ceci est corroboré par les indices de saturation (Is) calculés par le programme WateqF (Plummer et al. Citation1976) qui montrent un état de sous-saturation pour tous les échantillons vis-à-vis de la halite et de légère sous-saturation vis-à-vis du gypse. Le calcul des indices de saturation de la calcite et la dolomite () montre que la majorité des eaux prélevées sont saturés vis-à-vis des minéraux carbonatés, la calcite, la dolomite et l’aragonite. L’eau est en équilibre avec un minéral lorsque Is = 0, elle est sous-saturée lorsque Is < 0 et sursaturée lorsque Is > 0 (Subyani Citation2005, Cidu et al. Citation2009).

Fig. 9 Variation des concentrations des éléments chimiques majeurs avec la minéralisation des eaux (mg/L).

Fig. 9 Variation des concentrations des éléments chimiques majeurs avec la minéralisation des eaux (mg/L).

Les teneurs en Ca2+ et en Mg2+ montrent une grande variabilité, de 272 à 712 mg L-1 pour Ca2+ et de 37 à 264 mg L-1 pour Mg2+ (). Ceci peut s’expliquer par le fait que ces deux cations sont probablement impliqués dans les processus de dissolution/précipitation du gypse, de la calcite et de la dolomite (présence d’un ion commun le Ca2+) et aux phénomènes d’échanges de base Na+-Ca2+ ou Na+-Mg2+ et d’échanges Ca2+-Mg2+, dus à l’interaction entre eau et roches carbonatées (dolomitisation).

La totalité des points analytiques se positionnent au-dessous de la droite de mise en solution du gypse ((a)) traduisant un “déficit” en Ca2+ par rapport à SO42-, ce qui est confirmé par l’étroite corrélation entre ces deux éléments (coefficient de corrélation, R2 = 0,63). La (b) illustre l’étroite corrélation entre SO42- et Mg2+ (R2 = 0,34). En effet, tous les points analytiques se positionnent au-dessous de la droite de mise en solution du sulfate de magnésium (MgSO4) traduisent un « déficit » en Mg2+, Ceci est peut être attribué à une précipitation secondaire de calcite, à une précipitation de dolomite et/ou à un échange de base (Ca/Na) et (Mg/Na) sur les minéraux argileux, dont l’intervention est suggérée par une relative variation des teneurs de Na+ par rapport à Cl-.

La participation des ions Cl- et Na+ à la minéralisation totale des eaux résulterait d’une éventuelle dissolution de la halite. Ceci est corroboré par la corrélation positive entre les chlorures et le sodium, affichant R2 = 0,96 ((c)). Pour les concentrations en chlorure comprises entre 14 et 40 méq L-1 ((d)), on observe que certains points d’eau présentent une répartition stœchiométrique des ions Na+ avec les ions Cl-, indiquant l’origine chlorurée sodique commune (halite) de ces deux éléments chimiques. Cependant, d’autres points d’eau présentent un relatif excès ou déficit des teneurs en sodium par rapport à la pente 1 (dissolution de la halite), qui s’explique par l’existence de phénomènes d’échanges de bases qui ont fait varier la concentration du sodium par rapport à celle des chlorures. Le déficit en sodium (Na+/Cl- < 1), caractérisant certains points d’eau échantillonnée peut être attribué aux mécanismes d’échange de bases inverses ((d)), par lesquels les ions Na+ sont absorbés à la surface des minéraux argileux en libérant des ions Ca2+ et Mg2+. Un autre type de phénomène d’échanges de bases (directes) est observé essentiellement dans les eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès, où les ions Na+ sont libérés du complexe (Na+/Cl > 1) et sont remplacés par les ions Ca2+ et Mg2+. Le phénomène d’échange cationique inverse est mis en évidence dans d’autres aquifères de la Tunisie (Trabelsi et al. Citation2005, Abid et al. Citation2009, Kouzana et al. 2010). Ces phénomènes d’échanges de bases, qui caractérisent les niveaux aquifères de la nappe de la Jeffara, sont mis en évidence par les relations Ca2+/ (HCO3- + SO42-) et Ca2+ + Mg2+/ (HCO3- + SO42-) en fonction de Na+/Cl- représentées dans la (e) et (f). En cas d’absence de ces réactions d’échanges de bases (Na+/Cl- = 1), tous les points représentatifs des échantillons devraient se placer près du point d’origine.

La projection des différents points sur le diagramme Ca2+/ (HCO3- + SO42-) en fonction de Na+/Cl- ((e)) montre que 31% des points d’eau subissent un échange de bases inverse par lequel les ions Na+ sont adsorbés à la surface des minéraux argileux en libérant du Ca2+ (Na+/Cl- < 1), 22% des points subissent un échange de bases direct par lequel les ions Na+ sont libérés du complexe et sont remplacés par les ions Ca2+ (Na+/Cl- > 1) et 47% des points présentent l’état naturel (Na+/Cl- = 1). Tous les points d’eau présentent un déficit en Ca2+ par rapport aux ions HCO3- et SO42- sûrement dû à l’effet de la fixation du calcium par les argiles et à la précipitation de la calcite. En effet, la précipitation de la calcite est contrôlée par l’échange de bases inverse et la dissolution du gypse qui tendent à maintenir la saturation et la sursaturation de l’eau vis-à-vis ce minéral (calcite). En outre, les bicarbonates formés par la dissolution de la calcite mettant en jeu le CO2 (g) sont équilibrés par Ca2+ et Na+ libérés du complexe des minéraux argileux de la formation aquifère (Andrews et al. Citation1994).

Le diagramme en (f) montre également que 57% des points d’eaux présentent un déficit en Ca2+ et Mg2+ par rapport aux ions HCO3- et SO42- (Ca2+ + Mg2+/ HCO3- + SO42- < 1) dû sûrement à la précipitation du calcite et dolomite et à l’effet de la fixation du calcium et magnésium par les argiles. En outre, 43 % des points d’eaux présentent un excès en Ca2+ et Mg2+ par rapport aux ions HCO3- et SO42- dû essentiellement au lessivage des niveaux évaporitiques qui fournissent plus d’ions Ca2+ et Mg2+ et l’échange de base inverse qui ne peut consommer l’effet de la précipitation chimique ou l’effet de la fixation du calcium et magnésium par les argiles.

Dans la nature Ca2+ est d’origine carbonatée (calcite, aragonite et dolomite) et/ou évaporitique (gypse et anhydrite). La représentation de Ca2+ en fonction de HCO3- ((g)), montre que tous les points se positionnent au-dessus de la droite de pente 1 (droite de précipitation/dissolution des carbonates). Ainsi, l’excès de Ca2+ est interprété comme le résultat de la mise en solution du gypse. Par conséquent, le taux d’ions Ca2+ provenant de la dissolution de gypse est d’autant plus élevé que ne peut consommer la précipitation de la calcite et l’adsorption du calcium par les argiles.

La corrélation de Ca2+ + Mg2+ et de HCO3- + SO42- ((h)), indique qu’une partie du calcium et du magnésium pourrait bien provenir de la dissolution des carbonates de la matrice aquifère.

Fig. 10 Box plots illustrant la variation des indices de saturation (IS) de certains minéraux des formations aquifères.

Fig. 10 Box plots illustrant la variation des indices de saturation (IS) de certains minéraux des formations aquifères.

Fig. 11 Distribution des échantillons prélevés par rapport à la droite de mise en solution (a) du gypse, (b) sulfate de magnésium, (c) et (d) de l’halite. Relation de: (e) Ca2+/(HCO3- + SO42-) vs Na+/Cl-, (f) Ca2+ + Mg2+/(HCO3- + SO42-) vs Na+/Cl-, (g) SO42- + HCO3- vs Ca2+ + Mg2+ et (h) Ca2+ vs HCO3- dans les eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès.

Fig. 11 Distribution des échantillons prélevés par rapport à la droite de mise en solution (a) du gypse, (b) sulfate de magnésium, (c) et (d) de l’halite. Relation de: (e) Ca2+/(HCO3- + SO42-) vs Na+/Cl-, (f) Ca2+ + Mg2+/(HCO3- + SO42-) vs Na+/Cl-, (g) SO42- + HCO3- vs Ca2+ + Mg2+ et (h) Ca2+ vs HCO3- dans les eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès.

Dans le cas des eaux prélevées, tous les points d’eaux présentent un rapport Ca2+/Mg2+ supérieur à 0,5 (). Lorsque ce rapport a une valeur supérieure à 0,5, le phénomène d’interaction eaux–roches comme la dolomitisation est favorisé. La réaction d’échange Ca2+-Mg2+ (dolomitisation) a été signalée comme cause principale de l’augmentation du rapport Ca2+/Mg2+ dans les eaux des bassins carbonatés (Plummer et al. Citation1983). L’interaction eaux–roches carbonatées est due au fait que l’aspect karstifié de l’aquifère calcaire diminue en s’éloignant des accidents majeurs. Ceci se traduit par une diminution notable des transmissivités et des débits spécifiques des forages à l’intérieur des structures tectoniques. Les valeurs élevées du rapport Ca2+/Mg2+ sont dues à l’excès du calcium suite à la dissolution du gypse. De ce fait, la réaction (2) explique bien la saturation en calcite et en dolomite de la majorité des eaux prélevées et leur sous-saturation par rapport au gypse:

(2)

Apport du strontium et du Rapport Sr2+/Ca2+

Le strontium est un élément caractéristique des évaporites. Il s’y trouve sous forme de célestine (SrSO4), toujours associée au gypse (Carré Citation1975). En outre, il se trouve en faible quantité dans les roches carbonatées et il est peu adsorbé par les argiles (Hsissou 1995). L’étude du rapport Sr2+/Ca2+ dans les eaux souterraines permet l’identification des circulations d’eaux souterraines et la détermination de leur origine. Pour Carré (Citation1975), Meybeck (Citation1984), Hsissou et al. (Citation1996), Abdesselam et al. (Citation2000) et Djabri et al. (Citation2007), un rapport Sr2+/Ca2+ supérieur à 1‰, est caractéristique des eaux évaporitiques. Quand il est supérieur à 5‰, son origine peut être attribuée aux évaporites du Trias alpin (Meybeck Citation1984). Ce rapport variable d’un type d’évaporite à l’autre, est souvent utilisé comme traceur naturel pour caractériser l’origine des sulfates (Hsissou et al. Citation1996). Le strontium est également considéré comme un indicateur très utile pour la détermination de l’origine de la minéralisation (Edmunds Citation1980, Citation1995) et de la mise en solution des évaporites (Edmunds et al. Citation2003). Il permet aussi de distinguer les sulfates provenant de l’oxydation de sulfures (teneurs faibles) de ceux issus de la dissolution d’évaporites (teneurs élevées), Les évaporites actuelles de sebkhas contiennent typiquement de la halite comme minéral dominant et du gypse et de l’anhydrite. A proximité des zones humides salées (sebkhas, chotts, etc.), la dissolution incongruente du gypse/anhydrite est suggérée par une nette augmentation des teneurs en Sr2+ et, par conséquent, par l’augmentation du rapport Sr2+/Ca2+ (Edmunds et al. Citation2003).

Les eaux des forages de la Jeffara étudiées présentent de fortes teneurs en Sr2+ (5 à 13 mg L-1) et montrent une très grande variation suivant les secteurs de prélèvement. Les forages situés à proximité de Sabkhet El Hamma et Sabkhet El Melah-M’khacherma, aux alentours de Ouedref et du graben El Meïda se démarquent des autres forages (4,97 à 6,48 mg L-1), avec des concentrations allant de 7 à 13 mg L-1 ().

La corrélation Sr2+/Ca2+ en fonction de SO42- montre que les eaux analysées ont un rapport molaire de Sr2+/Ca2+ variable et supérieur à 1‰, traduisant ainsi une origine évaporitique de SO42-. La variation des valeurs du rapport Sr2+/Ca2+ (exprimé en ‰) en fonction des sulfates, permet de distinguer trois groupes de points d’eaux () :

Fig. 12 Evolution du rapport Sr2+/Ca2+ en fonction des SO42- pour les eaux du domaine d’étude.

Fig. 12 Evolution du rapport Sr2+/Ca2+ en fonction des SO42- pour les eaux du domaine d’étude.
  1. GRI: un rapport Sr2+/Ca2+ avec des valeurs aux alentours de 5‰ est caractéristique des eaux ayant lessivé les évaporites du Crétacé inférieur;

  2. GRII: un rapport Sr2+/Ca2+ compris entre 6,6 et 8,6‰ est caractéristique des eaux ayant lessivé les évaporites du Crétacé supérieur et inférieur; supressed it

  3. GRIII: un rapport Sr2+/Ca2+ supérieur à 8,6‰ est lié aux eaux piégées dans les terrains évaporitiques.

GRI

Le premier groupe, dont le rapport Sr2+/Ca2+ varie de 5,5 à 6,39‰, est subdivisé en deux sous-groupes:

  1. Le premier sous-groupe rassemble les eaux logées dans les calcaires du Turonien et du Sénonien inférieur situés de part et d’autre du seuil d’El Hamma et des failles affectant le graben de Chennchou. Ainsi, c’est à la faveur de ces accidents tectoniques majeurs que se produit l’ascension rapide des eaux du CI, qui se chargent en sels dissous lors de leur contact avec les niveaux évaporitiques du Cénomanien et du Sénonien basal. La température relativement élevée de ces eaux (40–50°C) est l’indice de cette remontée rapide. Ceci se traduit par une légère augmentation des rapports Sr2+/Ca2+ des eaux de la nappe de la Jeffara par rapport à celles caractérisant le CI du Chott Fejej (valeur moyenne du rapport Sr2+/Ca2+ du CI ≈ 5‰).

  2. Le deuxième sous-groupe rassemble les eaux logées dans les sables grossiers du Miocène (partie captive de la nappe de la Jeffara) dont les valeurs du rapport Sr2+/Ca2+ oscillent entre 6,02 et 6,39‰ et les teneurs en Sr2+ sont comprises entre 6,48 et 7 mg L-1. Dans ce secteur, les eaux souterraines circulent en contact avec des évaporites dont l’extension est certainement limitée. Ces eaux sont à une profondeur souvent inférieure à 100 m. A ce deuxième sous-groupe appartient le forage 46 implanté à l’aval de Koudiat El Hmmeïmet captant l’aquifère sableux du Miocène sub-affleurant (de profondeur 52–82 m) dont le mur est constitué par le Crétacé inférieur gréseux et argilo-évaporitique. L’eau de ce forage présente un rapport Sr2+/Ca2+ de l’ordre de 6,02‰. Toutefois, le rapport Sr2+/Ca2+ et les concentrations en éléments d’origine évaporitique sont moins élevées, dénotant ainsi une dilution des eaux du Miocène (dont l’origine est celle du CI), par l’infiltration des eaux de pluie à travers la faible couverture mio-plio-quaternaire. Cette alimentation locale de la nappe de la Jeffara, par les eaux pluviales à travers les sables en affleurement ou sub-affleurent, aux alentours de Koudiat El Hmmeïmet, est confirmée par le cachet isotopique de ces eaux (ERRES 1972, Mamou Citation1990, Trabelsi et al. Citation2009, Citation2011, Hadj Ammar et al. Citation2010).

GR II

Le deuxième groupe rassemble des eaux logées dans l’aquifère mixte des calcaires du Sénonien inférieur et des sables du Miocène. Ces eaux sont captées par des forages situés dans la zone comprise entre Teboulbou et Oued Maleh. Leurs rapports Sr2+/Ca2+ varient de 6,6 à 8,6‰ et leurs teneurs en Sr2+ de 5 à 12 mg L-1. Ce groupe de points d’eau montre une hétérogénéité qui peut s’expliquer par la diversité des niveaux évaporitiques et les modifications ultérieures (mélanges d’eau, précipitation des carbonates, etc.). Il s’agit des captages profonds de 100 à 250 m où le mur de l’aquifère est formé soit par le Sénonien basal marno-gypseux, soit par le Crétacé inférieur argilo-gypseux qui a été atteint par certains forages. En outre, l’aquifère calcaire du Sénonien inférieur et l’aquifère sableux du Miocène sont en contact par failles normales respectivement avec les dépôts marno-gypseux du Sénonien basal et argilo-gypseux du Crétacé inférieur.

La discordance des sables miocènes sur les calcaires sénoniens inférieurs a alors une conséquence directe sur les propriétés hydrodynamiques de l’aquifère mixte. En plus, le biseautage des calcaires du Sénonien inférieur vers Oued El Melah empêche toute extension de cet aquifère vers le Nord et les eaux qui y circulent transitent directement dans l’aquifère sableux du Miocène. De ce fait, les rapports Sr2+/Ca2+ caractéristiques des eaux de l’aquifère mixte sont très variables et relativement élevés (6,6–8,6‰) et très supérieur à ceux relevés sur l’eau de la nappe de la Jeffara dans la région d’El Hamma-Chennchou. Cette nette signature évaporitique par le strontium et le rapport Sr2+/Ca2+, ainsi que les concentrations très élevée en sulfates et en chlorures, témoignent de contacts importants entre d’une part l’eau de l’aquifère mixte formé par les calcaires du Sénonien inférieur et les sables du Miocène et d’autre part celle des dépôts marno-gypseux du Sénonien basal et argilo-gypseux du Crétacé inférieur, qui jouent localement le rôle de mur de cet aquifère.

GR III

Le troisième groupe rassemble les eaux logées dans les calcaires du Sénonien inférieur au niveau du graben Ouedref–El Métouia (forages : 19, 20 et 21) et dans les sables du Miocène aux alentours de l’Oued El Maleh (forages : 42 et 43), à Oued l’Akarit et à El Hicha (forages : 47, 48, 49, 50, 51, 52 et 53). Les valeurs élevées du strontium (5,13–23 mg L-1) et celles du rapport Sr2+/Ca2+ (8,6–9,91‰) indiquent un temps de résidence prolongé de l’eau au sein de l’aquifère (Brondi et al. Citation1983, Pulido-Lebeuf et al. Citation2003).

Les valeurs du rapport Sr2+/Ca2+ sont relativement élevées et se démarquent nettement de celles caractérisant les eaux du CI au niveau d’El Hamma et Chennchou et de l’aquifère mixte. Ces forages enregistrent également les teneurs suivantes : 1050–1731 mg L-1 en sulfates, 439–1170 mg L-1 en sodium et 674–1806 mg L-1 en chlorures. Les faciès de type chloruré sodique témoignent de l’intrusion d’eaux hyper-salées du côté de Sabkhet El Hamma et éventuellement le drainage de l’eau à partir des formations argilo-évaporitiques du Crétacé inférieur sous-jacent. En effet, les principaux axes tectoniques (anticlinal de Zemlet El Beïdha, graben d’El Meïda et horst de Koudiat El Hmmeïmet) limités par des failles normales, semblent être le siège de remontée d’eaux anciennes du CI. Ces accidents dont les rejets sont de quelques centaines de mètres, mettent en juxtaposition latérale les niveaux aquifères de la Jeffara, avec ceux du Crétacé inférieur largement sablo-argileux avec des passées gypseuses. Ces eaux contribuent à l’alimentation souterraine de la nappe de la Jeffara logée dans les sables du Miocène (graben d’El Meïda et à El Hicha) et dans les calcaires du Sénonien (graben d’Ouedref–El Métouia). L’apport par infiltration des eaux météoriques à travers les affleurements sableux du Mio-Pliocène aux alentours du horst de Koudiat El Hmmeïmet contribue à l’adoucissement des eaux de la nappe et à l’atténuation de l’effet des eaux à cachet évaporitique.

QUALITE DES EAUX

La qualité des eaux pour l’approvisionnement en eau potable (AEP) ne satisfait pas les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS Citation2004). Le montre la variabilité et l’ordre de grandeur des différents variables physico-chimiques caractéristiques des eaux souterraines à l’échelle de tout le secteur étudié, ainsi que les normes de potabilité des eaux de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS Citation2004). Ainsi, les eaux de la nappe de la Jeffara sont inacceptables pour la consommation humaine. Quant à la qualité d’eau pour l’irrigation, basée sur les normes de Riverside (1954), les eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès présentent des valeurs de SAR moyennes à fortes (), évoluant dans l’espace avec la conductivité. Ces eaux s’arrangent selon deux classes :

Fig. 13 Evolution du SAR en fonction de la conductivité des eaux souterraines.

Fig. 13 Evolution du SAR en fonction de la conductivité des eaux souterraines.
  1. eaux médiocres (C4S2): les eaux faisant partie de cette classe sont fortement chargées en sels, Elles sont susceptibles de convenir à l’irrigation des plantes tolérantes au sel et sur des sols bien drainés et lessivés ; et

  2. eaux mauvaises (C4S3-C4S4): les eaux qui font partie de cette classe ne conviennent pas à l’irrigation, Leur utilisation pour l’irrigation doit être soumise certaines conditions: sols très perméables, bon lessivage, plantes très tolérantes au sel.

CONCLUSION

Cette étude sur les eaux souterraines de la nappe de la Jeffara de Gabès a pu mettre en évidence les différents phénomènes géochimiques pouvant avoir lieu au sein de cet important aquifère multicouche. La variation de la salinité et le comportement hydrogéochimique des aquifères de la nappe de la Jeffara de Gabès s’expliquent par une interaction avec leur environnement global (niveaux évaporitiques et Sebkhas) et par un contexte géologique complexe.

Les méthodes statistiques multivariées et géochimiques faisant appel aux éléments majeurs, strontium et des rapports Sr2+/Ca2+ nous a permis de comprendre les processus de minéralisation des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès.

Bien que proches de la côte et sous climat semi-aride, les eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès ne doivent pas leurs fortes charges saline à une intrusion marine. Les indications livrées par l’étude statistique et hydrochimique s’accordent pour montrer que les éléments chimiques en solution qui contrôlent la salinité des eaux de la nappe de la Jeffara de Gabès, proviennent essentiellement des dépôts argilo-gypseux du Crétacé inférieur et marno-gypseux du Crétacé supérieur singulièrement riches en ces éléments qui constituent les substratums des aquifères de cette nappe, ainsi que de l’intrusion d’eaux fortement chargées à partir des sebkhas.

La dissolution de la halite et du gypse contribuerait à la salinisation des eaux de la nappe, Ceci est d’ailleurs en parfait accord avec l’état de sous-saturation des eaux vis-à-vis de ces minéraux, Les phénomènes d’échanges de base et les processus de dissolution/précipitation des minéraux carbonatés (calcite, dolomite et aragonite) sont généralement à l’origine de la grande variabilité des concentrations des cations (Ca2+, Mg2+ et Na+) dans les eaux souterraines.

Trois groupes de points d’eau peuvent être individualisés dans la nappe de la Jeffara de Gabès en fonction du rapport Sr2+/Ca2+. Ces résultats permettent de caractériser les différents domaines de la nappe de la Jeffara de Gabès. Ils montrent aussi que chaque groupe d’évaporites : Crétacé inférieur ainsi que les deux épisodes évaporitiques du Crétacé supérieur (Cénomanien et Sénonien basal) possède grâce au strontium une signature particulière.

Dans la région de Gabès, largement influencée par la tectonique, les marnes gypseuses du Sénonien basal ne sont reconnues que par quelques forages hydrauliques et les dépôts argilo-gypseux du Crétacé inférieur n’affleurent qu’au Nord et à l’Ouest du secteur d’étude. Ainsi, une argumentation peut être apportée par le rapport Sr2+ /Ca2+ et les réponses hydrochimiques de certains forages sur la présence des niveaux évaporitiques profonds.

Associé aux autres traceurs chimiques, le rapport Sr2+/Ca2+ s’est révélé très pertinent dans la discrimination des eaux d’origine évaporitiques et semble donc devoir être utilisé comme un outil supplémentaire intéressant dans l’étude de ce type de système hydrogéologique complexe. La qualité chimique des eaux de la nappe de Jeffara de Gabès s’avère naturellement médiocre en général. La démarche suivie pourrait intéresser d’autres régions du bassin de la Jeffara.

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