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Changements climatiques et production hydroélectrique canadienne: où en sommes-nous?

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Pages 196-209 | Received 28 Feb 2013, Accepted 07 Jun 2013, Published online: 01 Oct 2013

Abstract

The current state of knowledge regarding anticipated hydrological impacts of climate change on Canadian basins indicates that those impacts will be non-negligible. Hydroelectricity companies will have to adapt to anticipated changes. Most case studies presented in the recent literature indicate a shift toward earlier spring melt and an increase of liquid precipitation during winter. The magnitude of the changes to the hydrologic cycle varies from one province and one territory to another and between different catchments. Hydropower, which is one of the most important energy sources across the country, is dependent on the hydrological cycle. Consequently, hydropower producers must already develop adaptation strategies to face future changes in the hydrological cycle. However, the development of management strategies for hydropower production depends strongly on the individual characteristics of each watershed. Therefore, it is mostly done on a case-by-case basis. This is a lengthy process, but promising studies concerning the adoption of adaptive management practices indicate that in many cases it would allow hydropower producers to maintain their current level of production or even increase it. In the future, multi-criteria analysis of different adaptation strategies for hydropower production should gain importance. This will allow for the integration of political, social and environmental aspects as well as economic considerations in the balance.

L’état actuel des connaissances indique que les répercussions anticipées des changements climatiques sur l’hydrologie des bassins canadiens seront non négligeables. Les entreprises productrices d’hydroélectricité auront à s’adapter face aux changements appréhendés. À l’échelle du pays, la plupart des études de cas récentes sur les répercussions hydrologiques des changements climatiques indiquent un devancement de la crue printanière ainsi qu’une augmentation de la précipitation liquide en hiver. L’ampleur des modifications affectant le cycle hydrologique varie d’une province et d’un territoire à l’autre, même d’un bassin à l’autre d’une même région. L’hydroélectricité, qui représente une des sources d’énergie les plus importantes à l’échelle du pays, est tributaire du cycle hydrologique. Les producteurs d’hydroélectricité canadiens doivent dès maintenant élaborer des stratégies d’adaptation à la modification de ce cycle. Or, l’élaboration de stratégies de gestion des ouvrages doit s’effectuer au cas par cas, considérant le caractère particulier de chaque bassin versant. Bien qu’il s’agisse d’un processus de longue haleine, plusieurs études portant sur l’adoption d’un mode de gestion adaptatif indiquent que ce mode de gestion des ouvrages et de la production hydroélectrique permettrait aux producteurs de maintenir leur production au niveau actuel, voire même de l’augmenter. En outre, les travaux futurs en matière de stratégies d’adaptation aux changements climatiques pour la production d’hydroélectricité devront inclure les aspects économiques, mais également politiques, sociaux et environnementaux dans la balance par le biais d’une analyse multi-critères.

Introduction

Le Canada est le troisième plus grand producteur d’hydroélectricité au monde (Agence Internationale de l’Énergie 2012). En tant qu’énergie renouvelable, l’hydroélectricité contribue à réduire la dépendance du Canada aux combustibles fossiles et l’aide à affirmer sa volonté d’être un acteur dans la lutte au réchauffement climatique. La plupart des projections climatiques à l’échelle de la majorité des bassins versants canadiens étudiés prédisent une augmentation des débits hivernaux et une diminution de la crue printanière, attribuable à un plus grand nombre d’événements pluvieux hivernaux, à l’augmentation des épisodes de redoux hivernal causée par la hausse de la température et à une chute de neige diminuée (ex. Fortin et al. Citation2007; Boyer et al. Citation2010; Rodenhuis et al. Citation2011; Kienzle et al. Citation2012). Au cours des dernières années, les observations disponibles démontrent que ces tendances sont déjà apparentes pour certains bassins (ex. Whitfield et Cannon 2000; Hodgkins et Dudley 2006). Cette «régularisation» du cycle hydrologique nordique entraînera des conséquences importantes pour la conception et la gestion des installations hydroélectriques. L’hydroélectricité représente plus de 90% de l’énergie totale produite pour le Québec, la Colombie-Britannique et le Manitoba. Plusieurs autres provinces, soit Terre-Neuve et Labrador, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick produisent d’importantes quantités d’hydroélectricité et il existe un important marché inter provincial pour cette énergie, de même qu’avec les États-Unis. L’importance de l’hydroélectricité comme source d’énergie pour la population et les industries canadiennes justifie la mise à jour de l’état des connaissances sur ce thème.

À cette fin, plusieurs études à caractère strictement hydrologique, non-reliées à des bassins versants importants pour la production d’hydroélectricité ont été mises de côté. Il va sans dire que la littérature concernant les répercussions hydrologiques des changements climatiques s’enrichit rapidement et cette revue de littérature se concentre surtout sur l’hydroélectricité. Ce thème sera d’abord exploré séparément pour les différentes portions géographiques du pays. En effet, l’état d’avancement des connaissances dans le domaine des répercussions des changements climatiques pour la production d’hydroélectricité varie d’une région à l’autre, principalement en raison de l’importance relative de l’hydroélectricité pour chaque région. Ensuite, une section spécifique aux avancées en matière de stratégies d’adaptation pour les producteurs d’hydroélectricité complète ce portrait. Elle repose sur des études de cas réalisées surtout au Québec mais également en Ontario. Enfin, la conclusion synthétise les éléments essentiels de ce portrait d’ensemble pour en dégager des pistes de recherche futures.

Différences et similitudes régionales et temporelles à l’échelle du pays

De façon générale pour l’ensemble du pays, on anticipe une modification du débit annuel moyen, un devancement de la crue printanière ainsi qu’une augmentation de la précipitation liquide en hiver (ex. Fortin et al. Citation2007; Boyer et al. Citation2010; Rodenhuis et al. Citation2011; Kienzle et al. Citation2012). Toutefois, l’ampleur de ces modifications varie d’une région à l’autre du pays, voire même d’un bassin à l’autre d’une même région.

Il importe cependant de distinguer l’effet de la variabilité climatique naturelle de celui de l’évolution graduelle du climat. Par exemple, St-Jacques et al. (Citation2010) se sont intéressés à l’évolution des débits observés pour 16 cours d’eau du sud de l’Alberta afin de distinguer ces deux effets. En corrélant les débits avec l’Oscillation Pacifique Décennale (OPD), ils ont pu démontrer une tendance à la baisse pour la plupart des stations. Cette tendance est fortement corrélée à une modification des variables climatiques observées au cours des dernières années, et cette tendance a pu être isolée des variations climatiques liées à l’OPD.

Importance du mode de gestion des barrages

Au Québec, Landry et al. (Citation2013) ont démontré que le mode de gestion des barrages influence la relation entre les variables climatiques et les débits en aval. En effet, plusieurs travaux ont mis en évidence l’existence de trois modes de gestion différents, soit le régime inversé, le régime homogène et le régime naturel (Landry et al. Citation2013). Chacun de ces régimes affecte le débit observé en aval du barrage et interfère nécessairement avec l’action du climat sur l’hydrologie. Ainsi, le débit mesuré en amont d’un réservoir est une variable plus appropriée que le débit mesuré à l’aval lorsqu’il s’agit d’identifier les effets du climat sur le comportement des cours d’eau.

Provinces de l’ouest et prairies

En Colombie-Britannique, l’hydroélectricité représente environ 90% de la production totale d’énergie. La province compte un total de 97 centrales hydroélectriques et les bassins les plus importants pour cette production sont ceux des fleuves Fraser et Columbia et de la rivière Peace. Le fleuve Fraser lui-même ne comprend aucune infrastructure hydroélectrique, mais le fleuve Kemano, dont une partie du débit provient d’une dérivation du bassin versant du fleuve Fraser, ainsi que le système Bridge/Seton, un tributaire de ce fleuve (Déry et al. Citation2012) comportent des infrastructures importantes. La production combinée des tributaires du fleuve Fraser et de la rivière Columbia représente 80% de la production d’énergie totale (BC Hydro 2013). Ces bassins, qui ont tous fait l’objet d’études concernant les retombées hydrologiques des changements climatiques en lien avec la production d’énergie (ex. Rodenhuis et al. Citation2011; Shrestha et al. Citation2011, Citation2012; Zwiers et al. Citation2011; Jost et al. Citation2012), sont illustrés à la Figure (Rodenhuis et al. Citation2011).

Figure 1 Principaux bassins de l’Ouest canadien (adapté de Rodenhuis et al. Citation2011).

Figure 1 Principaux bassins de l’Ouest canadien (adapté de Rodenhuis et al. Citation2011).

Le bassin du fleuve Fraser est le plus vaste en Colombie-Britannique et on y trouve 63% de la population de la province. Ce bassin comporte trois types de régimes hydrologiques selon qu’on se trouve dans la partie montagneuse de l’est, dans le plateau central ou dans les montagnes côtières à l’ouest. Les travaux de Shrestha et al. (Citation2012) pour ce bassin indiquent que les changements climatiques auront des retombées différentes pour chacune de ces trois régions. Les deux portions montagneuses à l’est et à l’ouest du bassin passeraient d’un régime dominé par la neige à un régime hybride alors que le plateau central, initialement caractérisé par un régime hybride, deviendrait strictement pluvieux. Ces constats proviennent des simulations du modèle hydrologique Variable Infiltration Capacity (VIC, Liang et al. 1994), couplé à différentes combinaisons de trois scénarios d’émission de gaz à effet de serre et huit modèles climatiques globaux, puis mis à l’échelle à l’aide d’une méthode statistique. Shrestha et al. (Citation2012), de même que Morrison et al. (Citation2002), Kerkhoven et Gan (2011) et Poitras et al. (Citation2011), soulignent que la diminution du couvert nival entraînera des conséquences majeures pour la gestion des ouvrages hydroélectriques. Le couvert de neige agissant comme «réservoir» d’eau, une augmentation de la pluviométrie hivernale pourrait entraîner des difficultés de stockage là où la capacité d'emmagasinement en réservoir ne suffit pas.

Pour le sous-bassin Nechako, qui fait partie du bassin Fraser, la performance en modélisation est inférieure aux résultats obtenus pour le reste du bassin, probablement en raison de l’utilisation de débits naturalisés alors que ce sous-bassin est fortement régularisé. Jones (Citation2011) soulignent d’ailleurs que la majorité des études hydrologiques en contexte de changements climatiques à ce jour se sont concentrées sur des bassins «naturels» afin d’éviter un possible effet de confusion attribuable à la régulation des cours d’eau. Or, les bassins importants du point de vue énergétique sont précisément ceux qui sont régulés par le biais de réservoirs et d’ouvrages de contrôle.

Le fleuve Columbia constitue un bassin transfrontalier avec les États-Unis. Des installations hydroélectriques existent sur ce bassin tant au Canada qu’aux États-Unis et de nouvelles négociations concernant la gestion de ce bassin par l’entremise du «Columbia Water Treaty» devraient être initiées au cours de la prochaine décennie. Les études canadiennes se concentrent généralement sur la partie amont du bassin, nommée ci-après «Upper Columbia». Dans l’étude de Zwiers et al. (Citation2011) portant sur 23 scénarios climatiques, 16 indiquent un devancement de la crue d’environ un mois, le mois de plus forte hydraulicité passant de juillet à juin.

Plusieurs bassins en Colombie-Britannique comportent des glaciers. Les cours d’eau alimentés par des glaciers risquent également de voir leur régime affecté, d’abord à la hausse dans la première moitié du vingt-et-unième siècle, alors que la hausse de température projetée provoquera la fonte des glaciers, puis éventuellement à la baisse lors du retrait de ceux-ci (Stahl et Moore 2006). La vaste majorité des modèles hydrologiques ne comportent pas de modules simulant la fonte et le retrait des glaciers, ce qui complique l’évaluation des impacts des changements climatiques sur les régimes hydrologiques des bassins versants dominés par ces processus. De plus, l’incorporation de glaciers au sein de modèles hydrologiques exacerbe souvent le problème d’équifinalité des jeux de paramètres (Beven et Freer 2001) parce que le modèle parvient difficilement à distinguer les processus liés à la neige de ceux liés aux glaciers. D’après Jost et al. (Citation2012), le problème d’équifinalité est d’autant plus marqué pour les grands bassins comportant une faible superficie recouverte de glacier, comme c’est le cas en Colombie-Britannique et en Alberta. Ceci est attribuable selon eux à la faible variance des débits issus de la fonte des glaciers pour ces bassins. En adaptant le modèle hydrologique HBV-EC (Bergström Citation1976, Citation1992) et en ayant recours à des images satellite, Jost et al. (Citation2012) ont démontré qu’en contexte de réchauffement climatique, la surface occupée par les glaciers sur le bassin Columbia serait réduite de 83% durant le vingt-et-unième siècle. Selon Jost et al. (Citation2012), la fonte des glaciers associée à la projection climatique du modèle global canadien CGCM3.1-T47, alimenté par le scénario d’émission de gaz à effet de serre (GES) A1B et mis à l’échelle du bassin versant par l’algorithme TreeGen (Stahl et al. Citation2008) résulterait en une réduction du débit dès 2040. Cette réduction de débit deviendrait marquée à partir de 2060 alors que la superficie occupée par le glacier serait réduite de 40% par rapport à l’an 2000.

En Alberta et en Saskatchewan, l’énergie hydroélectrique représente moins de 1% de la production énergétique totale. Ainsi, il existe peu d’études sur les répercussions des changements climatiques pour ce secteur. On peut tout de même mentionner Kienzle et al. (Citation2012), qui dans une étude sur le bassin de la rivière Cline en Alberta, démontrent une tendance vers l’augmentation des débits hivernaux, qu’ils attribuent à une hausse des précipitations liquides hivernales et des redoux hivernaux. Le bassin de la rivière Cline est pour l’instant recouvert de glaciers à 6.8% et la fonte de neige contribue à 60% du débit annuel moyen. Ce bassin, bien que petit, est important puisqu’il génère en moyenne plus de 40% des débits de la rivière North Saskatchewan en Alberta, en incluant le lac Abraham, un réservoir important. Le glacier Peyto est muni d’une station de mesure depuis 1965, ce qui permet d’effectuer un suivi du bilan de masse du glacier. Les cinq simulations climatiques effectuées par Kienzle et al. (Citation2012) indiquent un devancement du pic de la crue annuelle en 2050 d’environ un mois par rapport à 1961–1990. Plus précisément, on anticipe une augmentation initiale du débit, puis une diminution de l’ordre de 25% pour l’horizon 2020. Cette diminution passe à 30% pour l’horizon 2080.

Une autre particularité importante de la Colombie-Britannique et de l’Alberta est la présence des plus importantes montagnes du pays. Cela accentue le besoin d’une modélisation à fine échelle spatiale, spécialement pour les bassins de petites dimensions tels que celui de la rivière Campbell. Par exemple, la résolution actuelle du modèle régional climatique canadien (MRCC) (Caya et Laprise 1999), qui est d’environ 2000 km2 (cellule de 45 km 45 km), ne permet d’avoir qu’une seule maille pour ce bassin. Conséquemment, les modélisations hydrologiques tirées de projections climatiques à cette échelle pourraient manquer de fiabilité sur de tels bassins, pourtant dignes d’intérêt pour la production d’énergie. Le projet conjoint «Pacific Grid» d’Ouranos et du «Climate Modelling Group» de l’Université de Victoria s’intéressera à cette problématique dans les prochaines années, dans le but de produire un modèle régional de climat de résolution à 225 km2 (15 km 15 km), en plus d’améliorer le schéma de surface du modèle, élément crucial pour bien représenter les processus hydrologiques.

Le Tableau résume les impacts appréhendés des changements climatiques sur les régimes hydriques des principaux bassins versants producteurs d’hydroélectricité pour les provinces de la Colombie-Britannique et de l’Alberta.

Tableau 1. Caractéristiques des principaux bassins de l’Ouest canadien étudiés en lien avec les changements climatiques et la production d’hydroélectricité.

L’hydroélectricité est très importante au Manitoba, où elle représente la source principale d’électricité pour la population. La production totale s’élève à 30 billions de kWh par année et passe par l’exploitation de plusieurs cours d’eau répartis sur les énormes bassins versants des fleuves Churchill et Nelson. Les principaux cours d’eau harnachés sont les rivières Winnipeg, Saskatchewan, et Laurie ainsi que le fleuve Nelson.

Le bassin de la rivière Winnipeg influence la production de 4600 MW, soit directement ou en alimentant le lac Winnipeg et la rivière Nelson, lesquels sont également importants pour la production d’énergie (Westmacott et Burn 1997; St. Georges Citation2007). Ceci en fait un bassin important pour le Manitoba puisque la rivière Winnipeg y trouve sa source. En 2005, 96% de l’électricité utilisée au Manitoba provenait d’ouvrages hydroélectriques (St. Georges Citation2007). Dans le cadre d’une étude comparative réalisée à l’aide des chroniques d’observation des débits de neuf stations hydrométriques réparties sur le bassin pour la période 1924–2003, St. Georges (Citation2007) a remarqué une hausse des précipitation en été et en automne et une augmentation correspondante des débits. L’augmentation du débit (été et automne) observée durant les 80 dernières années est de l’ordre de 60–110%, tant pour les portions régulées que non régulées. Ceci porte à croire que la hausse saisonnière du débit serait indépendante des interventions humaines sur les écoulements.

La rivière Nelson comporte cinq barrages au fil de l’eau, totalisant une production actuelle de près de 4000 MW. D’après Westmacott et Burn (1997), les changements climatiques apporteront une diminution des débits maximaux observés pour ce bassin, particulièrement dans la portion la plus au sud. La même tendance a été observée pour les débits annuels moyens. Également, la crue printanière serait devancée due à une fonte des neiges hâtive. Westmacott et Burn (1997) ont également remarqué qu’une hausse des températures aurait un effet important sur la répartition temporelle des crues. En effet, l’analyse basée sur une chronique de 30 années de mesures de débit démontre une tendance marquée pour un devancement de la crue printanière. Cette tendance est fortement corrélée avec la hausse de température. Toutefois, il n’existe pas, à notre connaissance, d’étude publiée concernant les répercussions de ces changements importants sur la gestion des ouvrages et la production d’hydroélectricité du système hydrique de la rivière Nelson.

Provinces de l’Est

Du côté de l’Ontario, le principal producteur d’hydroélectricité, Ontario Power Generation (OPG) a commandé au cours des dernières années plusieurs études afin d’établir les effets potentiels d’un réchauffement climatique sur les débits des principaux bassins jusqu’à 2041–2070 (ex. Music et Sykes 2011). Les bassins identifiés comme prioritaires sont Nipigon, Abitibi et Matagami, sur lesquels on retrouve une puissance hydroélectrique installée de près de 1350 MW.

Les principales constatations sont une augmentation des températures, des précipitations et de l’évapotranspiration. On note également une faible diminution de la précipitation solide et une grande augmentation des précipitations liquides (Music et Sykes 2011). Cependant l’incertitude concernant la diminution des précipitations solides est élevée (± 9% pour les trois bassins) alors que la diminution prévue est de l’ordre de 5 ou 6%. Bien que les conclusions quant à la répartition temporelle soient encore très incertaines, il semble que la précipitation augmenterait en général tout au long de l’année, sauf pour les mois de juin à août. Music et Sykes (2011) anticipent également une diminution des débits estivaux (juin à octobre) et une augmentation de décembre à mars. Cependant, on souligne que ces changements anticipés pour le débit proviennent d’une analyse basée uniquement sur les modèles climatiques: 24 modèles régionaux, quatre modèles globaux et deux scénarios d’émission de gaz à effet de serre, soit A2 et A1B. Afin d’approfondir la compréhension des répercussions hydrologiques des changements climatiques, il faudra procéder à des études plus approfondies impliquant un, voire plusieurs modèles hydrologiques physiques. Ceci permettra d’obtenir un portrait plus détaillé du bilan hydrique anticipé en climat futur, mais aussi d’inclure les ouvrages de production hydroélectrique au sein même du modèle. En effet, les débits simulés par le modèle climatique représentent des débits pour un cours d’eau naturel. Tel que discuté plus haut, la plupart des observations disponibles sont en vérité nécessairement influencées par les opérations du producteur d’énergie. En outre, les points les plus sensibles quant à la disponibilité en eau pour chacun des trois bassins prioritaires devront être identifiés au préalable.

Le Québec est la province qui produit le plus d’hydroélectricité au pays, Hydro-Québec étant le plus important producteur avec une puissance installée (incluant le bassin Churchill Falls au Labrador) de 39 918 MW au 31 décembre 2010 (voir la Figure ). Les pourcentages indiqués sur la Figure indiquent la part de production d’énergie pour chaque bassin.

Figure 2 Puissance installée en hydroélectricité par Hydro-Québec (adapté de Desrochers et al. 2009).

Figure 2 Puissance installée en hydroélectricité par Hydro-Québec (adapté de Desrochers et al. 2009).

Il existe des différences importantes entre les bassins du sud (45e au 49e parallèle) de la province et ceux du milieu boréal (49e au 55e parallèle). La plupart des grands systèmes de production hydroélectrique de cette province se situent d’ailleurs dans la partie nord. Le milieu boréal se distingue par la présence importante de tourbières et de milieux humides (20 à 30% de la superficie) ainsi que de nombreux lacs et réservoirs de très grande taille. Pour le sud du Québec, ce type de milieu ne représente que 3 à 5% du territoire. (Rousseau et Jutras 2009). La taille des bassins versants y est en général plus modeste que dans la région boréale. Une exception est le bassin versant de la rivière des Outaouais, dont la superficie totale est de 146,334 km2, comparativement à environ 177,000 km2 pour le bassin versant de la Grande Rivière, incluant la dérivation partielle des eaux des rivières Caniapiscau et Eastmain ainsi que la dérivation partielle du fleuve Rupert. La température annuelle moyenne des milieux boréaux varie entre –2.5 et –5°C par rapport à 0 à 5°C pour le sud du Québec. De plus, alors que la plupart des bassins du sud du Québec possèdent une orientation géographique nord-sud, ceux du milieu boréal sont en majorité orientés est-ouest. Ces bassins possèdent un faible gradient topographique. Il est nécessaire d’adapter les modèles hydrologiques à cette spécificité afin de pouvoir ensuite étudier les répercussions potentielles des changements climatiques sur l’hydrologie de ces milieux bien particuliers. Le modèle hydrologique HYDROTEL (J.P. Fortin et al. 2001) a récemment fait l’objet de modifications dans ce sens (Rousseau et Jutras, 2009). Les autres modèles hydrologiques devront emboîter le pas éventuellement afin de rendre compte de l’effet bien particulier de ces milieux en contexte de changements climatiques. Cependant des analyses effectuées avec des modèles hydrologiques simples peuvent malgré tout fournir des indications intéressantes sur les tendances dans les régimes hydrologiques à venir. Ainsi, une analyse des impacts des changements climatiques réalisée par Ouranos sur une centaine de bassins versants québécois avec l’aide du modèle hydrologique global HSAMI (Fortin Citation2000), impliquant 80 projections climatiques tirées de 14 modèles de climat global et deux modèles régionaux de climat suggèrent que les bassins situées dans le nord de la province, là où se trouvent des aménagements hydroélectriques de grande envergure, connaîtront une hausse statistiquement significative du ruissellement annuel moyen dans l’horizon 2040–2070.

Une étude récemment réalisée par Fortier et al. (Citation2011) sur l’influence de la variabilité climatique sur le régime hydrologique d’un bassin versant régularisé pour la production hydroélectrique illustre des difficultés au départ inattendues à l’évaluation des changements climatiques sur de tels systèmes. Le barrage Matawin, dans la région de la Mauricie au Québec, a été construit en 1930 afin de retenir les eaux de fonte de neige pour ensuite alimenter des stations de production hydroélectrique situées plus bas sur la rivière St-Maurice en période hivernale. La particularité importante de ce barrage est d’avoir causé une inversion locale du régime hydrologique normal attendu en région nordique. Ainsi, conséquemment à l’emmagasinement de l’eau de fonte de la neige au printemps puis à son relâchement à l’hiver suivant, le débit maximal survient à l’hiver et le débit minimal au printemps. Fortier et al. (Citation2011) ont étudié la variabilité inter annuelle et inter décennale des crues importantes afin de distinguer l’effet du barrage des effets attribuables à l’évolution du climat, au moyen de cinq indices climatiques tels que l’oscillation Atlantic Nord (NAO), par exemple. Bien que leur étude ne parvienne pas à séparer clairement l’effet du barrage sur le régime hydrologique naturel de l’effet des changements climatiques, elle soulève au passage des questions très importantes pour les recherches futures. En effet, un changement très significatif de la durée des crues a été remarqué au cours de la période 1934–1994. La durée de ces crues a quintuplé, passant en moyenne de 5 à 28 jours. Ce changement survient vers le milieu des années 1960, au moment de la nationalisation de l’hydroélectricité en 1962. Les auteurs supposent donc que ce changement dans la durée des crues est principalement attribuable au mode de gestion du barrage, modifié afin d’accroître la production d’énergie destinée à l’exportation. Cette hypothèse est d’ailleurs supportée par la disparition de plusieurs industries locales, auparavant consommatrices d’énergie. Or, il n’a pas été possible de vérifier cette hypothèse car les données concernant la production hydroélectrique et la gestion des barrages et réservoirs sur le système du St-Maurice étaient confidentielles et inaccessibles. Ceci soulève l’épineuse question de l’accessibilité des données nécessaires au progrès scientifique, par opposition au souci tout aussi légitime d’une industrie de protéger l’information dont elle dispose dans le but de maintenir sa compétitivité. Il est à espérer que le futur permettra de solutionner ce problème afin que les recherches puissent progresser.

Nord du pays et territoires

Pour la partie nord du pays, le principal enjeu concernant les changements climatiques et la production hydroélectrique est le dégel du pergélisol car le pergélisol, dont la présence et la dynamique sont fortement influencées par le climat, contrôle l’emmagasinement et le processus de drainage et par conséquent les crues et les étiages. L’énergie hydroélectrique est la principale forme de production d’énergie au Yukon (Environnement Yukon Citation2011). Spécifiquement, les bassins les plus importants pour la production d’énergie au Yukon sont les fleuves Yukon et Mackenzie. Actuellement, il y a au Yukon 19 projets hydroélectriques potentiels pour desservir la demande croissante en énergie. Ces projets incluent de nouvelles installations et l’amélioration d’installations existantes (Environnement Yukon Citation2011).

Selon Environnement Yukon (Citation2011), la dégradation du pergélisol serait plus importante dans les zones sporadiques et discontinues. Une étude de Quinton et al. (Citation2011) sur le bassin Scotty Creek (61°18′N, 121°18′W, 285 m au-dessus niveau de la mer) abonde dans le même sens.

Pour assurer une prévision adéquate des débits et évaluer les scénarios de gestion en conséquence, Quinton et al. (Citation2011) recommandent l’amélioration des modèles de pergélisol et le couplage de ces modèles à un modèle hydrologique.

Environnement Yukon (Citation2011) soulignent quant à eux l’importance de densifier le réseau d’observations hydro-météorologiques dans le nord canadien, d’autant plus que la modification du régime de glace des rivières affectera la prise de mesure. Si la couverture spatiale est relativement bonne pour la partie nord du Canada, certains bassins ne sont toujours pas instrumentés, par exemple le bassin Peel, situé à l’extrême nord du territoire. Ce bassin, actuellement à l’état vierge, fait régulièrement l’objet d’études en vue d’un éventuel aménagement. Selon Environnement Yukon (Citation2011), les données disponibles actuellement dans le nord du pays ne sont pas exploitées à leur plein potentiel. De plus, chaque cours d’eau y est géré indépendamment, par opposition à une approche par bassin versant pour la planification de la production hydroélectrique. Notons que ce constat pourrait tout aussi bien s’appliquer aux bassins de tout le pays, pour autant que l’évaluation des impacts des changements climatiques sur l’hydrologie de ces bassins ait été préalablement effectuée. Par contre, de nombreux bassins n’ont toujours pas fait l’objet d’études d’impacts hydrologiques en lien avec les changements climatique. Pour ces bassins, il faudra d’abord réaliser ces études avant de passer à l’élaboration de stratégies d’adaptation.

Adaptation

À ce jour, les recherches se sont surtout concentrées sur l’évaluation des retombées strictement hydrologiques des changements climatiques (débits). L’étape suivante consiste à utiliser les projections hydrologiques futures pour établir les impacts sur la production hydroélectrique et proposer des stratégies d’adaptation appropriées.

Les stratégies d’adaptation peuvent être regroupées en deux grandes catégories: (1) les approches dites «structurales», suivant lesquelles des modifications physiques sont apportées aux systèmes dans le but de réduire leur vulnérabilité vis-à-vis des changements climatiques; (2) les approches non structurales, consistant à adopter des approches dites «soft», comme les modifications aux façons d’opérer les systèmes. Le Tableau , repris de DesJarlais et al. (Citation2010), résume les principaux instruments d’adaptation structuraux et non structuraux en vue de l’adaptation de la gestion des ouvrages hydrauliques à une nouvelle réalité climatique. De façon générale, mieux vaut adopter une stratégie «sans regrets», qui consiste à optimiser la gestion actuelle, que ce soit par l’acquisition de données supplémentaires, le passage à la gestion intégrée de la ressource afin de minimiser les risques de conflits d’usage et favoriser plutôt la mitigation. Ce genre d’adaptation requiert des investissements relativement modestes et ne peuvent qu’être bénéfiques à la gestion des ouvrages, peu importe le climat, alors que des approches plus invasives, comme la construction de nouveaux ouvrages et la modification d’ouvrages existants sont associées à un retour sur l’investissement comportant des risques en raison de l’incertitude sur les projections hydrologiques futures.

Tableau 2. Instruments d’adaptation des ouvrages hydrauliques aux conditions hydroclimatiques en évolution (DesJarlais et al. Citation2010).

L’élaboration de stratégies d’adaptation repose également sur l’anticipation de la demande énergétique future de la population et des industries. Un réchauffement implique d’une part la diminution de la demande énergétique attribuable au chauffage et d’autre part l’augmentation de la demande associée à la climatisation. La planification de la demande énergétique et de la production hydroélectrique à long terme se base actuellement sur un horizon qui s’étend jusqu’en 2030 (Chaumont et Desrochers 2007). La prévision de la demande est basée sur les conditions climatiques normales, à moduler selon le réchauffement anticipé.

Il existe peu d’études qui ont porté sur l’incidence des changements climatiques sur les infrastructures des systèmes hydriques voués à la production hydroélectrique. Au Canada, les travaux de Minville et al. (Citation2008, Citation2009, Citation2010a, Citation2010b) et de Haguma (Citation2013) constituent, à notre connaissance, les études les plus exhaustives sur le sujet. Les travaux de Haguma (Citation2013) ont porté sur le bassin versant de la rivière Manicouagan au Québec, un important système hydrique exclusivement voué à la production hydroélectrique et géré par Hydro-Québec (Figure ). Ont été examinées des stratégies d’adaptation non structurales, soit les modifications à la gestion des réservoirs tenant compte de la non stationnarité hydrologique, ainsi que des approches d’adaptation structurales, notamment l’ajout de groupes-turbines aux installations existantes et la revalorisation de groupes existants. Une analyse technico-économique a permis de conclure que des scénarios de revalorisation pourraient s’avérer rentables. Arsenault et al. (Citation2013) sont arrivés à des conclusions similaires dans une analyse sur le système hydrique de la rivière Péribonka au Québec.

Minville et al. (Citation2008, Citation2009, Citation2010a, Citation2010b) ont étudié des approches d’adaptation non structurales sur le système hydrique de la rivière Péribonka (Figure ), au centre sud de la province de Québec. L’eau y est exploitée exclusivement pour la production hydroélectrique par la compagnie Rio Tinto Alcan, avec une capacité installée de 1165 MW. Deux grands réservoirs en série stockent l’eau (Lac-Manouane – 2700 hm3 et Passes Dangereuses – 5200 hm3) et alimentent trois centrales hydroélectriques également disposées en série (Chute-des Passes, Chute-du-Diable et Chute-à-la-Savane). Les deux premières sont au fil de l’eau alors que la centrale ce Chute-à-la-Savane est adjacente au réservoir Passes Dangereuses. Le régime hydrologique est fortement dominé par le processus d’accumulation et de la fonte de la neige.

Figure 3 Bassin versant et système hydrique de la rivière Péribonka (Minville et al. Citation2010b – avec la permission).

Figure 3 Bassin versant et système hydrique de la rivière Péribonka (Minville et al. Citation2010b – avec la permission).

L’étude de Minville et al. (Citation2008, Citation2009, Citation2010a, Citation2010b) a porté sur des stratégies d’adaptation de type non-structurale à l’aide d’une approche classique «top-down» constituée des grandes étapes suivantes:

  • Génération de projections climatiques de température et de précipitation à l’échelle du bassin versant.

  • Élaboration de 30 projections climatiques: cinq modèles climatiques globaux (MCG) trois scénarios d’émission de gaz à effet de serre trois horizons temporels, soit 2011–2040, 2041–2070, 2071–2100.

  • Mise à l’échelle selon la méthode des Deltas (Diaz-Nieto et Wilby 2005).

  • Projection climatique de résolution spatiale plus fine, tirée du modèle régional canadien de climat (MRCC) (Caya et Laprise 1999) pour la période 1961–2099.

  • Simulation de régimes hydrologiques sous des conditions de climat actuel et projeté. Ici, les modèles HSAMI (Fortin Citation2000) et HYDROTEL (Fortin et al. 2001) ont été utilisés.

  • Génération de règles de gestion optimales des réservoirs du système hydrique. Ici, l’optimisation implique la méthode de programmation dynamique stochastique (PDS) (Turgeon Citation2005) afin d’obtenir des règles adaptées aux conditions hydrologiques.

  • Simulation et évaluation de la performance du système hydrique sous des conditions de climat actuel et projeté.

La Figure , obtenue avec le modèle HYDROTEL alimenté par la projection climatique du MRCC, indique que les changements climatiques devraient occasionner un devancement de la crue printanière, des débits hivernaux plus importants et une réduction des débits durant l’été et l’automne, les changements devenant de plus en plus importants avec l’horizon temporel choisi. Chacun des sous-bassins verrait son débit annuel moyen augmenter, l’augmentation étant plus significative dans la partie nord du bassin.

Figure 4 Hydrogrammes annuels moyens des sous bassins de la rivière Péribonka pour les horizons futurs 2010–2039, 2040–2069 et 2070–2099, comparés à la période de contrôle 1961–1990 (Minville et al. Citation2009 – avec la permission).

Figure 4 Hydrogrammes annuels moyens des sous bassins de la rivière Péribonka pour les horizons futurs 2010–2039, 2040–2069 et 2070–2099, comparés à la période de contrôle 1961–1990 (Minville et al. Citation2009 – avec la permission).

Par la suite, l’expérience concernant l’adaptation des règles de gestion des réservoirs Lac-Manouane et Passes-Dangereuses se traduit par un changement observé sur les niveaux d’eau des réservoirs. Pour Lac-Manouane, les niveaux seraient plus élevés au printemps pour toutes les périodes futures. Il s’agit d’une conséquence directe de l’augmentation des débits durant cette saison. On note par ailleurs que les niveaux d’eau durant l’été auraient tendance à diminuer dans le futur. Cette diminution serait causée par les faibles débits durant cette saison et par la nécessité de maintenir le réservoir Passes-Dangereuses, dans lequel se déverse le Réservoir Lac-Manouane, à son niveau le plus élevé pour maximiser la production hydroélectrique. Durant l’hiver, le niveau du réservoir serait plus bas dans les horizons 2040–2069 et 2070–2099 en réponse aux débits plus élevés comparativement à l’horizon 1961–1990.

La gestion des réservoirs est réalisée avec l’objectif de maximiser la production hydroélectrique. Puisque toutes les projections climatiques entraînent une hausse des apports annuels pour les trois horizons futurs, la production hydroélectrique moyenne résultante serait appelée à augmenter. A titre d’exemple, cette augmentation se situerait entre 1 à 15% durant l’horizon 2040–2069, selon les projections analysées. Par contre, si les règles de gestion courantes étaient maintenues dans le futur, la production hydroélectrique diminuerait plutôt de 1 à 14%.

Il est intéressant de noter que malgré la hausse anticipée dans la production hydroélectrique, l’efficacité des centrales, définie ici comme étant le ratio de la production hydroélectrique sur la somme de débits turbinés et déversés, diminue avec le temps pour la vaste majorité des projections climatiques analysées. Une diminution d’efficacité signifie que davantage d’eau serait nécessaire pour produire la même quantité d’énergie hydroélectrique, et atteindrait 8% pour les projections climatiques les plus défavorables. Cette diminution d’efficacité est le résultat direct d’une augmentation des débits non productibles, ou déversés, par le système.

L’augmentation de la capacité des centrales hydroélectriques existante et la révision des critères de design de nouvelles installations font partie des approches structurales en matière d’adaptation aux changements climatiques. En augmentant la capacité actuelle des centrales, il serait possible de réduire les déversements non productibles. Par contre, une telle approche serait sans doute coûteuse à mettre en place ou techniquement non réalisable si les centrales actuelles n’ont pas été conçues dans une optique d’augmentation de capacité. L’applicabilité d’une telle approche devrait être établie en comparant les coûts de construction et d’entretien des nouveaux groupes turbines-alternateurs avec les bénéfices engendrés par une production hydroélectrique accrue. Haguma (Citation2013) a examiné cette question pour conclure que la construction de nouveaux groupes turbines-alternateurs pourrait ne pas être rentable sur le système hydrique de la Manicouagan.

Les critères de dimensionnement des évacuateurs de crues et autres composantes des aménagements hydroélectriques auront à être ré-évalués pour tenir compte d’une modification des régimes hydrologiques. A ce sujet, une étude récente visant à déterminer l’évolution de la crue maximale probable (CMP) dans un climat en évolution (Beauchamp Citation2010) montre que la CMP serait touchée par les changements climatiques. L’étude, réalisée sur le bassin versant de la rivière Manicouagan au Québec, n’a pas pu établir de tendance lourde, à la hausse ou à la baisse, de ce critère hydrologique. Il faudra cependant refaire des études semblables sur d’autres bassins versants en raison de l’unicité des bassins et des conditions climatiques.

Dans Buttle et al. (Citation2004), les spécifications techniques des capacités des turbines actuellement en place sur le système de production hydroélectrique de la région des Grands Lacs en Ontario ont été exploitées pour calculer la capacité de production d’énergie en climat actuel, pour huit scénarios d’émission de gaz à effet de serre couplés à cinq modèles climatiques. Le système de production comprend cinq centrales, réparties sur les rivières St-Mary, Niagara, à la chute Niagara et pour la partie amont du fleuve St-Laurent. La région des Grands Lacs génère à elle seule un peu moins d’un tiers de la capacité hydroélectrique de l’Ontario. On anticipe pour cette région une augmentation des précipitations, toutefois surpassée par une augmentation très marquée de l’évapotranspiration. Ainsi, la plupart des scénarios analysés suggèrent une baisse du niveau des lacs et une diminution des débits pour la période 2030–2050 (Mortsch et al. 2000). Buttle et al. (Citation2004) ont constaté pour les cinq centrales une diminution de la production, plus ou moins marquée selon le scénario climatique étudié. En se basant sur le prix moyen de l’électricité post-dérèglementation calculé sur la base de sept mois de données disponibles, on estime que les pertes monétaires variables, mais pouvant atteindre jusqu’à 530 M$/an, couplé à une diminution de la capacité de production de près de la moitié, soit 1160 MW dans le pire cas, comparativement à 2150 MW en conditions actuelles. Cette étude ne comprend aucune modification des règles de gestion et repose sur plusieurs hypothèses simplificatrices, en particulier concernant la demande et le coût de l’énergie. Néanmoins, il faut savoir que la modification des règles de gestion dans le secteur des Grands Lacs est complexe puisque le lac Ontario est un plan d’eau transfrontalier dont la gestion est assujettie à une entente chapeautée par la commission mixte internationale.

Une autre étude liée aux stratégies d’adaptation pour la production hydroélectrique face aux changements climatiques est celle de Fortin et al. (Citation2007). Cette étude concerne le système du haut St-François, dans la région de l’Estrie au Québec, composé de trois barrages et voué à de multiples usages incluant, en plus de l’hydroélectricité, la gestion des crues et l’utilisation récréo-touristique (Figure ).

Figure 5 Principales composantes du système hydrique du Haut-St-François (adapté de Fortin et al. Citation2007).

Figure 5 Principales composantes du système hydrique du Haut-St-François (adapté de Fortin et al. Citation2007).

Les barrages Jules-Allard et Aylmer sont gérés par le Centre d’Expertise Hydrique du Québec, une agence du gouvernement provincial. La vocation principale de ces deux ouvrages est la protection des crues autour des Lacs St-François, Aylmer et Louise, que l’ont sait vulnérables par rapport aux inondations. Également, ces deux barrages permettent d’assurer que les niveaux de ces lacs soient adéquat pour les activités récréo-touristiques l’été et l’automne et la fraie du doré au printemps. Plus en aval, le barrage Weedon, propriété d’Hydro-Sherbrooke, a une vocation hydroélectrique, de même que les cinq autres centrales situées en aval. Le plan actuel de gestion vise à favoriser la production hydroélectrique de décembre à mars en vidant les réservoirs graduellement. Ceux-ci sont par la suite remplis au cours de la période d’avril à mai et maintenus de juin à novembre pour les besoins des activités récréatives.

Dans Fortin et al. (Citation2007), quatre indicateurs de performance liés à la sécurité, aux dommages, à la valorisation des plans d’eau et à la production ont été identifiés puis chiffrés par le biais d’une modélisation à l’aide d’HYDROTEL (Fortin Citation2000) pour les conditions climatiques actuelles (1961–1990). Dans un deuxième temps, le modèle HYDROTEL a été alimenté par six projections du climat (températures et précipitations) tirées des modèles de climat global ECHAM4, CSIRO et HadCM couplés aux scénarios A2 et B2, en conservant les règles de gestion actuelles, puis dans un troisième temps en modifiant ces règles, par exemple en devançant les dates de vidange et de remplissage des réservoirs et en modifiant les niveaux d’exploitation. Selon toutes les projections climatiques, les étiages estivaux seront plus sévères et les crues printanières seront devancées. L’expérience de Fortin et al. (Citation2007) a permis de voir que l’adaptation de la gestion des ouvrages à chacune de ces réalisations permet de maintenir trois des quatre indicateurs à des niveaux comparables à ceux de 1961–1990. L’indicateur lié à la production d’énergie ne peut toutefois être maintenu à son niveau de 1961–1990. De plus, la grande variabilité des changements au régime hydrologique engendré par chacune des réalisations climatiques ne permet pas d’identifier un scénario unique de gestion pour le futur. Par exemple, les projections climatiques ont des répercussions variables sur l’ampleur de la crue printanière, allant d’une augmentation de 15% à une diminution de 30%. La prise en compte des différentes sources d’incertitude, notamment des projections climatiques, mais aussi des méthodes de mise à l’échelle et de la structure des modèles hydrologiques sur les régimes hydrologiques constitue un enjeu scientifique qui a reçu une grande attention durant les dernières années, au Canada (ex: Khan et al. Citation2006; Chen et al. Citation2011; Haguma Citation2013) et ailleurs dans le monde (ex: Wilby et Harris 2006; Prudhomme et Davies 2009).

L’amélioration des modèles de gestion fait aussi partie de l’arsenal des stratégies d’adaptation possibles pour réduire les impacts négatifs ou pour capitaliser sur les retombées positives apportées par une modification des régimes hydrologiques. Par exemple, Côté et al. (Citation2011) ont démontré que l’utilisation de la programmation dynamique stochastique par scénarios («Sampling Stochastic Dynamic Programming») permettait d’atteindre des rendements de centrales supérieurs à l’emploi de la programmation dynamique stochastique classique, méthode habituellement recommandée et employée pour établir des règles de gestion de systèmes hydroélectriques comportant un à deux réservoirs. Une étude récemment complétée à l’Université de Sherbrooke (Haguma Citation2013) suggère que la prise en compte de la variabilité saisonnière des apports ainsi que l’incertitude sur les projections hydrologiques futures amènerait une gestion qui augmenterait la production hydroélectrique. De façon générale, une gestion adaptative, basée sur le concept d’analyse de risque et où les règles d’opération des réservoirs sont régulièrement ré-optimisées pour tenir compte de la variabilité et de l’incertitude sur les prévisions d’apports hydrologiques, offre une performance plus robuste que les approches traditionnelles de gestion et peut atténuer considérablement les impacts négatifs associés à une augmentation du stress hydrique consécutif aux changements climatiques (Georgakakos et al. Citation2012).

Conclusions

Cette revue de littérature avait pour principal objectif de faire le point sur l’avancement des connaissances en ce qui a trait aux répercussions anticipées des changements climatiques pour la production d’hydroélectricité au Canada. Cette production représente une des sources d’énergie les plus importantes à l’échelle du pays, que ce soit pour la population ou pour les industries. On constate que le nombre de publications et l’état des connaissances varie fortement d’une province et d’un territoire à l’autre. Cela reflète directement la place occupée par l’hydroélectricité au sein des différentes sources d’énergie pour chaque région du pays. Ainsi, c’est au Québec que l’on retrouve le plus grand nombre d’études de cas concernant les changements climatiques et la production hydroélectrique. C’est également dans cette province que l’on retrouve le plus d’expériences réalisées en termes de stratégies d’adaptation pour la gestion des ouvrages face aux changements climatiques. Pour les autres provinces, la plupart des études réalisées à ce jour pour les bassins versants impliqués dans la production d’hydroélectricité sont au stade de l’évaluation des répercussions strictement hydrologiques. À cet effet, le constat général se résume à une fonte printanière devancée, parfois de moindre ampleur (diminution des débits printaniers), couplés à une augmentation des débits hivernaux attribuable à une augmentation du nombre d’événements pluvieux en hiver. On observe également pour plusieurs bassins des étiages hivernaux plus sévères, en raison de l’augmentation de l’évapotranspiration.

À la lumière des études de cas portant sur l’adaptation des règles de gestion, il convient dans un premier temps de mettre l’emphase sur le caractère non-général de ces études. Alors que les travaux de Minville et al. (Citation2010a, Citation2010b) sur la rivière Péribonka suggèrent que les changements climatiques pourraient permettre une augmentation de la production d’hydroélectricité à condition d’adopter un plan de gestion approprié, l’étude de Buttle et al. (Citation2004) suggère que pour le système des Grands Lacs, dont le niveau fortement tributaire de l’évapotranspiration, verra sa production diminuée dans le futur. Également, dans l’étude de Fortin et al. (Citation2007) sur le système du Haut St-François, si on parvient à un compromis acceptable de façon générale entre les différents usages de l’eau, on constate toutefois l’impossibilité de formuler des recommandations générales d’adaptation pour tous les scénarios, ceux-ci présentant des différences très marquées.

Il ressort de cette revue de littérature que l’analyse de stratégies d’adaptation aux changements climatiques passe obligatoirement par une analyse multi-critères. Les travaux futurs devront en effet inclure les aspects économiques, mais également politiques, sociaux et environnementaux dans la balance (Webster et al. Citation2008). De plus, on constate que d’avantage d’études de cas sont requises, en particulier pour des bassins hors Québec, puisque l’élaboration de stratégie de gestion des ouvrages doit s’effectuer au cas par cas.

En pratiquant une gestion adaptative, c’est-à-dire en actualisant les règles de gestion sur une base régulière (par exemple chaque année) qui tienne compte de l’historique des apports, certains producteurs pourraient peut-être capitaliser sur d’éventuelles retombées positives qu’engendreraient les changements climatiques sur les régimes hydriques (ex. Minville et al. Citation2010a, Citation2010b).

Par ailleurs, l’expérience de Fortier et al. (Citation2011) indique qu’il y a lieu d’insister sur l’importance de la collaboration et sur le partage des données entre les chercheurs et les différentes institutions gouvernementales et privées. Les chercheurs n’ayant pas pu accéder aux données requises n’ont pu vérifier leurs hypothèses ni pousser plus loin leur analyse. Une collaboration accrue de la part des milieux industriel et gouvernemental ne peut qu’être bénéfique pour l’avancement de la science et profitera du même coup à l’ensemble de l’industrie.

Remerciements

Les auteurs remercient Marie Minville pour avoir accepté de fournir les fichiers originaux correspondant aux figures 3 et 4, ce qui a rendu possible leur publication dans le présent article. Nous sommes remercions également Richard Turcotte et Biljana Music pour leur aide et leur collaboration précieuse.

Notes

Affiliation du membre – membres de l’ACRH

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