Abstract
Bingo allows us to look at long-term care centers in Quebec, and to understand some of the expectations, constraints, and aspirations around which life is organized. The study provides a socio-anthropological analysis of this recreational activity. Based on an ethnographic investigation conducted in two centers, the authors examine the framework in which the game unfolds and describe its unfolding and the interactions between residents and volunteers. They seek to understand how this game fits within life in a center, how it adapts to and complies with the norms and the operation of these facilities, and how it is a kind of metasocial commentary of life in a center.
Le bingo permet de jeter un regard sur les centres d’hébergement et de soins de longue durée au Québec, et de comprendre quelques-unes des attentes, contraintes et aspirations autour desquelles la vie s’y organise. Notre étude propose une analyse socio-anthropologique de ce loisir. Sur la base d’une enquête ethnographique réalisée dans deux centres d’hébergement, nous examinons le cadre à l’intérieur duquel se déroule le jeu et décrivons son déroulement et les interactions entretenues entre les résidents et les bénévoles. Nous cherchons à comprendre comment ce jeu s’insère dans la vie en hébergement, de quelle manière il s’ajuste et répond aux normes et au fonctionnement de ces centres, et en quoi il est une forme de dédoublement de la vie en hébergement.
Keywords:
Mots clés :
Financement
La réalisation de cette recherche a été supportée par les Fonds de recherche du Québec - Société et culture [numéro de projet: 2015-AN-185800
Notes
1. Le CHSLD correspond à ce qu’on appelle en France un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et aux États-Unis un nursing home. On compte 202 centres au Québec, hébergeant plus de 37 000 personnes.
2. Dans l’un des deux centres étudiés, il y a encore des chambres doubles.
3. Avec les politiques de maintien à domicile des personnes âgées et le resserrement des normes d’admission, les centres hébergent des personnes dont les incapacités sont de plus en plus importantes (Lavoie, Guberman, et Marier, Citation2014). Les individus y résident de moins en moins longtemps et meurent plus rapidement qu’autrefois, ce qui transforme les liens avec le personnel et les autres résidents en réduisant la durée. En 2013, la durée de séjour moyen était de 830 jours (Commission, Citation2013).
4. Les centres ont été sélectionnées sur la base de trois critères : (1) leur taille (un centre de grande taille, plus de 200 lits, et un centre de taille moyenne d’environ 140 lits); (2) leur mission et leur clientèle (deux établissements publics comparables ayant les mêmes critères d’admission et la même offre de services); et (3) la commodité (ils sont situés dans la ville où résident les chercheurs). Ils ne constituent pas un échantillon représentatif des centres d’hébergement au Canada. Exploratoire, l’étude visait l’examen approfondi de certaines pratiques, dont les jeux et les rituels collectifs.
5. La direction de l’établissement, le personnel et les bénévoles étaient informés du fait que nous menions une recherche. En accord avec le comité d’éthique, nous informions les résidents que nous étions observateur et chercheur lorsqu’ils étaient en mesure de nous comprendre.
6. Notre étude se démarque des recherches antérieures sur le bingo ou les loisirs des ainés, menées par questionnaires ou entrevues, centrées sur les origines sociales des joueurs et sur leurs motivations et intérêt pour le jeu (Diwey, Citation1987; O’Brian Cousins et Witcher, Citation2004, Citation2007). À notre connaissance, trois études (Diwey, Citation1987; Maclure et al., Citation2006; Mann, Citation2003) fondent en partie leurs conclusions sur l’observation du jeu. Mais leurs analyses n’approfondissent pas les aspects qui nous intéressent ici.
7. Ce nombre représente environ le cinquième des résidents. Ce sont essentiellement toujours les mêmes.
8. Seule l’animatrice (une technicienne en loisirs) fait partie du personnel salarié. Le nombre de bénévoles varie entre 5 et 10, auxquels s’ajoutent des membres de familles qui assistent leur proche. Pour la plupart à la retraite, les bénévoles donnent entre 5 et 20 heures de leur temps par semaine.
9. Sur les trois dimensions de l’expérience subjective du temps, mémoire (passé), attention (présent) et attente (futur), voir la lecture d’Augustin par Paul Ricœur (Citation1983).
10. Ce passage s’inspire de l’analyse du jeu esquissée par Lévi-Strauss dans La pensée sauvage (Citation1962, pp. 44–47). Il en reprend les principales catégories : ordre et événement, communion et compétition.
11. C’est par l’application de règles et l’adoption de conduites que ce commentaire est fait, et non au moyen de mots et par un discours.