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Hydroscience Journal
Volume 108, 2022 - Issue 1
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Special Section: Hydrometrie 2021

Crue du 23 novembre 2019 sur la Côte d’Azur : comparaison de débits estimés par analyse d’images et par modélisation hydrologique

Flood of 23 November 2019 on the French Riviera: a comparison of discharges estimated by image analysis and hydrological modelling

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Article: 2101391 | Published online: 30 Aug 2022

RÉSUMÉ

Les précipitations courtes et violentes observées sur la Côte d’Azur conduisent souvent à des crues-éclairs sur les bassins versants côtiers : lors de la crue du 2 octobre 2015, un débit de pointe compris entre 185 et 295 m3/s a été estimé sur la Brague à Biot vers 20h00, alors que le débit y était d’environ 1 m3/s à 17h30 . Si les mesures de tel débits sont très importantes (pour l’analyse statistique des crues, la modélisation des crues, la conception d’ouvrages hydrauliques), elles sont dangereuses lorsqu’elles nécessitent qu’un opérateur manipule un instrument dans ou à proximité de la rivière. Des méthodes alternatives peuvent être utilisées, comme l’analyse de vidéo. Dans ce travail, nous avons appliqué deux algorithmes différents de vélocimétrie d’images (LSPIV) (Fudaa-LSPIV et OpyFlow) à plusieurs vidéos des inondations du 23 novembre 2019 sur le bassin versant de la Brague, afin d’estimer les débits. Les valeurs de débit obtenues sont ensuite comparées aux débits mesurés, ainsi qu’aux résultats de la modélisation pluie-débit sur les mêmes sections. Les estimations LSPIV, les simulations de débits et les observations sont cohérentes sur les sections étudiées, montrant l’intérêt de combiner des techniques aussi différentes et indépendantes pour estimer les valeurs de débit de crue.

ABSTRACT

The short and heavy rainfall events observed on the French Riviera often lead to flash floods on coastal catchments: during the flood of 2 October 2015, a peak discharge between 185 and 295 m3/s was estimated on the Brague at Biot at 8:00 PM, whereas the flow rate was about 1 m3/s at 5:30 PM there. While measurements of such discharges are very important (for statistical flood analysis, flood modelling, design of hydraulic structures), they are dangerous when they require an operator to handle an instrument in or near the river. Alternative methods can be used, such as video analysis. In this work, we applied two different image velocimetry (LSPIV) algorithms (Fudaa-LSPIV and OpyFlow) to several videos of the 23 November 2019 floods within the Brague catchment, in order to estimate discharge values. The discharge values obtained were then compared with the values observed on the available gauging stations, as well as to the results of rainfall-runoff modelling on the same sections. The LSPIV estimates, discharge simulations and observations are consistent across the studied sections, showing the interest of combining such different and independent techniques to estimate flood discharge values.

1. Introduction

Les pluies intenses observées sur les bassins versants côtiers de la Côte d’Azur peuvent provoquer des crues-éclairs particulièrement violentes. Lors de la crue historique du 2 octobre 2015, le débit de la Brague à Biot (Alpes-Maritimes) est ainsi passé d’environ 1 m3/s à 17h30 à un débit de pointe estimé entre 185 et 295 m3/s entre 19h30 et 20h00 (Lebouc & Payrastre, Citation2017). La mesure de ces débits de crue est dangereuse, difficile et incertaine : les stations hydrométriques peuvent être endommagées (cela a été le cas lors de la crue d’octobre 2015 sur la Brague), les débits observés peuvent être supérieurs aux débits jaugés les plus forts, etc. L’estimation de débits de pointe est pourtant capitale pour l’analyse a posteriori des crues observées, leur analyse statistique, et leur utilisation opérationnelle dans différents contextes tels que le dimensionnement de structures hydrauliques. Dans ce contexte, l’utilisation d’images prises en rivière lors des crues est particulièrement intéressante, puisqu’il est possible, grâce à des traitements de séquences d’images comme la LSPIV (Large Particle Image Velocimetry, Fujita et al., Citation1998), d’estimer des champs de vitesses moyennes de l’eau en surface, puis d’estimer un débit en extrapolant ces vitesses sur une section mouillée.

Le 23 novembre 2019, un épisode pluvieux significatif a généré une crue sur le bassin de la Brague (Brigode et al., Citation2021). Lors de cette crue, plusieurs auteurs de cet article ont filmé différentes sections de la Brague et d’un de ses affluents (la Valmasque), avec l’objectif d’utiliser ces images pour estimer des valeurs de débits instantanés. Le premier objectif de cet article est de présenter les données acquises et les débits estimés à partir de deux logiciels, le logiciel libre Fudaa-LSPIV (Le Coz et al., Citation2014), co-développé par EDF et INRAE et du logiciel open-source OpyFlow (Rousseau, Citation2019). Le second objectif est de comparer les valeurs de débit obtenues par analyse d’images avec des débits obtenus par modélisation hydrologique sur les mêmes bassins versants et sections, afin de discuter de la pertinence des valeurs de débit obtenues.

2. Données

Cette section vise à présenter l’ensemble des données utilisées pour l’estimation des débits par LSPIV (modèles numériques de terrain et de surface utilisés pour la constitution de profils en travers et vidéos) et pour la modélisation pluie-débit (modèles numériques de terrain utilisés pour la délimitation de bassins versants et de réseaux hydrographiques, précipitation). Les débits observés disponibles sur la Brague à Biot sont également présentés et seront utilisés pour la validation des estimations de débits par LSPIV et modélisation pluie-débit. L’ensemble des données utilisées est présenté sur la .

Figure 1. (a) Extraits de la vidéo prise sur la Valmasque le 23 novembre 2019 à 13h19. (b) Extraits de la vidéo prise sur la Brague le 23 novembre 2019 à 13h05. Sur ces deux extraits (a) et (b), les points rouges montrent les GRPs ; (c) MNS et (d) Ortho-photographies obtenus par photogrammétrie par drone sur la Valmasque ; et (e)(f) la Brague ; (g) et (h) Profils topographiques à travers les cours d’eau, extraits des MNS et hauteurs d’eau observées sur les extraits vidéos (a) et (b) au droit des sections étudiées ; (i) MNT de l’IGN, contours des bassins versants aux exutoires étudiés ainsi que la position des pluviomètres ; et (j) cumul de précipitation ANTILOPE sur la zone d’étude, avec position et contours des bassins versants.

Figure 1. (a) Extraits de la vidéo prise sur la Valmasque le 23 novembre 2019 à 13h19. (b) Extraits de la vidéo prise sur la Brague le 23 novembre 2019 à 13h05. Sur ces deux extraits (a) et (b), les points rouges montrent les GRPs ; (c) MNS et (d) Ortho-photographies obtenus par photogrammétrie par drone sur la Valmasque ; et (e)(f) la Brague ; (g) et (h) Profils topographiques à travers les cours d’eau, extraits des MNS et hauteurs d’eau observées sur les extraits vidéos (a) et (b) au droit des sections étudiées ; (i) MNT de l’IGN, contours des bassins versants aux exutoires étudiés ainsi que la position des pluviomètres ; et (j) cumul de précipitation ANTILOPE sur la zone d’étude, avec position et contours des bassins versants.

2.1. Zone d’étude

Le bassin versant de la Brague est un bassin versant côtier de la Côte d’Azur (Alpes-Maritimes), drainant 72 km2, avec plusieurs affluents notoires dont la Valmasque (). Ce bassin est sujet à des crues-éclairs importantes, pouvant avoir des conséquences significatives, notamment liées à l’urbanisation de sa partie aval (communes de Biot et Antibes). Dans cette étude, deux sous-bassins versants de la Brague sont étudiés : la Brague à Biot (noté Brague@Biot par la suite), sous-bassin versant de 42 km2, et la Valmasque à Sophia-Antipolis (noté Valmasque@Sophia par la suite), sous-bassin versant de 10 km2. Ces bassins et leurs exutoires sont représentés sur les . La donne les surfaces et la position des exutoires de ces deux sous-bassins versants.

Tableau 1. Position des exutoires d’intérêts (X, Y en Lambert 93) et surfaces des bassins versants associés.

2.2. Modèle numérique de terrain et de surface

Deux types de données altimétriques ont été utilisés dans cette étude. D’une part, le Modèle Numérique de Terrain (MNT) de l’IGN disponible à 5 m de résolution sur l’ensemble du département (IGN, Citation2018) a été utilisé pour la modélisation hydrologique à l’échelle du bassin versant. D’autre part, des Modèles Numériques de Surface (MNS) ont été construits au droit des deux sections étudiées par des techniques de photogrammétrie (Structure from Motion). Pour cela, des images optiques ont été acquises par drone en 2020, en période de basses eaux, et ont été traitées à l’aide d’un logiciel de photogrammétrie (3DF Zephyr) pour créer un MNS () et une orthophotographie pour chaque section (). Ces deux MNS ont été créés à la résolution de 5 cm pour la Brague et de 13 cm pour la Valmasque. Ils ont été utilisés pour extraire des transects topographiques et estimer les sections mouillées utilisées pour l’estimation de débits par LSPIV ().

2.3. Précipitation

Les lames d’eau de la base de données “ANTILOPE J + 1” de Météo-France ont été utilisées pour la modélisation pluie-débit et la modélisation hydraulique. Cette réanalyse est disponible 24 heures après chaque événement et est construite à partir des pluies estimées par analyse des réfléctivités radars, corrigées avec les données des pluviomètres de Météo-France (Laurantin, Citation2008). Deux pluviomètres de Météo-France sont situés sur le bassin de la Brague (à Antibes et à Valbonne), ils sont représentés en bleu sur la . En plus de ces deux pluviomètres, d’autres pluviomètres ont été récemment installés à Sophia-Antipolis sur les toits de l’école d’ingénieurs Polytech Nice Sophia (losange rouge ) et du laboratoire Géoazur (losange orange ). Brigode et al. (Citation2021) ont comparé les cumuls de précipitation du 23/11/2019 (entre 4 h et 23 h) sur ces différents pluviomètres avec les valeurs de lame d’eau des pixels ANTILOPE correspondants, et ont montré que les cumuls sont cohérents.

Une série continue de cartes de précipitations est ainsi extraite sur l’ensemble du bassin versant du 22 novembre 2019 à 00h00 au 25 novembre 2019 à 00h00, au pas de temps de 15 minutes, avec une résolution de 1 km2. Les cumuls de précipitations ANTILOPE sont illustrés sur la , et montrent des cumuls de plus de 200 mm sur le bassin versant de la Brague et jusqu’à 200 mm sur le bassin de la Valmasque.

2.4. Vidéos

Plusieurs vidéos ont été enregistrées par les auteurs lors de la crue du 23 novembre 2019 sur la Brague@Biot et sur la Valmasque@Sophia. Ces vidéos, de qualité différente, représentent la surface de l’eau et les matériaux transportés en surface lors de la crue.

2.4.1. Vidéos utilisées pour Fuuda-LSPIV

Avec le logiciel Fudaa-LSPIV (décrit dans la sous-section 3.1.1), deux vidéos ont été traitées pour chaque tronçon étudié. Ces deux vidéos ont été capturées le 23 novembre 2019 à 13h19 et 13h20 pour la Valmasque@Sophia et le même jour à 13h05 et 13h29 pour la Brague@Biot. L montrent un extrait de certaines de ces vidéos.

2.4.2. Vidéos utilisées pour OpyFlow

Deux vidéos supplémentaires, de moins bonne qualité, ont été analysées uniquement avec le logiciel OpyFlow (décrit dans la sous-section 3.1.2) pour la Brague@Biot. La première vidéo prise a été enregistrée le 23 novembre 2019 à 14h15 et la seconde vidéo à 14h27. La moindre qualité de ces vidéos ne nous a pas permis de les exploiter avec Fudaa-LSPIV

2.5. Débits observés

Les hauteurs d’eau et les débits de la Brague@Biot sont mesurés et estimés grâce à une station hydrométrique exploitée par la DREAL PACA (http://www.hydro.eaufrance.fr/). Le code HYDRO de la station et ses coordonnées sont indiqués dans la . Ces débits « observés » ont été calculés à partir des observations de hauteur d’eau au droit de la station limnimétrique sur la Brague au plan Saint-Jean (à Biot) et d’une courbe de tarage qui donne la relation hauteur d’eau-débit. Le débit maximal jaugé sur la Brague@Biot pour la construction de la courbe de tarage est 40 m3/s (ligne pointillée verte sur la partie inférieure de la ). Au-delà de ce débit maximal jaugé les débits sont obtenus par extrapolation de la courbe de tarage. Le 23 novembre 2019, le débit maximal estimé à la station limnimétrique est de 147 m3/s à 13h45. Les débits calculés à la station limnimétrique sur la Brague pendant l’épisode du 23 novembre 2019 sont illustrés en noir sur la partie inférieure de la . Aucune station hydrométrique n’était opérationnelle sur l’affluent de la Valmasque au cours du mois de novembre 2019. Néanmoins, le débit de pointe sur la Valmasque pour l’événement a été estimé à environ 50 m3/s par une analyse post-crue (DDTM 06, Citation2020). Cette estimation a été obtenue à partir de la hauteur des laisses de crues et en connaissant le débit qui engendre des débordements sur certaines sections de la Valmasque et de la Brague.

Figure 2. Débits simulés avec le modèle KLEM en considérant une valeur de CN égale à 75, une vitesse sur les versant égale à 0.5 m/s et une vitesse en rivière égale à 2 m/s, et estimés par LSPIV.

Figure 2. Débits simulés avec le modèle KLEM en considérant une valeur de CN égale à 75, une vitesse sur les versant égale à 0.5 m/s et une vitesse en rivière égale à 2 m/s, et estimés par LSPIV.

3. Méthodologie et modèles

L’objectif de cette étude est de déterminer les débits ayant transité lors de la crue du 23 novembre 2019 au droit de deux sections particulières. Premièrement, des débits seront estimés à partir des vidéos de la crue disponibles sur ces deux sections. Deuxièmement, un modèle pluie-débit sera mis en place afin de simuler des séries continues de débit pour cette crue et les deux sections étudiées. Enfin, les débits estimés avec ces deux techniques seront comparés avec les débits calculés à la station limnimétrique sur la Brague au plan Saint Jean. Les sections suivantes décrivent les méthodes utilisées pour l’analyse des vidéos et le modèle hydrologique utilisé.

3.1. Algorithmes de LSPIV

3.1.1. Fudaa-LSPIV

Fudaa-LSPIV est un logiciel co-développé par INRAE et EDF permettant le traitement de séquences d’images d’écoulement afin d’estimer les champs de vitesse de surface, ainsi que les débits transitant à travers des sections de rivière. Fudaa-LSPIV est utilisé en hydrométrie opérationnelle, pour des campagnes de jaugeage (Dramais et al., Citation2011 ; Jodeau et al., Citation2008) et des stations automatisées (jaugeage des crues, Le Coz et al., Citation2010 ; Hauet, Citation2016), et l’analyse de vidéo post-crue (Le Boursicaud et al., Citation2016 ; Le Coz et al., Citation2016).

3.1.1.1. Orthorectification

Les vidéos doivent être en premier lieu orthorectifiées. Lors de cette première étape d’orthorectification, une distorsion est appliquée aux images afin de supprimer les effets de perspectives. Pour cela, la présence de points de référence GRP (Ground Reference Points) facilement identifiables sur chaque image est nécessaire. Ces points, identifiés par des points rouges sur les vidéos () sont ensuite reconnus dans les orthophotographies géoréférencées (). Leurs coordonnées (X, Y) sont calculées et leur altitude (Z) extraite des MNS correspondants (). Ces coordonnées sont ensuite saisies dans le logiciel pour géoréférencer et orthorectifier les séquences d’images.

3.1.1.2. Estimation des vitesses de surface

L’estimation des vitesses de surface est réalisée par PIV (Particle Image Velocimetry). En utilisant le mouvement des traceurs (naturels ou ajoutés) présents à la surface de l’eau, le logiciel calcule les vitesses de surface par analyse de corrélation entre les différentes images disponibles sur une grille prédéfinie (Jodeau et al., Citation2019).

3.1.1.3. Estimation du débit

En connaissant les vitesses de surface et le profil bathymétrique d’une section de rivière, il est possible de calculer le débit en utilisant la méthode de la section médiane en chaque point du profil (Rantz et al., Citation1982). Pour le calcul du débit, il faut d’abord estimer un coefficient permettant de transformer une vitesse de surface en vitesse moyenne sur la colonne d’eau. Ce coefficient (α) dépend du type de fond de la rivière et du type d’écoulement. Pour un écoulement relativement uniforme, ce coefficient varie typiquement entre 0.75 et 0.95, avec une valeur moyenne de 0.85. Cela dépend principalement du rapport entre la profondeur et la hauteur de la rugosité du fond. Le Coz et al. (Citation2010), Dramais et al. (Citation2014), Welber et al. (Citation2016) et Hauet et al. (Citation2018) donnent des exemples de coefficients. Dans notre étude, 3 valeurs de coefficients ont été utilisées pour tester la sensibilité du résultat à ce coefficient (0.80, 0.90 et 1.0).

3.1.2. Algorithme OpyFlow

Les vitesses de surface libre sur la Brague@Biot ont également été estimées à partir d’une librairie Python Open Source appelée OpyFlow, permettant d’estimer des vitesses à partir de vidéos (Rousseau, Citation2019). Comme Fudaa-LSPIV, OpyFlow permet de stabiliser et d’orthorectifier les images. La technique de vélocimétrie est cependant différente, car OpyFlow permet de filtrer en amont des motifs de qualité suffisante pour la mesure de vitesses (Shi, Citation1994). Les vitesses des motifs (flot optique local) peuvent alors être estimées avec précision et minimisant l’incertitude (Miozzi et al., Citation2008). L’accumulation des vitesses locales au cours de la vidéo constitue un nuage de point sur lequel une interpolation spatiale permet d’aboutir à des vitesses moyennées sur des transects. Cette alternative permet d’améliorer à la fois l’efficacité et la précision sur les estimations de vitesse (voir les annexes C & F de Rousseau (Citation2019) pour plus de détails sur les procédures). L’algorithme ainsi qu’une application sur les vidéos de la Brague@Biot est à disposition sur un dépôt GitHub (https://github.com/groussea/opyflow).

3.2. Modèle pluie-débit

Pour cette étude, le modèle événementiel semi-distribué KLEM (Kinematic Local Excess Model, Borga et al., Citation2007) a été utilisé. Ce modèle est un couplage entre la fonction de production SCS-CN (SCS, Citation1956) et une fonction de transfert basée sur des hydrogrammes unitaires simplifiés. Il peut être appliqué à des bassins non jaugés comme celui de la Valmasque, car ne nécessite pas de données de débits pour caler les paramètres. Les données d’entrée sont les précipitations des sous-bassins versants étudiés et la position de l’exutoire. Les hypothèses à fixer sont le paramètre Curve Number (CN) de chaque sous-bassin versant et la vitesse de ruissellement sur les versants et en rivière.

Le paramètre CN (sans unité) reflète la capacité d’infiltration du bassin versant étudié (fonction du type de sol, de l’occupation des sols, des pluies antécédentes, etc.). Le CN varie entre 30 et 100 [-] : un bassin versant caractérisé par un CN de 100 est un bassin versant n’ayant aucune capacité d’infiltration (pluie nette = pluie brute), alors qu’un bassin versant caractérisé par un CN de 30 est un bassin avec une très grande capacité d’infiltration (pluie nette ≪ pluie brute). La sortie du modèle KLEM est une série temporelle de débit à l’exutoire étudié au pas de temps 15 minutes (conditionné par le pas de temps des données de précipitations utilisées en entrée du modèle pluie-débit).

3.2.1. Description du modèle

Le SCS (Soil Conservation Service) a développé une formule empirique pour déterminer la proportion de pluie qui participera au ruissellement (pluie nette) à partir de la pluie totale sur une zone (pluie brute). Lorsque la pluie tombe sur un bassin, un volume est d’abord absorbé par le sol (Ia). Ce n’est qu’une fois que ce volume a été intercepté par le sol qu’une partie de l’eau commence à s’écouler (q) vers la surface. Cette partie des précipitations évolue dans le temps. La pluie nette qui va ruisseler est déterminée à partir de la pluie brute grâce aux formules (1) :

(1) q=0 for P<Iaq=(PI a)2(PI a+S) for PIa(1)

Avec q la pluie nette en mm, P les précipitations brutes en mm, Ia l’absorption initiale en mm et S le stockage dans le sol en mm. La capacité de stockage du sol (S) est donnée par la formule (2) :

(2) S=254100CN1(2)

Cette capacité de stockage ne dépend que du Curve Number. Enfin, le paramètre d’infiltration peut être fixé à :

(3) Ia=0.2×S(3)

Une fois la pluie nette calculée, il reste à déterminer son transfert dans le bassin versant et les débits qui seront estimés à l’exutoire. Dans le modèle KLEM, le débit à l’exutoire est traduit par la formule (4) :

(4) Qt=AqtτX,Xdx,τx=Lh(x)vh+Lc(x)vc(4)

Avec Q(t) le débit à l’exutoire à l’instant t en m3/s, q(t, x) le pluie nette à l’instant t à la position x en mm, τ(x) le temps de transfert de x à l’exutoire en s, A la surface du bassin versant en km2, Lh la distance parcourue sur les versants en m, vh la vitesse de ruissellement sur les versants en m/s, Lc la distance parcourue en rivière en m et vc la vitesse de ruissellement en rivière en m/s.

La proportion d’eau précipitée qui va ruisseler sur chaque maille du bassin versant est connue à chaque instant q (t, x). Cette eau va parcourir, a fortiori, une distance sur les versants (Lh) à une vitesse vh et une distance en rivière (Lc) à une vitesse vc jusqu’à l’exutoire. A chaque maille est donc attribué un temps de transfert (τ(x)) jusqu’à l’exutoire. A l’exutoire, la quantité d’eau qui sera observée au bout d’une certaine période est la somme des volumes d’eau qui ont transité dans ce bassin pendant cette durée.

3.2.2. Mise en place du modèle et valeurs des paramètres

Des simulations de débit de la Brague@Biot et de la Valmasque@Sophia ont été réalisées au pas de temps 15 minutes à partir des précipitations ANTILOPE et à l’aide du modèle KLEM avec une hypothèse de CN allant de 40 à 100 et des vitesses sur les versants égales à 0.1, 0.5, et 1 m/s et des vitesses en rivière égales à 1, 2 and 5 m/s (non montrées ici). Finalement, la vitesse d’écoulement sur les versants est fixée à 0.5 m/s et la vitesse d’écoulement en rivière est fixée à 2 m/s. Ces hypothèses ont été choisies sur la base de l’étude de Borga et al. (Citation2007) et de l’application récente de ce modèle sur plusieurs bassins versants français de la Côte d’Azur (dont celui de la Brague) pour les crues de 2015 et 2019 (Brigode et al., Citation2021). Les contours des sous-bassins versants ont été délimités à partir du MNT grâce aux fonctions TauDEM (https://hydrology.usu.edu/taudem/). Les contours résultants sont présentés sur en pour les deux exutoires considérés. Les contours des sous-bassins versants sont utilisés pour calculer les précipitations sur chaque sous-bassin.

4. Résultats

4.1. Modélisations pluie-débit

La pluie brute observée sur le bassin versant de la Brague lors de l’épisode du 23 novembre 2019 est illustrée en bleu sur la . Cet épisode s’étale sur une période assez longue, avec des précipitations réparties en deux pics : un premier pic le vendredi soir, puis à nouveau de la pluie toute la journée du samedi, avec un pic en milieu de journée un peu plus marqué pour le bassin de la Valmasque. Les débits simulés avec une hypothèse de CN égale à 75 et des vitesses sur les versants et en rivière respectivement de 0.5 m/s et 2 m/s sont ceux se rapprochant le plus des débits observés à la station sur la Brague à Biot. La même hypothèse a été retenue pour le bassin versant de la Brague et pour l’affluent de la Valmasque, pour lequel le débit de pointe simulé avec cette hypothèse est supérieur aux 50 m3/s comme estimé par la DDTM 06 sur cette section.

4.2. Estimations de débits par analyse d’images

L’analyse d’image des vidéos de la Brague@Biot permet d’estimer le débit à 94 ± 10 m3/s le samedi (23 novembre 2019) à 13h05 et à 140 ± 15 m3/s le samedi à 13h29. Sur la Valmasque@Sophia, l’analyse vidéo donne un débit de 39 ± 4 m3/s le samedi à 13h19 et de 33 ± 4 m3/s le samedi à 13h20. Ces estimations ont été réalisées en utilisant un coefficient de vitesse de 0.9, et l’intervalle de confiance correspond aux débits estimés avec un coefficient de vitesse de α = 0.9 ± 0.1. Les débits estimés sont illustrés en orange sur la . OpyFlow a ensuite été utilisé sur deux vidéos sur le bassin versant de la Brague@Biot. La montre des visualisations 3D des vitesses collectées à partir des deux vidéos considérées, et la montre la projection du nuage de points de suivi des caractéristiques. Le débit a été estimé à 101.7 ± 20 m3/s le 23 novembre 2019 entre 14h15 et 14h27. Comme pour Fudaa-LSPIV, les incertitudes ont été estimées en utilisant un coefficient de vitesse α = 0.9 ± 0.1, ce qui est en accord avec les grands débits de submersion, et avec une incertitude sur la position de la surface égale à Δh = 0.2 m. Le débit observé à la station limnimétrique sur la Brague pendant cet intervalle de temps est d’environ 120 m3/s.

Figure 3. Validation croisée des estimations de vitesses de surface estimées par OpyFlow sur la Brague@Biot depuis le pont à l’aval (a) et celui à l’amont (b). (c) Vélocimétrie estimée à partir de la combinaison des deux images. (d) Vitesse de surface et bathymétrie estimée sur l’axe Y.

Figure 3. Validation croisée des estimations de vitesses de surface estimées par OpyFlow sur la Brague@Biot depuis le pont à l’aval (a) et celui à l’amont (b). (c) Vélocimétrie estimée à partir de la combinaison des deux images. (d) Vitesse de surface et bathymétrie estimée sur l’axe Y.

4.3. Comparaison entre les estimations de débits

Sur la , les débits simulés sur le bassin versant du Brague@Biot par le modèle pluie-débit sont proches des observations, tant en termes de dynamique que de valeur maximale, le pic de crue n’est décalé que de quelques minutes et la valeur du débit maximal simulé (154 m3/s) est supérieure de 4,5% au pic observé (147 m3/s). Les estimations de débit par analyse vidéo sont très satisfaisantes, puisque l’on constate que les débits observés sur le Brague@Biot (en noir) recoupent les barres verticales en orange représentant les valeurs de débit estimées par analyse d’image.

Les résultats sur le bassin versant de la Valmasque@Sophia sont un peu moins satisfaisants : la chronique des débits simulés par la modélisation pluie-débit donne un débit de pointe à 58 m3/s ce qui est bien supérieur 50 m3/s comme estimé par la DDTM 06. Les débits simulés se superposent aux intervalles de débit estimés par analyse d’images. Les deux vidéos disponibles sur la Valmasque ont été prises presque au même moment, les estimations vidéo ont été réalisées de la même manière et avec la même méthode (mêmes GRP, même transect) : malgré cela, les estimations LSPIV ne sont pas identiques.

5. Discussion

En ce qui concerne les estimations des débits réalisées par analyse d’images, nous avons utilisé la bathymétrie des transects extraits du MNS obtenu par photogrammétrie par drone, mais par définition le MNS donne l’élévation de la surface avec la végétation et non le terrain. Sur nos transects, nous avons considéré la surface au-dessus de la végétation, or, comme cela est visible sur l’ortophotographie () et sur les vidéos, la végétation est assez dense sur les berges de la Valmasque, ce qui peut influencer l’écoulement sur les berges. En ne prenant pas en compte ces écoulements et en prenant la surface de la végétation comme fond du transect, on peut sous-estimer le débit qui traverse le tronçon. De plus, il y a peu de traceurs sur les vidéos des écoulements sur la Valmasque, ce qui rend l’estimation plus incertaine que sur la Brague, où de nombreux traceurs sont visibles lors de la vidéo. Le manque de traceurs peut expliquer pourquoi les deux vidéos ont donné des résultats différents d’estimation des débits bien qu’elles aient été prises presque au même moment (1 min de différence), sur la même section, à la même position, et que l’analyse ait été faite sur la même section transversale et en utilisant les mêmes GRP. De plus, les coefficients de vitesse les plus pertinents dans notre cas sont proches de 0.85, qui est une valeur habituelle dans ce contexte.

La simulation pluie-débit obtenue sur la Brague@Biot avec le modèle KLEM est la plus proche de la série de débits observés lorsqu’on utilise un CN égal à 75. Nous avons donc choisi d’appliquer la même hypothèse de CN pour les deux bassins (Brague@Biot et Valmasque@Sophia), car les occupations du sol peuvent être considérées similaires, et que les pluies antécédentes sur ces bassins sont comparables. D’après l’étude de sensibilité des débits simulés par rapport au paramètre CN, il semble qu’un CN plus faible (60–70) correspondrait mieux au bassin de la Valmasque@Sophia (non montré ici).

Une perspective intéressante à ce travail serait d’utiliser les données acquises pour étudier la courbe de tarage associée à la station hydrométrique de la Brague@Biot, et notamment son extrapolation vers les plus hauts débits.

6. Conclusion

Dans cette étude, deux techniques différentes d’analyse d’image ont été appliquées sur plusieurs vidéos acquises lors de la crue du 23 novembre 2019 sur le bassin versant de la Brague, afin d’estimer les débits instantanés capturés par les vidéos. Les résultats obtenus sont cohérents avec les observations disponibles, ainsi qu’avec les simulations pluie-débit réalisées sur les bassins versants associés. De telles comparaisons sont nécessaires pour mieux estimer les valeurs de débit élevées, utilisées ensuite pour l’analyse statistique des crues, la modélisation des inondations ou la conception de structures hydrauliques, ainsi que pour utiliser les techniques d’analyse d’image sur des bassins versants non jaugés de la Côte d’Azur.

Accès aux données

Les données utilisées pour les analyses OpyFlow sont librement accessibles via une zone de dépôt GitHub (https://github.com/groussea/opyflow). Les données utilisées avec Fudaa-LSPIV sont accessibles sur demande à l’auteur.

Déclaration de divulgation

L’auteur ne déclare aucun intérêt concurrent.

Déclaration de consentement

Tous les co-auteurs consentent à la publication de cet article.

Remerciements

Ce travail a été réalisé dans le cadre d’un projet d’élèves ingénieurs en dernière année de la spécialité Génie de l’Eau de Polytech Nice Sophia, l’école d’ingénieurs d’Université Côte d’Azur. Les élèves remercient l’école Polytech Nice Sophia pour son financement pour la participation au colloque SHF, ainsi que leurs encadrants pour leur accompagnement dans ce projet. Les auteurs remercient Météo-France pour la mise à disposition des données de pluies, l’IGN pour les données altimétriques, et 3DF Zephyr (https://www.3dflow.net/3df-zephyr-photogrammetry-software/) pour la mise à disposition de licences d’enseignement qui nous ont permis de calculer les MNS et orthophotographies utilisés dans cette étude. Merci également à Rémi Dumasdelage pour son aide dans l’acquisition et le traitement des données photogrammétriques de la Brague@Biot. Enfin, les auteurs souhaitent remercier les relecteurs pour leurs remarques qui ont contribué à améliorer le présent article.

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